
Alors que le trafic aérien revient peu à peu à la normale, compagnies aériennes et passagers font les comptes. Les premières accusent des pertes abyssales et doivent désormais rembourser ou assurer le rapatriement et l'hébergement des passagers.
Le trafic aérien dans le ciel européen reprend peu à peu son cours normal. Une semaine après l’éruption volcanique qui a contraint de nombreux pays d’Europe à fermer leur espace aérien, plusieurs dizaines de milliers de passagers restent toujours bloqués dans des aéroports du monde entier. Gouvernements, autorités de l’aviation civile et compagnies aériennes ont averti que le rapatriement des voyageurs prendrait plusieurs jours, voire plusieurs semaines.
Des vacances forcées qui engendrent des dépenses imprévues : hôtel, nourriture, etc. Un couple de Français, bloqué au Japon, témoigne : "Le budget devient très élevé. Les assurances ne veulent rien entendre. Comment vont faire ceux qui n'ont pas de budget de côté ? Une voyageuse espagnole, bloquée depuis plusieurs jours au Royaume-Uni avec sa famille, affirme avoir dépensé 600 euros depuis le début de la crise pour la nourriture et l’hébergement. "Nous ne savons pas si nous serons remboursés", se désole-t-elle.
Une réglementation européenne très claire
La législation européenne prévoit la prise en charge de ces surcoûts par les compagnies aériennes. "Dans les cas de vols européens, en partance d’un État d’Europe ou d’un État tiers mais avec une compagnie sous licence européenne, les règlements sont claires", explique Gaëlle Paletta, directrice juridique de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir. "Ils prévoient le remboursement du billet d’avion si l’appareil ne part pas. Si le vol est décalé de plusieurs jours, la compagnie doit assurer la prise en charge à l’aéroport, avec rafraîchissements, nourriture, hôtel."
Certaines compagnies ne l’entendent pourtant pas de cette oreille. C’est notamment le cas de la compagnie irlandaise low cost Ryanair, qui a fait savoir mercredi qu’elle limiterait le remboursement au prix du billet d’avion… qui n’excède pas 30 euros en moyenne. "La loi européenne [sur les modalités de remboursement] a été créée au cas où la compagnie aérienne est responsable de l’annulation d’un vol, estime Stephen McNamara, porte-parole du groupe. Dans ce contexte, nous n’avons rien à nous reprocher et je pense que la solution que nous avons trouvée est raisonnable."
Un principe de précaution "poussé à l'extrême" ?
Mike Carrivick, directeur général britannique de l'Association des représentants des compagnies aériennes (BAR), dénonce, lui, la réglementation européenne "injuste", trop généreuse selon lui sur les remboursements des frais occasionnés aux passagers. Après une semaine de paralysie du trafic aérien, les compagnies aériennes accusent des pertes abyssales. Selon l’Association internationale du transport aérien (IATA), le survol du territoire européen par le nuage de cendres a d’ores et déjà coûté 1,7 milliard de dollars (1,26 milliard d’euros) aux compagnies. Les conséquences de l’éruption du volcan islandais ont été qualifiées de cas de force majeure : l’évènement est considéré comme imprévisible et irrésistible et n’est donc pas couvert par les assurances.
Dénonçant un "principe de précaution poussé à l’extrême", les compagnies aériennes et les tour-opérateurs européens s’élèvent contre la gestion de la crise par les différents gouvernements européens. Pour eux, la fermeture du trafic aérien n’était pas nécessaire : ils considèrent que le nuage de cendres causé par le volcan islandais n'était pas aussi dangereux pour les avions qu’annoncé par les gouvernements européens.
Le président français de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, a annoncé, mercredi sur France Info, la remise le 18 mai d'un rapport du comité d'évaluation des politiques publiques et de contrôle sur la mise en œuvre du principe de précaution. "Le 18 mai, Alain Gest (UMP) et Philippe Tourtelier (PS), remettront un rapport. Ce sera la première étape de l'évaluation de la mise en œuvre du principe de précaution."