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"Le casse à l’ancienne est revenu à la mode"

Christophe Gesset, conseiller technique du syndicat Synergies-officiers, explique le retour des braquages et des casses à l’ancienne, qui semblaient avoir laissé place aux attaques de fourgons blindés et autres cambriolages à la voiture bélier.

Les casses à l’ancienne se multiplient ces dernières semaines. Une agence de la banque BNP-Paribas, située dans le XIIIe arrondissement de Paris, a été attaquée dans la nuit de samedi à dimanche. Les malfaiteurs ont creusé un tunnel pour accéder aux sous-sols, sans pouvoir pénétrer dans la salle des coffres, une télé-alarme ayant déclenché l'alerte. Cette tentative intervient une semaine après la visite réussie d’un Crédit Lyonnais, dans le centre de Paris, où plus de 100 coffres individuels ont été dévalisés. Un casse qui n'est pas sans rappeler celui mené à Nice en 1976 par Albert Spagiarri, qui a dévalisé l'équivalent de 26 millions d'euros dans une banque de Nice en creusant un tunnel. Son acte avait été qualifié à l'époque de "casse du siècle".

La liste ne s’arrête pas là. Dimanche dernier, un casino de Lyon a été attaqué par un commando armé. Les braqueurs se sont emparés de plusieurs dizaines de milliers d'euros avant de prendre la fuite, sans faire de victimes.

Christophe Gesset, commandant de police et conseiller technique du syndicat Synergies-officiers, analyse pour France24.com la recrudescence de ce genre de forfaits.

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Depuis plusieurs semaines, des casses à l’ancienne et des braquages font à nouveau la une des médias. Comment analysez-vous ce phénomène ?
Christophe Gesset : Il y a des périodes ou certains types de vols reviennent à la mode. C’est le cas des casses à l’ancienne. Mais il faut faire la différence entre le braquage du casino de Lyon et le casse raté de la BNP à Paris. Le premier cas est inquiétant car il s’agit d’une confrontation directe. Ce qui nous rend très nerveux. Quand vous êtes face à des voyous paniqués qui maîtrisent mal une arme, en l’occurrence une Kalachnikov à Lyon, le dérapage est toujours possible.
En revanche, dans le cas d’un casse où on passe par les égouts ou la cave, il n’y a pas ce risque. Ce phénomène est curieux quand on sait que, depuis quelques années, les banques se sont équipées et modernisées. D’ailleurs, on se rend compte qu’il n’y a quasiment plus de braquages, car il y a de moins de moins de liquidités dans les agences. Ils sont tombés en désuétude à cause des systèmes de protection. Seuls des "losers" tentent encore des vols à mains armées au guichet.
Comment expliquer cette vulnérabilité des sous-sols des banques à l’heure où les méthodes de surveillance rivalisent de modernité ?
C.G : Il faut faire confiance à la capacité d’analyse des bandits. Ces derniers se sont rendus compte que tel ou tel type de banque a une faiblesse, comme les fameux tiroirs forts de la Poste qui ont été braqués à la fin de l’année dernière. Dans les vieilles-villes historiques, comme Paris, les banques se sont implantées dans des bâtiments qui n’ont pas été conçus à l’origine pour les accueillir. Les agences se sont alors protégées de l’intérieur, ce qui est insuffisant. En se concentrant sur la chambre forte qui contient les liquidités, certaines banques n’ont pas assez protégé l’accès aux coffres individuels, où n’ont pas pu le faire pour des raisons techniques, d’où les récentes tentatives.
Récemment, plusieurs films dédiés à des figures du grand banditisme ont rencontré un franc succès. Peut-on lier ce phénomène au retour des casses à l’ancienne ?
C.G : Il y a certes une vision romantique et nostalgique liée aux années 50,60 et 70. On a tous en mémoire le film "Mélodie en sous-sol" ou les braquages de Mesrine récemment portés à l’écran. Mais l’influence du cinéma sur ce genre de délinquance reste limitée. Elle concerne essentiellement le vestimentaire ou l’accessoire. Des lunettes de soleil ou encore des voitures de collection peuvent revenir à la mode, mais le cinéma n’a aucune influence sur le mode opératoire des apprentis voyous. Leurs aînés sont amplement capables de leur apprendre ce qu’il faut, souvent dans le milieu carcéral, sans qu’ils aient besoin d’aller au cinéma.