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RéessayerLa question de l’avenir des propositions du rapport de la Convention citoyenne sur les temps de l’enfant est posée dès le manifeste introductif. Les 133 citoyennes et citoyens tirés au sort pour participer à cet exercice démocratique affirment que leur rapport "ne doit pas être un rapport de plus" qui finit sur une étagère et préviennent qu’ils seront "vigilants sur les suites données à [leur] travail".
Lancée au printemps à la demande du président de la République Emmanuel Macron, la Convention citoyenne sur les temps de l’enfant est la troisième du genre à être organisée par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) après la Convention citoyenne sur le climat (2019-2020) et la Convention citoyenne sur la fin de vie (2022-2023).
Or, les citoyens qui viennent d’achever leur mission, au terme de sept sessions de trois jours, du 20 juin au 23 novembre 2025, ont en tête les expériences précédentes et savent que celles-ci n’ont pas toujours donné lieu à une transposition politique concrète de leurs propositions.
Si le Parlement s’est clairement appuyé sur le rapport de la Convention citoyenne pour écrire la loi sur la fin de vie, on ne peut pas en dire autant de la loi Climat de 2021. Les citoyens de la Convention citoyenne avaient jugé sévèrement le texte de la ministre de la Transition écologique de l’époque, Barbara Pompili, estimant qu’il ne prenait pas suffisamment en compte leurs propositions. Seules 10 % d’entre elles avaient ainsi été reprises par le gouvernement, selon une enquête du site Reporterre, tandis que les autres avaient été édulcorées ou écartées.
"La force d’une Convention citoyenne se situe dans sa capacité à poser un momentum politique. Or, depuis ce week-end, on le voit, c’est un sujet qui passionne, nos propositions résonnent dans la société. Cette question des temps de l’enfant ne pourra pas être mise de côté et nous ferons tout, ensemble, pour que le sujet ne soit pas enterré", affirme à France 24 l’ancien syndicaliste étudiant Kenza Occansey, aujourd’hui vice-président du CESE chargé de la participation citoyenne.
Vives critiques des syndicats enseignants
Les réactions aux propositions citoyennes n’ont en effet pas manqué et ont été particulièrement vives, en particulier chez les syndicats enseignants. Le rapport final propose notamment d’instaurer cinq jours d’école pleins par semaine, de consacrer les matinées aux cours théoriques et les après-midis aux enseignements plus pratiques et d’alléger les apprentissages et les devoirs à faire à la maison, tout en conservant le même volume de vacances scolaires. Mais pour le Snes-FSU, principal syndicat du second degré (collèges et lycées), cette vision conduirait à une "impasse organisationnelle" et à une "école au rabais" avec un "zapping permanent" dont les effets "seraient particulièrement défavorables aux élèves les plus en difficulté".
Le Snalc (syndicat enseignants minoritaire dans les collèges et lycées) est encore plus sévère. Il juge de son côté que les 4 millions d'euros qu'a coûté la Convention citoyenne sont "4 millions d'euros jetés par la fenêtre". "L'ensemble du rapport est complètement déconnecté de ses conditions de réalisation et du fonctionnement réel de notre pays", déplore-t-il.
"Je trouve étonnant d’attaquer un rapport qui reprend les principales revendications des syndicats concernant la revalorisation salariale des enseignants ou la réduction du nombre d’enfants par classe, répond Kenza Occansey. Ces réactions sont le symptôme de débats mal posés depuis des décennies, de réformes imposées et dont les enseignants sont les victimes. Je les invite à lire le rapport dans son intégralité. Ils verront qu’il est exigeant et ambitieux tout en étant responsable. La situation actuelle n’est plus tenable pour les enfants, il faut que ça change."
Les "rythmes scolaires sont inadaptés aux rythmes biologiques des enfants", constate le rapport, les enfants subissant "un modèle de société valorisant la productivité et la performance", avec des temps libres "de plus en plus rares" et une omniprésence des écrans aux "conséquences majeures sur leur santé, leurs apprentissages, leur développement".
Au-delà des critiques, le contexte politique ne joue pas non plus en faveur de la Convention citoyenne sur les temps de l’enfant. Celle-ci a été mise en place par un Premier ministre, François Bayrou, qui a depuis été renversé et remplacé par Sébastien Lecornu, qui ne sait pas combien de temps il restera à Matignon. Les ministres concernés – Éducation nationale, Familles, Sports, Jeunesse et Vie associative notamment – ne sont plus les mêmes. Les contraintes budgétaires ne favorisent pas les investissements nécessaires pour de tels changements. Et l’Assemblée nationale est toujours aussi divisée.
"La France est en décalage"
Le CESE a toutefois obtenu du gouvernement que les ministères concernés travaillent sur les propositions et rendent un avis d’ici deux semaines. Une fois ce travail interministériel effectué, la remise officielle du rapport sera alors organisée et des premières réponses seront attendues.
La députée Renaissance et éphémère ministre de l’Éducation nationale sous Michel Barnier, Anne Genetet, a également obtenu l’organisation au premier trimestre 2026 d’une audition des responsables de la Convention citoyenne à la commission des Affaires cultures et de l’Éducation de l’Assemblée nationale.
"Il faut faire vivre le débat et donner du souffle à ces recommandations car le sujet de l’école est primordial. Le rapport de la Convention citoyenne retranscrit ce que beaucoup de spécialistes disaient depuis des années, voire des décennies, et que beaucoup de pays reprennent, tandis que la France reste en décalage. En Asie, où je suis élue, les cours ont lieu le matin et s’arrêtent à 14 h ou 15 h grand maximum", souligne auprès de France 24 la députée des Français établis hors de France, qui était présente dimanche au CESE pour la conclusion des travaux de la Convention citoyenne.
L’ancienne ministre, pour qui la réaction des syndicats enseignants traduit une "souffrance" face aux "conditions difficiles d’exercice de leur métier", ne croit toutefois pas que des changements majeurs pourront être possible dès la rentrée 2026. "Il faudra du temps", reconnaît-elle.
Le vice-président du CESE veut croire de son côté que les propositions "vivront grâce à la campagne des municipales" lors des quatre prochains mois. Et si ce n’est pas le cas, lui et les 133 citoyennes et citoyens ayant participé à la Convention feront tout pour imposer le sujet lors de l’élection présidentielle 2027. "Le sujet ne disparaîtra pas tant qu’on ne l’aura pas traité. Il est plus que temps de faire des besoins des enfants une priorité", estime Kenza Occansey.
