logo

Soudan : au moins 75 morts dans une attaque de drone menée par les paramilitaires
Une attaque de drone menée vendredi par les paramilitaires a tué au moins 75 personnes dans un camp de déplacés près d'El-Fasher, au Darfour. Assiégée depuis plus de 500 jours, cette ville sous contrôle de l'armée régulière abrite environ 260 000 civils, dont la moitié sont des enfants.
Cette image satellite prise le 6 mai 2025 montre des drones "suicides" à longue portée près de l'aéroport de Nyala au Soudan. © Maxar Technologies via Reuters

Au moins 75 personnes ont été tuées vendredi 19 septembre dans une attaque de drone des forces paramilitaires sur une mosquée dans un camp de déplacés près d'El-Fasher au Darfour, dans l'ouest du Soudan, où celles-ci poursuivent leur offensive pour chasser l'armée régulière, selon des secouristes locaux.

Chef-lieu du Darfour-Nord, El-Fasher est la dernière grande ville de la vaste région du Darfour encore sous contrôle de l'armée soudanaise, plus de deux ans après le début de la guerre entre les forces régulières et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Si la ville devait tomber, les FSR contrôleraient totalement le Darfour, où l'ONU et les ONG ont déjà dénoncé des exactions de masse, notamment visant certains groupes ethniques.

L'attaque meurtrière des FSR a visé vendredi le camp de déplacés d'Abou Chouk, surpeuplé et en proie à la famine, selon la Cellule d'urgence du camp. Un "drone explosif" a pris pour cible une mosquée où étaient rassemblés des déplacés. "Les corps ont été retirés des décombres", a expliqué ce groupe de secouristes locaux.

Les FSR n'ont pas commenté dans l'immédiat.

Le camp se situe à quelques kilomètres à peine de la ville d'El-Fasher, assiégée par les FSR depuis 18 mois.

Près de sites stratégiques

Pour l'heure, l'offensive des FSR se poursuit et les paramilitaires se rapprochent de sites stratégiques, selon des images satellite de l'Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université Yale, aux États-Unis.

Parmi eux, le camp d'Abou Chouk et l'ancienne base de la mission de paix conjointe de l'ONU et de l'Union africaine (Minuad), devenue le quartier général aux Forces conjointes, une coalition d'anciens groupes rebelles alliée à l'armée soudanaise.

Un responsable des FSR, s'exprimant sous couvert d'anonymat, car il n'est pas autorisé à parler aux médias, a affirmé à l'AFP que les paramilitaires avaient "pris le contrôle total" de l'ancien complexe de la Minuad jeudi après-midi.

L'université de Yale a jugé cette prise de contrôle "probable" au vu des images satellite datant de lundi à jeudi et montrant les dégâts sur place.

Selon les images analysées par l'université, des bâtiments à proximité du camp d'Abou Chouk ont été entièrement détruits entre lundi et mercredi.

Les RSF contrôlent à présent une bonne partie du camp de déplacés d'Abou Chouk, situé à trois kilomètres au nord de l'ancien complexe de la Minuad, selon des témoins. 

Ainsi l'aéroport d'El-Fasher, devenu une base de l'armée régulière, ainsi que le QG de la 6e division de l'armée se retrouvent à portée des tirs des paramilitaires.

Des exactions de masse redoutées

Les organisations humanitaires craignent des exactions de masse en cas de prise de la ville par les paramilitaires, en particulier contre les communautés non arabes, comme l'ethnie des Zaghawa, pilier des Forces conjointes alliées à l'armée.

"Les quartiers d'El-Fasher seront maculés du sang de ces massacres bien avant que la communauté internationale" ne réagisse, a déclaré Shayna Lewis, membre de l'ONG Avaaz.

Selon les derniers témoignages d'habitants qu'elle a recueillis, la situation est "catastrophique", a-t-elle ajouté. Et depuis mercredi soir, l'organisation n'a pu joindre personne dans le Darfour-Nord, sous le coup d'une coupure générale des communications.

Assiégée depuis plus de 500 jours par les paramilitaires, El-Fasher abrite environ 260 000 civils, dont la moitié sont des enfants, selon l'ONU. L'aide humanitaire y est presque inexistante.

La guerre au Soudan, déclenchée en avril 2023, a tué des dizaines de milliers de personnes et en a déplacé des millions d'autres.

Les troupes du commandant de l'armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant du pays depuis le coup d'État de 2021, et les FSR de son ancien allié, le général Mohamed Daglo, sont régulièrement accusées de commettre des massacres.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a provoqué ce que l'ONU qualifie de "plus grande crise humanitaire actuelle".

Rien qu'au nord du Darfour, plus d'un million de personnes sont au bord de la famine, selon l'ONU.

Avec AFP