Le ministre de la Culture a demandé aux Beaux-Arts de raccrocher sur sa façade l'installation de Ko Siu Lan. Jugée provocante, l'œuvre, qui détourne le slogan "travailler plus pour gagner plus" de Nicolas Sarkozy, avait été enlevée mercredi.
Lire toute l'histoire : l'interview avec l'artiste, le communiqué de l'école des Beaux-arts
AFP - L'oeuvre de l'artiste chinoise Ko Siu Lan détournant un slogan du candidat Nicolas Sarkozy a été raccrochée samedi sur la façade de l'Ecole des beaux-arts de Paris, sur ordre du ministre de la Culture Frédéric Mitterrand.
Les grandes bannières "travailler" "moins" et "gagner" "plus" de la jeune artiste avaient été retirées mercredi par la direction de l'établissement qui considérait qu'elles pouvaient nuire à la "neutralité" de l'école.
Dans un communiqué, le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand a annoncé qu'"après avoir pris connaissance de l'incident", il avait demandé que l'oeuvre soit réinstallée sur la façade de l'école "dans les délais les plus brefs compte tenu des contraintes matérielles nécessitées par cette opération".
L'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris est sous la tutelle du ministère de la Culture.
L'artiste Ko Siu Lan, 32 ans, qui avait alerté jeudi les médias sur cette affaire et menaçait de déposer un recours en justice contre cette "censure", a déclaré à l'AFP qu'elle était "très contente".
"Frédéric Mitterrand m'a appelé en personne samedi après-midi pour me dire qu'il avait appris l'affaire hier et qu'il était vraiment +désolé+ de cette +histoire idiote+", a déclaré la jeune femme. "Il espère que les bannières pourront être remises dès aujourd'hui", a-t-elle ajouté.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Une équipe d'installateurs a réinstallé sans tarder samedi en fin d'après-midi les banderoles litigieuses sur la façade donnant sur le quai Malaquais.
Le travail de l'artiste se compose de deux grandes bannières noires sur lesquelles sont inscrits en blanc les mots "gagner", "moins", "plus" et "travailler". Selon l'endroit où il se trouve, le passant peut lire "gagner plus" ou "travailler moins".
Un détournement impertinent mais pas franchement féroce du slogan "travailler plus pour gagner plus" du candidat Nicolas Sarkozy à l'élection présidentielle de 2007.
Installées mercredi matin sur la façade par Ko Siu Lan, à l'occasion d'une exposition des étudiants du programme de recherche international La Seine, elles avaient été retirées quelques heures plus tard par la direction de l'établissement.
L'Ecole des beaux-arts, dirigée par Henry-Claude Cousseau, avait justifié son geste jeudi en estimant que cette oeuvre, qui se réfère "explicitement à un contexte politique", était susceptible de "constituer une atteinte à la neutralité du service public". Elle estimait être "instrumentalisée" par l'artiste.
De son côté, Ko Siu Lan avait indiqué vendredi, via son avocate, qu'elle envisageait de déposer un recours devant le tribunal administratif "pour rupture abusive de contrat entre l'établissement et l'artiste". "Il y a violation du principe fondamental de la liberté d'expression de l'artiste", avait déclaré l'avocate Me Agnès Tricoire.
Le Parti socialiste avait dénoncé vendredi "une censure" politique et demandé que l'oeuvre soit réinstallée.
Bertrand Delanoë, maire PS de Paris, avait proposé que l'oeuvre de l'artiste soit exposée au "104", un des lieux culturels de la Ville de Paris.