
C’est un système institué en Chine il y a plus de 50 ans, durant l’ère maoïste : le Hukou. Un passeport intérieur qui attache une personne à son lieu de naissance. De facto, il limite les mouvements sur le territoire. Et ceux qui décident de migrer, sont condamnés à être discriminés selon leur Hukou. Une réforme du système est discutée par les autorités.
Dix années à Pékin, et toujours pas de vie stable pour Fan et sa famille. Née à la campagne, elle possède un hukou rural, cet état civil qui lui donne moins de droits que les citadins nés dans la capitale. Ses trois filles doivent notamment changer d’école dès que leurs parents déménagent ou changent d’employeur. Cela fait quatre fois en quelques années. Et ce n’est pas fini… « Il va encore falloir qu’on les change d’école cette année, se lamente-t-elle. Comme ils vont détruire notre quartier, il va falloir qu’on déménage et qu’on cherche une autre école pour les filles… Vous savez, c’est terrible pour elles, parce qu’à chaque fois qu’elles changent d’école, il faut qu’elles s’adaptent à un nouvel environnement. »
La condition errante des travailleurs migrants et de leurs enfants, c’est justement la préoccupation de Liu Wenhua. En 2008, il a créé une ONG pour sensibiliser le gouvernement. A ses yeux, la solution est d’abolir le hukou : « En Chine, tout citoyen devrait pouvoir jouir des mêmes droits et profiter également des services publics, et ce quel que soit l’endroit où il est né. C’est la moindre des choses vue l’immense contribution des travailleurs migrants à la transformation de la Chine ces trente dernières années. »
Le gouvernement vient d’annoncer une abolition graduelle du Hukou, en commençant par les villes petites et moyennes. Cela donnera du pouvoir d’achat aux paysans. Une bonne chose pour la consommation et donc pour la croissance. Mais Pékin attend encore pour abolir totalement le Hukou. De peur d’un exode rural incontrôlable. Et parce que le Hukou différencie non seulement les paysans et les citadins, mais aussi les habitants des différentes provinces.
Emission préparée par Kate Williams, Marie Billon et Patrick Lovett