, envoyée spéciale à Cannes – Happés par l'énergie de Kinshasa, Renaud Barret et Florent de La Tullaye ont suivi les Staff Benda Bilili, un groupe de musiciens paraplégiques qui rayonne dans le marasme kinois. Ce documentaire a fait l'ouverture de la Quinzaine des réalisateurs.
Coup de foudre sur Kinshasa
Tout a commencé très vite. En 2003, Renaud Barret, alors graphiste, accompagne une amie journaliste en République démocratique du Congo (RDC) est immédiatement saisi par l’énergie débordante qui émane d’une capitale pourtant en proie à la pauvreté endémique, la polio et le tumulte politique. Danse, chant et espoir s’invitent à tous les coins de rues. Renaud Barret somme son ami photographe Florent de La Tullaye, alors en reportage en Sibérie, de le rejoindre au plus vite dans ce vivier de talents. En 2004, ils réalisent ensemble "La Danse de Jupiter" : un premier documentaire qui propose une virée dans les ghettos de Kinshasa à la rencontre de musiciens (rappeurs, griots, inventeurs d’instruments et bluesmen) qui se battent pour sortir du néant. Quatre ans plus tard, les deux compères livrent "Victoire Terminus, Kinshasa". Ce second documentaire dresse le portrait d’un groupe de femmes au caractère bien trempé qui choisissent de pratiquer la boxe.
Au gré des rencontres, les deux hommes dessinent le portrait d’une ville en plein chaos mais habitée d'une stupéfiante énergie créative. Un sentiment que Renaud Barret et Florent de La Tullaye vérifient une fois encore avec un troisième documentaire "Benda Bilili", sélectionné par la Quinzaine des réalisateurs au programme de ce 63e Festival de Cannes. Le film est un portrait de Staff Benda Bilili (qui signifie "Regarde au-delà des apparences") un orchestre de paraplégiques sur chaises roulantes "tunées", sans domicile fixe, vivant et jouant de la musique sur des instruments qu’ils ont fabriqués, dans les jardins du zoo de Kinshasa. Mêlant rumba et funk aux musiques traditionnelles, ces musiciens et chanteurs endiablés font une musique qui décrit leur vie.
" Fou d’amour pour la ville et son énergie créative"
Embarqués dans les ghettos de Kinshasa pour "La Danse de Jupiter", Renaud Barret et Florent de La Tullaye entendent le son de Benda Bilili au détour d'une rue. En 2004, les musiciens viennent de se rencontrer. "Staff Benda Bilili, c’était le maximum de ce que ça pouvait être. Ces gars vivent dans la rue, dorment sur des cartons, n’ont pas de jambes et en même temps chantent comme des ténors et des virtuoses oubliés. On a eu un coup de foudre musical pour eux et, en rentrant en France, on s’est dit : "Il faut qu’on les produise", raconte Renaud Barret à France24.com.
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"Dès notre première rencontre, ces musiciens nous ont annoncé : "Nous allons être le groupe de musiciens handicapés le plus célèbre au monde et avec vous on y arrivera", expliquent les réalisateurs qui ont également monté le label musical Belle Kinoise. Les deux hommes se sont naturellement laissés porter par leur énergie et ont commencé à livrer bataille pour produire un album.
De la production à la réalisation
Paris-Kinshasa, Kinshasa-Paris... Les deux hommes en quête de producteurs associés cumulent les allers-retours entre les deux capitales pour faire connaître les talents qu’ils sont décidés à suivre. Pour asseoir leur force de conviction auprès des labels parisiens, Renaud et Jérôme prennent des images des répétitions et de scènes de vie kinoises. Au fil du temps et des échanges, les Français se familiarisent avec la langue lingala et le quotidien des rues. Après des mois de répétitions, entrecoupées des confidences des "shegues" (enfants vagabonds), qui s’accrochent au Staff Benda Bilili, la bande-démo des deux Français prend des allures de documentaire.
Un premier album "Très très fort", édité par le label belge Crammed, a finalement vu le jour en 2009. Noyés sous le succès, les dix membres du Staff Benda Bilili enchaînent les scènes européennes. Le documentaire, qui retrace leur histoire et suit leur ascension, fait l'ouverture de la Quinzaine des réalisateurs.