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"Mon Bonheur", la route chaotique du cinéma ukrainien

, envoyée spéciale à Cannes – Le premier long métrage de l'Ukranien Sergei Loznitsa, ancien documentariste, se retrouve directement propulsé dans la sélection officielle. "Mon Bonheur" raconte l’histoire d’un routier qui se perd dans la campagne russe. Tours et détours.

Le premier long-métrage de Sergei Loznitsa "Schastye Moe" ("Mon Bonheur"), présenté à Cannes en sélection officielle, raconte l’histoire de Georgy, un routier qui quitte sa ville natale avec un camion rempli de marchandises. Contraint d’emprunter une mauvaise route, il passe de villes en villages et entre progressivement dans les méandres de la vie quotidienne des habitants qu’il rencontre : une prostituée mineure, une étrange bohémienne, des policiers corrompus. "Le réseau routier russe est conçu comme un arbre ; partant des grandes villes pour aller vers les petites villes, puis les villages et enfin les hameaux. Mais de là, il n’y a aucun moyen d’aller plus loin, sinon faire demi-tour", raconte Sergei Loznitsa, pour expliquer la construction de son film.

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Que celui qui pense que le spectateur passe deux heures sept sur les routes avec le personnage de Georgy se détrompe, car il n’en est rien. L’histoire – qui ne mène nulle part, sinon au chaos final – loin d’être linéaire, ne cesse d’aller de ramifications en digressions et retours en arrière, en pleine guerre… on perd vite le fil. Lorsque Sergei Loznitsa raconte "en tant que documentariste, j’ai traversé la Russie en long et en large, et après chaque périple on revenait avec plein d’anecdotes", il semblerait qu’il ait mis ses expériences passées bout à bout pour faire un film.

Des notes d’humour s’invitent en filigrane dans certains dialogues et parfois même à l’arrière-plan d’une scène ; et font alors un certain écho au "kitsch" d’Emir Kusturica. Par ailleurs, l’image simple et efficace de "Mon bonheur", emporte le spectateur là où se passe l’action. On a froid avec les personnages qui meurent sur le bord des routes enneigées, on a mal avec ceux qui se font tabasser dans les postes de police et on a peur pour les jeunes prostituées sur le bord des routes.

Notons la collaboration du cinéaste avec le chef opérateur Oleg Mutu de "Quatre mois, trois semaines, deux jours" du Roumain Cristian Mungiu (Palme d’Or en 2007) qui confère d’autant plus à cette fiction un air de documentaire. Le jury y trouvera-t-il son bonheur?