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RD Congo : attention, cette vidéo de massacre n’implique ni l’armée ni le M23, et est ancienne
Une vidéo montrant des hommes en train de tuer neuf personnes, devant le bureau de la chefferie des Walese-Vonkutu, dans la province de l’Ituri, au nord-est de la République démocratique du Congo, circule depuis le 21 février sur les réseaux sociaux. Certains affirment que les tueurs sont de “l’armée congolaise”, du “M23”, ou encore des “Rwandais”. Mais ce massacre remonte à juin 2021 et a été commis par les Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe armé d’origine ougandaise ayant prêté allégeance à l’organisation État islamique.
Par : Chloé Lauvergnier Suivre

Alors que le groupe rebelle M23 continue son avancée dans l’est de la République démocratique du Congo, avec le soutien des forces de défense rwandaises, une vidéo de massacre est devenue virale sur les réseaux sociaux à partir du 21 février. 

La vidéo dure plus de cinq minutes et est coupée à plusieurs reprises. Notre rédaction a choisi de n’en montrer que des captures d’écran floutées en raison de son caractère choquant. Au début, on voit un bâtiment où il est écrit “Bureau administratif et communautaire - Chefferie des Walese-Vonkutu”. Un coup de feu résonne. Puis un drapeau est filmé, qui semble être celui de la République démocratique du Congo.

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On aperçoit ensuite neuf personnes au sol : six sont allongées - dont plusieurs semblent vivantes - et trois autres sont assises et semblent avoir les mains attachées. 

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Un homme portant des bottes jaunes comment alors à frapper l’une de ces personnes avec une arme ressemblant à un lance-roquettes. Il la frappe à plusieurs reprises, au niveau de son crâne. C’est un geste qu’il répète environ 20 fois, en frappant tour à tour les différentes personnes, durant une minute environ. À la fin, les neuf personnes au sol semblent toutes mortes. 

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Puis on voit un homme avec des bottes bleues, à côté des cadavres, porter un drapeau noir avec l’inscription en arabe “Il n’y a pas d’autres dieux qu’Allah - Mahomet est le messager d’Allah”. Ce type de drapeau est utilisé par des groupes islamistes dont l'organisation État islamique. On le revoit ensuite, avec le drapeau, devant le bureau de la chefferie. À ses côtés, un autre homme porte le drapeau de la République démocratique du Congo, qu’il brûle avec un briquet. Enfin, des hommes pénètrent à l’intérieur du bâtiment et renversent des objets.

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Une vidéo devenue virale sur X et WhatsApp en particulier 

Ces images sont devenues virales sur X et WhatsApp en particulier, qu’il s’agisse de la vidéo en entier, d’extraits ou de captures d’écran. Parmi les publications comptant le plus grand nombre de vues sur X, il y a celle d’Andrew M. Mwenda, un journaliste ougandais, fondateur du magazine “The Independant”, qui assure que “c’est ce que l’armée congolaise fait aux gens dans l’est de la RDC”. Sa publication avait été vue 628 000 fois au moment de la publication de cet article. 

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Le 23 février, Israël Mutombo, qui se présente comme un journaliste d’investigation congolais, semble sous-entendre sur X que c’est le M23 qui serait visible dans la vidéo. Il s’adresse à Donatien Nshole, secrétaire général et porte-parole de la Conférence épiscopale nationale du Congo : “Tu nous demandes de négocier avec le M23-AFC, mais il n'y a aucune condamnation de votre part.” Son post a été vu plus de 56 000 fois. Donatien Nshole a estimé que les autorités congolaises devraient inviter le M23 à la table des négociations.

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Plusieurs personnes - congolaises pour la plupart - ont également transmis cette vidéo à notre rédaction, via Facebook ou WhatsApp, en affirmant que les auteurs du massacre sont “les rebelles terroristes du M23” ou encore “les Rwandais”. Certains mentionnent également les Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe armé d’origine ougandaise ayant prêté allégeance à l’organisation État islamique. 

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De fait, les hommes armés visibles sur ces images semblent bien appartenir au groupe ADF. En revanche, ces images n’ont rien de récent, puisqu’elles remontent à juin 2021, comme souligné par plusieurs internautes sur X. 

Un massacre commis par les ADF en juin 2021

Pour vérifier cette vidéo, notre rédaction a notamment contacté Christophe Munyanderu, coordinateur de la Convention pour le respect des droits humains, pour l’antenne d’Irumu, qui nous a affirmé que la vidéo datait du 29 juin 2021 et qu’elle avait été prise à Ofai (ou Ofaye), dans le territoire d’Irumu, dans la province de l’Ituri. ll nous a indiqué avoir été sur place ce jour-là, et avoir “survécu à cette attaque ADF avant l’incendie du bureau de la chefferie Walese-Vonkutu”. 

Il est possible de confirmer le lieu grâce à Google Earth Pro, où l’on peut retrouver plusieurs éléments visibles dans la vidéo. 

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D’autres éléments permettent également de confirmer les dires de Christophe Munyanderu. Plusieurs publications en 2021 mentionnent ainsi l’incendie du bureau de la chefferie par les ADF, photo à l’appui, comme le post X de Goma24 (voir ci-dessous), qui date du 1er juillet, cet article du 2 juillet, qui assure que l’incendie date du 30 juin, ou encore ce post X, qui date du 30 juin. 

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De plus, dans le post de Goma24, l’image de droite montre un intérieur identique à celui que l’on voit dans la vidéo devenue virale ces derniers jours.

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De son côté, un rapport de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés sur la situation en Ituri en juin 2021 fait état d’une attaque des ADF le 29 juin 2021 dans la localité d’Ofaye, lors de laquelle ils ont “incendié 5 maisons parmi lesquelles le bâtiment abritant la chefferie de Walese vonkutu”. 

Enfin, deux éléments permettent de penser que les hommes de la vidéo sont effectivement des ADF. Le drapeau noir exhibé est bien celui utilisé par ce groupe armé (voir image ici). De plus, dans le bandeau avec les inscriptions en arabe visible sur les images diffusées par Goma24, on retrouve le logo du groupe État islamique en Afrique centrale. Un rapport de l’Université George Washington sur l’État islamique en RD Congo, publié en mars 2021, montre d’ailleurs également des images publiées par l’État islamique avec le même type de bandeau.