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L'opinion mexicaine doute de plus en plus de la culpabilité de Florence Cassez

Condamnée à 60 ans de prison au Mexique, Florence Cassez clame son innocence dans un livre qui sort en France cette semaine. L'opinion publique mexicaine, longtemps convaincue de sa culpabilité, semble de plus en plus acquise à sa cause.

Voilà maintenant plus de quatre ans que la Française Florence Cassez est détenue au Mexique pour des enlèvements auxquels elle nie avoir participé. Alors que sort en France le livre "A l'ombre de ma vie", dans lequel elle raconte son calvaire, l’opinion mexicaine semble douter chaque jour un peu plus de la culpabilité de la jeune femme. Et voir d'un meilleur œil les démarches politiques entreprises en mars 2009 par le président français, Nicolas Sarkozy, pour la faire libérer
"J’étais la première à m’opposer à l’extradition de Florence Cassez, mais depuis que j’ai lu un article de la revue 'Proceso' qui dresse la liste des irrégularités de l’enquête, j’ai de gros doutes. Et si elle était innocente ? […] Qu’est-ce qui est pire ? L’impunité ou l’incarcération d’une innocente ?" s’interroge l’internaute Erika dans un long échange de réactions entre pro et anti-Cassez sur le blog politique Zurda Siniestra. Une réaction qui illustre bien le malaise grandissant qui entoure le cas de la jeune détenue depuis les six derniers mois au Mexique.   

Manipulations de témoins
Lors de son arrestation, en décembre 2005, la culpabilité de Florence Cassez ne faisait pas de doute pour la majorité des Mexicains. L’émotion suscitée par la lettre ouverte de Cristina Rios Valladares, victime d’enlèvement, accablant Cassez, avait renforcé le sentiment de colère de la population, qui vit dans la peur constante des kidnappings par des gangs tout-puissants. 
Mais face à la détermination de la détenue, qui n’a jamais cessé de clamer son innocence, de plus en plus de Mexicains, journalistes, blogueurs ou simples internautes, expriment des doutes sur la version des autorités. En mars 2009, la journaliste Anabel Hernandez publie une longue enquête sur la revue en ligne "Reporte Indigo" pointant les nombreuses irrégularités du dossier : témoignages contradictoires, arrestation mise en scène…  Même son de cloche chez le correspondant au Mexique de "Libération", qui détaille dans un article paru en juin 2009 les manipulations et intimidations dont sont victimes tous ceux qui veulent déroger la version "officielle" des faits. 
Un étonnant site pro-Cassez anonyme, rédigé en espagnol, rassemble des dizaines de textes, procès-verbaux et articles visant à démontrer l’innocence de la Française. L'auteur y publie ce qui semble être les versions scannées des premières déclarations déposées à la police par deux témoins-clés, Cristina Rios Valladares et son fils, Christian. Dans leurs premières dépositions, aucun des deux n’a affirmé reconnaître le visage ni la voix de la Florence Cassez, contrairement à ce que Valladares certifie dans sa lettre ouverte. 
"A chaque fois que j’ai trop parlé il y a eu une contre-attaque"
La Française de 35 ans, condamnée en 2008 en appel à 60 ans de prison, a affirmé, dans un entretien publié mercredi par "La Voix du Nord", craindre des représailles des autorités mexicaines mises en causes dans son ouvrage. "A chaque fois que j’ai essayé de me défendre, que j’ai un peu trop parlé, il y a toujours eu une contre-attaque", déclare-t-elle.
Ses défenseurs se souviennent encore du surprenant "nouveau" témoignage d’un ancien kidnappeur, trois ans après les faits, qui accuse Florence Cassez d’avoir dirigé des opérations d’enlèvement. Sur FRANCE 24, son père s’était étonné de cette nouvelle version des faits, qui intervenait juste au moment où une commission franco-mexicaine devait se décider sur l’éventuel transfèrement de la jeune femme en France. 
Dans son livre, Florence Cassez fustige l'attitude de l'ancien chef de l'Agence fédéraIe d'investigation (AFI), Genaro Garcia Luna, devenu depuis ministre de la Sécurité publique. En 2005, ce dernier aurait mis en scène son arrestation pour les caméras de télévison mexicaine. "Un montage médiatique, politique, juridique, qu'il y a derrière lui", écrit Cassez.
Accusé de laxisme dans la lutte contre le narcotrafic, Garcia Luna a dû rendre des comptes devant le Congrès mexicain, en janvier dernier. Le cas épineux de Florence Cassez a de nouveau été soulevé par les députés. Comme titrait si bien la revue mexicaine "Proceso" en décembre : "L'affaire Cassez est close, mais…"