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Nom de code : Mushtarak. C’est la plus vaste opération jamais lancée par les forces de l’OTAN en Afghanistan. À grand renfort de communication. Il aura fallu deux semaines de combats pour déloger les Talibans de leur bastion de Marjah. Mais sur place, la partie s’annonce difficile pour gagner le cœur des habitants.

L’opération Mushtarak, la plus vaste jamais lancée par l’OTAN en Afghanistan depuis 2001 a engagé 15000 soldats étrangers et afghans, dans la province du Helmand. Déclenchée le 13 février, l’offensive a pris fin deux semaines plus tard, quand les autorités afghanes ont repris le contrôle des districts de Marjah et de Nad Ali aux rebelles Taliban. L’opération - un test pour la nouvelle stratégie de Barack Obama et du général Mackrystal, commandant les forces alliées -, a été qualifiée de succès.

Gulab Mengal, gouverneur de la province du Helmand, nous reçoit tout sourire. Assis sur une chaise à l’allure de trône, sous des lustres rutilants, il explique : "Le plus important pour nous n’était pas seulement de reprendre Marjah aux ennemis, notre but était de gagner la population. L’opération était une demande des habitants de les libérer de l’oppression des Taliban". Son discours semble bien rodé.

La bataille de Marjah, pourtant, est loin d’avoir été gagnée. Les combats y sont toujours quasiment quotidiens parce que les rebelles Taliban n’ont pas quitté la zone : ils sont passés dans la clandestinité et contrôlent le district dès que la nuit tombe. Jeudi, ils ont tués quatre chefs tribaux, d'après le porte-parole du gouverneur de la province, Daoud Ahmadi. Selon un officier américain, ils seraient dans leur majorité originaires de Marjah.

Les autorités afghanes n’ont pas gagné le soutien de la population. D’abord, parce qu’elle a été prise au piège des combats. " Ils n’ont eu aucun moyen de partir, explique Bertrand Métraux, chef du Comité international de la Croix-rouge à Lashkar Gah. La situation était très difficile pendant l’opération mais aujourd’hui encore, la circulation normale n’est pas rétablie". Ensuite, parce que les habitants se méfient des policiers afghans. " Ils nous dérangent, s’installent sur des propriétés privées, nous volent !, accuse avec colère Haji Kher Mohamad, commerçant de Loy-e-Charoï. Nous avons peur d’eux".

Le nouveau chef du district aussi est vu comme un étranger : il n’a pas vécu dans la région depuis plus de quinze ans. À Marjah, les autorités afghanes et les forces étrangères sont perçues non pas comme des libérateurs mais comme des forces d’occupation. Et la politique de travaux publics, censés renverser cette tendance en apportant du travail aux habitants, n’a toujours pas commencé…