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Les putchistes renversent le président Tandja

Les militaires ont annoncé la suspension de la Constitution et la dissolution des institutions qui en découlent après un coup d'Etat qui a fait plusieurs morts.Ils détiendraient également le président déchu Mamadou Tandja.

AFP - Un Conseil militaire a annoncé à la radio d'Etat nigérienne la suspension de la Constitution après un coup d'Etat jeudi qui a fait plusieurs morts et blessés, tandis que le président Mamadou Tandja a été "emmené" vers un lieu inconnu, selon des ministres.

"Le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSDR), dont je suis le porte-parole, a décidé de suspendre la Constitution de la sixième république et de dissoudre toutes les institutions qui en sont issues", a annoncé le colonel Goukoye Abdoulkarim sur les ondes de la Voix du Sahel.

A ses côtés figurait notamment le colonel Dijibrilla Hima Hamidou, dit "Pelé", commandant de la plus importante zone de défense du Niger (zone numéro un), a constaté l'AFP sur des images de la télévision d'Etat.

Le Conseil s'est doté d'un président, selon un communiqué. Il s'agit du chef d'escadron Salou Djibo. Il commande la compagnie d'appui de Niamey, qui dispose d'armements lourds, tels les blindés.

Le CSDR a mis en place un couvre-feu et fermé les frontières terrestres et aériennes, et appelé la population a garder son calme.

Dans la journée, des ministres ont affirmé avoir été séquestrés lors d'une réunion du cabinet.

"(...) Nous ne sommes pas libres de nos mouvements, nous ne pouvons pas sortir. Ils ont emmené Mamadou Tandja", a indiqué l'un d'entre eux joint sur son téléphone portable.

"Nous ne savons pas ce qui se passe (...) mais nous avons nos portables et nous sommes là où devait se dérouler le Conseil des ministres. Ils ont emmené le président", a confirmé un autre membre du gouvernement, sous couvert d'anonymat.

Le président Tandja, 71 ans, et son aide de camp "seraient retenus" dans la garnison de Tondibia", à une vingtaine de kilomètres de la capitale, ont indiqué auparavant à l'AFP des responsables sous couvert d'anonymat.

Plusieurs ministres, selon ces sources, seraient quant à eux retenus dans les locaux du Conseil supérieur de la communication, près du palais présidentiel.

Le CSDR a annoncé dans la nuit de jeudi à vendredi que le gouvernement était "dissous".

Le Niger, pays pauvre du Sahel mais troisième producteur mondial d'uranium, est confronté à une grave crise politique née de la volonté du président de se maintenir au pouvoir coûte que coûte au delà de son mandat.

Des témoins ont fait état de tirs nourris dans la journée, notamment autour de la présidence, avec des combats à l'arme lourde dans les rues de la capitale et autour de la présidence.

Aucun bilan officiel sur d'éventuelles victimes n'avait été communiqué jeudi soir mais selon des témoins et une source médicale, au moins trois ou quatre soldats ont été tués - dans un blindé visé par un obus - et "une dizaine" de militaires ont été blessés jeudi à Niamey.

Un responsable français à Paris avait auparavant affirmé qu'une tentative de coup d'Etat était en cours au Niger et que "Tandja n'était pas dans une bonne position".

Paris a demandé jeudi aux Français de Niamey de rester chez eux.

Selon la source diplomatique française, "on savait qu'une partie de l'armée désapprouvait Tandja et son coup de force constitutionnel, on pensait jusque là cette partie très minoritaire".

"Il y a tradition de coup d'Etat dans ce pays, mais on ne pensait pas que ça viendrait aussi vite", a-t-elle ajouté.

Après dix ans de pouvoir, M. Tandja avait dissous l'année dernière le Parlement et la Cour constitutionnelle et obtenu une prolongation controversée de son mandat pour au moins trois ans à l'issue d'un référendum sur une nouvelle Constitution en août.

L'opposition, qui avait boycotté cette consultation ainsi que des législatives controversées en octobre, avait dénoncé un coup d'Etat et la communauté internationale a dénoncé les agissements du président.

C'est cette nouvelle constitution que conteste le CSDR jeudi.

Le porte-parole du département d'Etat américain Philip Crowley a estimé que l'action du président avait "très bien" pu déclencher le coup d'Etat et affirmé que le Niger devait "organiser des élections".

Dans l'après-midi jeudi, des soldats étaient déployés autour du palais présidentiel et dans les rues adjacentes, a constaté l'AFP.