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Cinq ans d'un pontificat controversé

C’est un pape malmené qui célèbre le 5ème anniversaire de son pontificat. Le 19 avril 2005, Joseph Ratzinger succédait au très charismatique Jean-Paul II. En 2010, son bilan est compliqué. Après son passé dans les jeunesses hitlériennes et la réintégration de l’évêque négationniste Richard Williamson, les scandales de pédophilie ne cessent de se multiplier.

Le 19 avril 2005, le Cardinal Joseph Ratzinger est élu pour succéder au populaire Jean Paul II. Le défi est de taille pour ce théologien qui préfère la solitude de son bureau au Vatican aux larges foules.

Le pape Benoit XVI se lance toutefois dans la tache de réunifier l’Eglise et de retrouver les fondamentaux de la foi catholique. Mais, dès le début, le pontificat se présente de façon difficile.

« D’abord on a un homme qui n’était pas préparé pour être Pape », estime Antoine-Marie Izoard, directeur de l’agence de presse I.Média, spécialisée sur le Vatican . « Il a accepté avec humilité, c’est ce qu’il dit. C’est un homme réservé, timide, qui n’est pas un homme qui va au contact des foules naturellement, mais qui a appris petit à petit à ‘faire le Pape’ comme on a dit au tout début de son pontificat. Evidemment, il souffre aussi de la comparaison avec son prédécesseur polonais très charismatique. Moi je le vois un peu comme un Pape de l’intérieur, plus que de l’extérieur comme l’était Jean-Paul. »

Depuis cinq ans, ce Pape de l’intérieur se retrouve confronté à des crises incessantes avec le monde extérieur. Les relations du Vatican avec les communautés musulmanes et juives sont tendues. Ses réflexions, en Afrique, sur le préservatif risquant d’augmenter le problème du Sida, le présentent comme un Pape trop conservateur. Et, derniers en date, les scandales des prêtres pédophiles dissimulés pendant des décennies dans plusieurs pays occidentaux risquent de remettre en cause son autorité morale.

« Certainement que les historiens parleront de cela parce qu’on n’a jamais vécu ça dans l’église depuis longtemps », affirme Patrick Valdrini, recteur de l’église Saint-Louis des Français à Rome.

De nombreux responsables du clergé se sentent impuissants face à cette vague de scandales. Selon eux, Benoit XVI devrait être vu comme un Pape moderne, voulant faire appel à l’intelligence des fidèles. Mais le message ne passe pas en conséquence d’un entourage jugé rétrograde et d’une communication erratique. Le fossé s’agrandit avec le monde extérieur.

« Soit l’église catholique reste dans une tendance dure, ce qu’elle a tendance à faire aujourd’hui, et je pense que le fossé va s’agrandir ; soit elle va décider de s’adapter un peu plus au monde moderne et dans ce cas de figure, elle arrivera probablement à récupérer des fidèles », estime Philippe Massicot, un touriste catholique rencontré à proximité de la place Saint-Pierre.

De larges groupes de touristes continuent de visiter le Vatican chaque jour. Parmi les fidèles faisant le voyage de Rome, certains parlent de leur désaffection vis-à-vis d’une église trop conservatrice, mais beaucoup pensent que le Pape est surtout victime d’une campagne médiatique… que l’Eglise peut être blessée, mais qu’elle ne sera pas détruite.

  • Philippe LEVILLAIN, professeur émérite des Universités, spécialiste de la papauté, auteur de « Le moment de Benoît XVI » (ed. Fayard 2008)
  • Alexis MASCIARELLI, correspondant de France 24 à Rome
     

Emission préparée par Kate Williams, Marie Billon et Patrick Lovett