Touchés de plein fouet par la marée noire qui pollue les côtes de Louisiane, les pêcheurs espèrent que le gouvernement leur viendra en aide. La compagnie pétrolière à l'origine de la catastrophe, BP, cristallise les rancœurs. Reportage à Venice.
Tony, 71 ans, est pêcheur, comme la majorité des habitants de Venice, en Louisiane. Depuis l’arrivée de la marée noire, il sait qu’il ne repartira pas pêcher avant longtemps. Réduit à contempler l’évolution de la nappe de pétrole sur le radar de son bateau, il ne peut s’empêcher de penser à sa saison ruinée et à une éventuelle aide des autorités. "Qu’est ce qu’ils vont faire pour nous aider, pour qu’on puisse passer peut-être les deux prochaines années ?, s’interroge-t-il. On ne sait pas..."
Des centaines d’habitants se sont rassemblés dans le lycée de la ville dans l’espoir de participer aux opérations de nettoyage des côtes. Un travail payé par BP, la société pétrolière britannique qui les a mis au chômage forcé. Dave Kinnarrd, directeur des relations communautaires chez BP, est venu à la rencontre des sinistrés. “Nous sommes ici pour les aider, promet-il à qui veut l’entendre. Franchement, en ce moment même, je ne sais pas trop ce qu’on peut faire pour eux. Je viens d’arriver, je suis là depuis quelques heures seulement. Mais notre rôle c’est de parler aux habitants, pour voir ce dont ils ont besoin et satisfaire à leurs besoins autant que nous le pouvons.”
"Le chaos complet"
Mais les bonnes intentions du représentant de BP ne semblent pas convaincre tout le monde, et la conversation s’anime vite. Pour A.C. Cooper, le vice-président de l’association des pêcheurs de crevettes de Louisiane, la priorité de la société pétrolière à l’origine du désastre doit être l’emploi.
“BP doit s’engager et d’abord nous donner du travail, s’exclame-t-il. L’État [de Louisiane, ndlr] doit s’engager et le gouvernement fédéral doit s’engager. Il faut que tout le monde ait un plan quand une merde pareille arrive."
Personne ne connaît mieux les eaux de Venice que ses pêcheurs, et c’est la raison pour laquelle ils sont si enclins à aider. Mais cette forte volonté a du mal à se traduire par des efforts concrets, car les pêcheurs, livrés à eux-mêmes, ne sont pas organisés, ce qui ralentit les opérations de nettoyage. "C’est le chaos complet”, soupire l’un des pêcheurs.