Catherine Ashton, la haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères, est arrivée à Gaza où elle doit rester quelques heures. Au même moment, une roquette palestinienne tirée de la bande de Gaza tuait une personne en Israël.
REUTERS - Saisissant l'occasion rare de la visite d'un responsable européen dans la bande de Gaza, des éléments djihadistes ont défié jeudi l'autorité du Hamas sur le territoire dévasté par la guerre de l'hiver 2008-09, en tirant une roquette sur l'Etat juif.
Revendiquée par le groupe Ansar al Sounna, l'attaque, une heure à peine après l'arrivée à Gaza de Catherine Ashton, la haute représentante de la diplomatie de l'Union européenne, a tué un ouvrier thaïlandais dans le kibboutz israélien de Netiv Ha'asara.
Inconnu jusque-là, le groupe Ansar al Sounna (Fidèles de l'orthodoxie musulmane), une appellation qui s'inspire d'un mouvement de guérilla irakien proche d'Al Qaïda, affirme remplir une "mission djihadiste" de riposte aux "agressions sionistes" contre les mosquées d'Ibrahim à Hébron et d'Al Aksa à Jérusalem.
itLes initiatives prises ce mois-ci par Israël d'annexer au patrimoine juif le caveau des Patriarches à Hébron, où se trouve la mosquée d'Ibrahim (Abraham), et de rouvrir une ancienne synagogue détruite en 1948, sur l'esplanade des Mosqués de Jérusalem, a semé l'effervescence parmi les Palestiniens.
Mais elles n'ont pas remis en question la trêve de facto observée par le Hamas avec Israël depuis l'intervention de Tsahal à Gaza. L'initiative des djihadistes de la rompre, causant le premier mort en Israël depuis le retrait de Tsahal, vise apparemment à embarrasser le mouvement islamiste.
"Israël responsable de l’escalade"
Estimant que "la ligne rouge est franchie", le vice-Premier ministre israélien, Silvan Shalom, a affirmé que l'Etat juif ne saurait l'accepter et que sa riposte serait "appropriée" et "forte".
Le Hamas, qui s'efforce de dissuader les groupes de Gaza s'identifiant à la cause d'Al Qaïda d'attaquer Israël, voit son autorité ainsi défiée, mais, selon les analystes, ces groupes ne posent pas une menace directe et immédiate à son emprise sur le territoire.
"Ils ne disposent pas de bases importantes, mais ils défient continuellement le gouvernement du Hamas et l'embarrassent par certaines de leurs attaques", souligne Are Hovdenak, auteur d'un rapport sur ce sujet pour l'Institut international de recherche sur la paix d'Oslo.
Le Hamas, qui fut le pionnier des attaques à la roquette contre Israël et continue à prêcher la lutte armée, n'a pas condamné le tir de jeudi, affirmant que "le gouvernement de l'ennemi sioniste" porte "la responsabilité de toute escalade" par des récentes provocations.
"Épine dans le pied"
Mais Gaza peine encore à se remettre de la guerre de l'hiver 2008-09, qui a fait 1.400 morts parmi ses habitants et ravagé le territoire, où Ashton est venue précisément se rendre compte par elle-même de l'avancement de la reconstruction grâce à l'aide internationale autorisée à franchir le blocus israélien.
Le Hamas, encore exsangue, pour le moment du moins, cherche visiblement à éviter tout nouveau conflit dur avec Israël, mais les agissements des éléments djihadistes, dont il ne partage pas les visées globales, sont pour lui comme une épine dans le pied.
Proche des Frères musulmans égyptiens, le Hamas n'a pas hésité à réprimer dans le sang ces éléments "dévoyés" qui ont prospéré à Gaza. Le surgissement d'Ansar al Sounna, présenté par un leader djihadiste comme un nouveau mouvement, illustre la difficulté de la tâche.
Selon les experts, les salafistes ne représenteraient que quelques entaines d'activistes, dont d'ex-membres du Hamas mécontents de l'absence de charia, de la coexistence avec la petite communauté chrétienne palestinienne, de l'aide acceptée de l'Iran chiite "hérétique" et de la trêve avec Israël.
Mais ces groupes, dont le Jound Ansar Allah (Guerriers de Dieu), le Djeïch al Islam (l'Armée de Dieu), le Djeïch al Oumma (Armée de la nation) et le Djaldjalat (Cri de guerre), avec lequel le Hamas a eu maille à partir récemment compteraient des milliers de sympathisants parmi le million et demi d'habitants de Gaza.