
Les séparatistes flamands existent depuis la création de la Belgique. Le N-Va est le premier parti de ce courant à gagner - grâce aux législatives du 13 juin - une élection fédérale. Reste à savoir ce qu’il va faire de son lourd héritage.
Jamais un parti séparatiste flamand n’était arrivé en tête d’un scrutin fédéral. Mais la victoire, avec 28,3% des votes, de la Nouvelle alliance flamande (N-Va) lors des législatives du 13 juin n’est que la partie la plus visible de la montée en puissance, en Flandres, des mouvements séparatistes. Avec, selon les dernières projections électorales, près de 45% des sièges des néerlandophones au Parlement belge, ils obtiennent un poids politique sans précédent dans un pays plus divisé que jamais.
Sans précédent, mais pas sorti de nulle part. Le courant séparatiste – ou nationaliste – flamand remonte à la création même de l’État belge en 1831. Le pays était, à cette époque, dominé par une élite francophone. Pendant cinquante ans, le français est imposé comme langue unique aux néerlandophones, pourtant plus nombreux. Ce rapport de force initial marquera durablement la physionomie des différents mouvements flamands, très revendicatifs et anti-francophones.
Parti fasciste
Une position qui se traduit par des errements lors des deux guerres mondiales. Si seulement une minorité de Flamands se range timidement du côté des Allemands durant la Première Guerre mondiale, les nationalistes soutiennent plus largement le régime nazi entre 1939 et 1945, à l’image de la Ligue nationale flamande (VNV).
Apôtre de la séparation entre la Wallonie et la Flandres depuis les années 1920, le VNV se transforme pendant la guerre en parti fasciste. Une dérive qui marginalise pendant longtemps le courant séparatiste et lui vaut de s’installer durablement à l’extrême droite de l’échiquier politique.
Il faudra attendre les élections de 1965 pour que la Volksunie, le grand parti nationaliste flamand d’après-guerre, fasse autre chose que de la figuration. Avec 12 députés, puis 21 dix ans plus tard, c’est le grand retour des thèses séparatistes. Pendant plus de 40 ans, portée par les succès électoraux, la Volksunie réussit à fédérer des sensibilités nationalistes très disparates, aussi bien de gauche que d’extrême droite.
De séparatiste, le parti penche peu à peu vers un fédéralisme institutionnel. Une normalisation politique qui n’est pas au goût de tous. Dans les années 1990, la Volksunie connaît ses premiers déboires dans les urnes et les velléités des éléments les plus radicaux de cet assemblage se font d’avantage entendre.
Discours plus modéré
Le parti implose en 2001, ouvrant une phase de recomposition du paysage politique flamand. A l’extrême droite, on retrouve les durs des durs du Vlaams Blok (qui avaient déjà quitté la Volksunie en 1971) tandis que le N-Va tente de s’imposer par un discours plus modéré. Mais la Nouvelle alliance flamande flirte également avec les idées d’extrême droite. Une photo célèbre montre son président actuel, Bart De Wever, tout sourire, aux côtés du leader du Front National français, Jean-Marie Le Pen, en 1996.
N’empêche, la parti tente, pour exister, de rentrer dans le jeu politique traditionnel flamand et participe même à une coalition de gouvernement avec les chrétiens-démocrates du CD&V. Cette alliance – baptisé cartel flamand – prend fin en 2008. Le N-Va reprend son autonomie, une option payante à la vue de la victoire de dimanche.