
Des militaires français participent à l'exercice militaire Pikne ("Éclair") sur l'île de Saaremaa, en Estonie, le 26 septembre 2025. © Sergei Grits, AP
Les Français vont-ils reprendre du service ? Aboli en 1997 sous la présidence de Jacques Chirac, un service militaire volontaire devrait faire son retour en France. À l'étude depuis plusieurs mois, le projet est en passe d'être officiellement annoncé cette semaine par Emmanuel Macron.
Interrogé mardi sur RTL, le président de la République n'a pas confirmé la réintroduction d'un service militaire mais évoqué "une transformation du Service national universel vers une nouvelle forme", sans fournir plus de précisions.
Ce dernier pourrait concerner 10 000 à 50 000 personnes par an, selon plusieurs sources proches du dossier. Ce service volontaire aurait une durée de 10 mois et serait rémunéré entre 900 et 1 000 euros, d'après plusieurs médias français.
Face à la menace russe, d'autres pays du Vieux Continent ont ouvert la voie à des formes de conscriptions élargies comme en Belgique, aux Pays-Bas ou encore en Allemagne. Fin août, Berlin a adopté une loi pour réinstaurer un service militaire basé sur le volontariat. Un questionnaire sera envoyé dès 2026 aux jeunes de 18 ans pour évaluer leurs compétences et leur intérêt pour un engagement au sein de la Bundeswehr.
Pour autant, aucun pays européen n'envisage pour le moment un retour du service militaire obligatoire, la grande majorité l'ayant abandonné dans les années 1990 (France, Belgique, Pays-Bas) et 2000 (Espagne, Slovénie, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Portugal, Italie, Roumanie, la Bulgarie, et Allemagne). Quant à l'Irlande et Malte, ces deux pays n'ont jamais instauré de service militaire obligatoire.

Ceux qui tiennent au service obligatoire
Après la fin de la Guerre froide, la conscription a perdu de son intérêt au profit d'une montée en gamme des armées professionnelles, jugées moins coûteuses et plus efficaces. Cependant, six pays de l'UE ont maintenu un service militaire obligatoire : l'Autriche, Chypre, le Danemark, l'Estonie, la Finlande, et la Grèce où la conscription est en vigueur depuis la Première Guerre mondiale.
Les conditions et la durée des conscriptions diffèrent dans chaque pays. En Grèce, les recrues s'engagent pour une durée de neuf mois à un an et jusqu'à 14 mois pour Chypre. Au Danemark, la conscription repose sur un système de tirage au sort. Depuis cet été, elle est également obligatoire pour les femmes. Le pays envisage ainsi de former 6 500 conscrits par an à partir de 2033, soit une augmentation de 40 %.
En Finlande, où le service est obligatoire pour tous les hommes entre 18 et 30 ans, l'armée devrait pouvoir compter sur un million de réservistes d'ici 2031, soit un habitant du cinq. Une politique destinée à mettre sur pied une armée de masse et démontrer la détermination d'Helsinki face à son puissant voisin russe. En 2023, le pays scandinave avait mis fin à des décennies de non-alignement militaire en rejoignant l'Otan.
Dans ces pays où le service militaire est une institution, ceux qui refusent de s'y plier pour objection de conscience peuvent toutefois s'acquitter d'un service civil. En Finlande, la durée de ce service alternatif équivaut au double de celle du service militaire, soit une année complète. En cas de nouveau refus, les contrevenants risquent des peines de plusieurs mois de prison ou d'assignation à résidence.
Ceux qui ont fait machine arrière
Aux côtés de ces six pays de l'UE qui n'ont jamais abandonné l'appel sous les drapeaux, quatre ont décidé de le réinstaurer ces dernières années pour répondre à une instabilité géopolitique croissante. Premier à dégainer : la Lituanie en 2014, après l'annexion de la Crimée par la Russie. Ce service est désormais de neuf mois pour les hommes de 19 à 26 ans.
En 2024, les deux autres pays baltes, Lettonie et Estonie, en première ligne face à Moscou, ont réintroduit une conscription obligatoire sur des modalités similaires à celles de leur voisin lituanien.
Un service militaire d'une durée s'étalant de neuf à 15 mois a également été réintroduit en Suède en 2017 pour faire face aux difficultés de recrutement. Cependant, il ne concerne qu'une petite minorité, sélectionnée en fonction de ses compétences et de sa motivation. C'est ce modèle très sélectif qui a inspiré l'Allemagne.
Enfin, la Croatie est le dernier des 27 à avoir relancé la conscription. Aboli en 2008, un an avant de rejoindre l'Otan, le service militaire sera de nouveau obligatoire à partir de 2026. Quelque 18 000 jeunes gens seront appelés chaque année pour suivre dès l'âge de 18 ans une formation de deux mois.
Ailleurs en Europe
À l'image de ses voisins européens, le Royaume-Uni s'est également interrogé sur la question en 2024 après des propos du chef de l'état major plaidant pour "des mesures préparatoires pour placer nos sociétés sur le pied de guerre". Abandonnée en 1960, la conscription n'est pas envisagée à l'heure actuelle par le gouvernement de Keir Starmer, qui s'est toutefois engagé à porter les dépenses de défense du pays à 3 % du PIB au-delà de 2029, contre 2,3 % actuellement.
En Suisse, tous les hommes doivent servir entre 18 et 24 ans. Les conscrits reçoivent 18 semaines de formation obligatoire ou peuvent choisir d'effectuer un service civil pour une durée totale de six mois avec des engagements annuels d'au moins 26 jours. Si ce quota n'est pas atteint, les citoyens suisses doivent s'acquitter d'une taxe d'exemption.
De son côté, la Norvège a conservé un service militaire semi-obligatoire basé sur le volontariat. Seuls 15 à 20 % des candidats éligibles sont sélectionnés chaque année. La Norvège a décidé en 2013 de rendre ce service militaire de 12 mois également obligatoire pour les femmes au nom de l'égalité des sexes.
