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Le scrutin uninominal majoritaire à un tour favorise les grands partis britanniques. Sans majorité absolue à l'issue des législatives du 6 mai, travaillistes et conservateurs pourraient être contraints d’accepter une révision de ce système.
Le scrutin uninominal à un tour sera-t-il la première victime des élections législatives britanniques ? Ni les travaillistes ni les conservateurs n’ayant obtenu la majorité absolue le 6 mai, ils sont aujourd’hui au pied du mur. Si aucun des deux grands partis n’a intérêt à ce que le système électoral soit réformé, ils pourraient être obligés d’accepter une telle révision pour rester au pouvoir.
En effet, Nick Clegg, le chef de file des libéraux démocrates, entend bien en faire une monnaie d’échange dans le cadre des négociations visant à former une coalition de gouvernement. Il avait laissé entendre pendant la campagne qu'une réforme du scrutin était indissociable de tout accord de coalition, tempérant ensuite ses propos en disant que ce n’était pas une "condition préalable".
Promesse non-tenue du Labour
Dès jeudi soir, les travaillistes ont proclamé la mort de ce scrutin. "Il faut une réforme électorale parce que, clairement, le scrutin uninominal majoritaire à un tour vit ses derniers jours", a déclaré Peter Mandelson, ministre du Commerce et numéro deux du gouvernement.
Si Gordon Brown assure vouloir réformer le scrutin, le Labour n’a pourtant jamais mis en œuvre sa promesse de référendum sur le sujet, au cours des 13 années qu'il a passées au pouvoir.
Les conservateurs, qui ont proposé aux "lib dem" un accord "large et ouvert" de partage du pouvoir, ont de leur côté indiqué qu’ils étaient ouverts à la négociation sur cette question.
Sous-représentation des petits partis
Le scrutin uninominal à un tour, en vigueur depuis plus de 150 ans au Royaume-Uni lors des élections législatives, a longtemps garanti la stabilité du système politique tout en permettant l’alternance entre les deux grands partis.
Ce mode de scrutin est d’une grande simplicité. Le candidat qui recueille le plus de voix dans une circonscription donnée l’emporte, même s’il n’a que peu de suffrages dans l’absolu - moins de la moitié par exemple. Il entraîne de ce fait une sous-représentation des petits partis, en amplifiant parfois très largement la victoire du parti arrivé en tête.
En 2005 par exemple, le Labour n'avait remporté que 35,2 % des voix, mais avait bénéficié de plus de 55 % des sièges à la Chambre des communes. Les libéraux démocrates avaient recueillis, eux, 23 % des suffrages exprimés, mais enlevé 10 % des sièges seulement.
Instauration de la proportionnelle
Les partis minoritaires, libéraux démocrates en tête, militent depuis longtemps pour la réforme de ce système et l’instauration de la proportionnelle.
Les travaillistes proposent d'introduire le vote alternatif, ou vote préférentiel. Avec ce système électoral par classement, utilisé notamment en Australie, les voix des moins bons candidats sont redistribuées.
Les "lib dem" privilégient de leur côté le scrutin à vote unique transférable, qui vise à assurer la représentation proportionnelle tout en limitant l'influence des partis. Il permet aux électeurs de choisir des candidats autres que ceux placés en tête de liste.
En 1997, Tony Blair avait évoqué l'idée de nommer une commission chargée d'élaborer un projet de réforme du mode de scrutin. Après avoir remporté les élections, il avait abandonné le projet.