
Par 11 voix sur 20, le conseil de surveillance du groupe Le Monde a choisi l'offre de reprise des hommes d'affaires Bergé, Niel et Pigasse.Les personnels du quotidien s'étaient prononcés vendredi à une forte majorité en faveur de l'offre du trio.
AFP - L'offre de reprise du Monde par le trio Bergé-Niel-Pigasse l'a emporté lundi d'une courte tête, par 11 voix sur 20 au sein du Conseil de surveillance, alors qu'elle avait été plébiscitée par les salariés et restait seule en lice après le retrait de sa rivale.
Les trois associés de l'offre dite "BNP" vont mettre plus de 100 millions d'euros sur la table pour renflouer le groupe le Monde, au bord de la faillite. Ils ont accompagné cette enveloppe de garanties sur l'indépendance du prestigieux quotidien.
L'offre des hommes d'affaires Pierre Bergé, Xavier Niel (Free) et du banquier Matthieu Pigasse (Lazard), était partie favorite après le vote massif en sa faveur de toutes les sociétés de personnels du groupe, la semaine dernière. En revanche, elle n'avait pas les faveurs de l'Elysée. Eric Fottorino, patron du quotidien, l'avait fait savoir après une rencontre avec Nicolas Sarkozy.
Ironie de l'histoire, c'est finalement la voix de Claude Perdriel, patron du Nouvel Observateur et locomotive de l'offre rivale, qui a permis au trio d'obtenir cette courte majorité.
Non sans panache d'ailleurs, puisque M. Perdriel, conformément à son engagement, a retiré sa candidature dès le début de la réunion du Conseil de surveillance et a donné procuration à son président Louis Schweitzer. Celui-ci a fait basculé l'issue du vote en se prononçant pour l'offre "BNP".
L'offre proposée par Claude Perdriel, actionnaire du Monde depuis sept ans (1,75%), associait l'espagnol Prisa déjà au capital du Monde et Orange (groupe France Télécom).
"Nous considérons le Monde comme un bien commun", ont assuré les repreneurs dans un communiqué, annonçant l'ouverture dès mardi de négociations exclusives sur la recapitalisation du groupe qui devront être conclues "d'ici le 30 septembre".
"Seule une politique ambitieuse de renforcement de l'offre éditoriale et d'investissement dans l'activité numérique est de nature à conforter l'avenir du groupe", ont-ils affirmé.
Jusqu'au dernier moment avant le vote, pression, rumeurs et contre-rumeurs circulaient avec la crainte d'un clash au sein du Conseil qui aurait mené Le Monde à la faillite, faute d'accord entre actionnaires.
"C'est +BNP+ ou le tribunal de Commerce", avertissait peu avant la réunion un des protagonistes refusant d'être cité.
"Le conseil de surveillance a toujours été le théâtre d'affrontements entre d'un côté les administrateurs internes, principalement les journalistes, de l'autre les actionnaires extérieurs, comme Lagardère, Prisa ou Jean-Louis Beffa", résumait un familier du dossier.
"Choisir un repreneur est une chose, négocier la suite avec lui en est une autre", soulignait cette même source, ajoutant : "Les actionnaires externes seront donc exigeants sur les aspects techniques et poseront des conditions, contrairement aux journalistes qui ont exprimé un choix plus politique".
Parmi les représentants des actionnaires "externes", on trouve pêle-mêle Pierre Lescure, ancien patron de Canal+, aujourd'hui directeur de théâtre, Etienne Pflimlin, président du Crédit mutuel, Jean-Louis Beffa, de chez Lazard (la même banque d'affaires que Matthieu Pigasse).
Guillaume Sarkozy, frère du président de la République, est également membre du Conseil, comme délégué de l'organisation de retraite Médéric. Il devait toutefois donner procuration, pour éviter tout risque de confusion des genres.
La réunion de lundi se déroulait en deux temps, d'abord le conseil de Le Monde Partenaires et Associés (LMPA), puis l'avis de Le Monde Société Anonyme (LMSA), qui avait une valeur plus consultative.
LMPA contrôle 60% de LMSA, qui coiffe la société éditrice du quotidien et ses filiales (Télérama, La Vie, Courrier international).