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Avec le retrait de Joe Biden, les républicains ont perdu leur adversaire préféré
Après le retrait espéré chez nombre de démocrates de la candidature de Joe Biden, le camp républicain multiplie les attaques à l'encontre de celle qui pourrait reprendre le flambeau de la candidature, Kamala Harris. À commencer par Donald Trump qui a perdu son meilleur ennemi et sa cible préférée. Mais l'option Harris suscite tout de même une certaine inquiétude dans les rangs républicains.

Joe Biden a fini par céder. Le président candidat qui faisait jusqu’ici de la résistance s'est attiré les foudres de son propre camp à force de bourdes et de lapsus en public délétères pour son image. Le bilan catastrophique du débat face à son rival Donald Trump le 27 juin sur CNN et l’attentat contre celui-ci en Pennsylvanie, le 13 juillet, laissaient entrevoir une campagne difficile qui n’en finirait pas de s’éterniser.

La convention du Parti démocrate aura lieu fin août et devrait, selon toute vraisemblance, désigner la vice-présidente comme candidate. En attendant ce moment, du côté des républicains, dans le camp Trump, on s’adapte avec délice, on compte les points et la campagne de dénigrement a d’ores-et-déjà commencé.

Dans une campagne présidentielle qui prend un nouveau cap, où Trump perd son meilleur ennemi, état des lieux des forces et des faiblesses dans le camp de l’ex-président.

Les républicains ont perdu leur adversaire préféré

Jusqu’à présent, Donald Trump, 78 ans, avait beau jeu de parler âge : il était le benjamin du duel à venir face à Joe Biden, 81 ans. Désormais, cet argument n’en est plus un. Si c’est la candidate Harris était désignée, ce ne serait plus trois ans qui sépareraient les candidats, mais 21 puisque Kamala Harris aura 60 ans en octobre.

Jusqu’ici, Donald Trump pouvait surfer sur trois types de vagues pour l’emporter, du moins dans l’opinion. D’abord, le débat aux effets désastreux pour Joe Biden qui multiplia les errements, les troubles et les lapsus. Ensuite, les bourdes de Joe Biden, désignant, avant de se reprendre, Volodymyr Zelensky du nom de l’ennemi russe Vladimir Poutine ; ou encore, cherchant à évoquer son ministre de la Défense, Lloyd Austin, disant d'un air hésitant : "[mon ministre], l’homme noir"… Et, enfin, l’effet empathie lié à l’attentat duquel il a réchappé en Pennsylvanie le 13 juillet. Résultat : il était devenu leader dans bon nombre de swing states (ces États au vote indécis et qui peuvent donc basculer) .

Donald Trump voulait une revanche sur Joe Biden qu'il accuse d’avoir gagné sur la base de fake news, de mensonges et grâce aux médias. Le retrait de Joe Biden représente donc un tournant dans la campagne. Trump va avoir un ou une nouvel(le) adversaire, et perd surtout son meilleur ennemi.

Si Biden représentait un candidat "facile" selon Trump, en raison de son âge et des ses "faiblesses", la donne et la dynamique a changé. Il devra, même s’il affirme la nullité de celle-ci, affronter une femme dynamique et ayant eu des responsabilités, notamment de procureur. Une course Harris-Trump opposerait ainsi une ancienne procureure à un criminel récemment condamné. Le discours devrait s’inverser.

Selon le Washington Post, la vice-présidente s’est appuyée sur son passé de procureur pour attaquer Trump lors des primaires de 2020, et demande si elle fera la même chose en 2024.

Que disent les sondages ?

D’après une moyenne de sondages réalisés avant le tournant de dimanche, Kamala Harris était derrière Donald Trump, de deux points au niveau national, avec 46 % contre 48 %. Dans les États charnières (swing States), selon des sondages réalisés avant que Joe Biden n’annonce son retrait de la course à la présidentielle et établis avant la tentative d’assassinat de Donald Trump, Kamala Harris ne comptait qu'un point de retard dans l'État crucial de Pennsylvanie, dans un scénario hypothétique de confrontation avec Trump. Et elle gagnait contre lui avec un avantage confortable de cinq points en Virginie.

Dans les deux États, Kamala Harris a obtenu des résultats légèrement supérieurs à ceux de Joe Biden auprès des électeurs noirs, des électeurs plus jeunes et des femmes – autant de groupes dont les démocrates ont besoin pour remporter l'élection cet automne. Et surtout, ce sont des groupes auprès desquels Joe Biden semblait perdre du terrain.

Les sarcasmes de Trump 

En apprenant la défection de son adversaire démocrate, Donald Trump s’est rendu sur son propre réseau social, Truth Social, pour critiquer l’héritage de Joe Biden. "Le tordu Joe Biden n’était pas apte à se présenter à la présidence, et n’est certainement pas apte à servir – et ne l'a jamais été ! Il n'a atteint le poste de président que grâce à des mensonges, à de fausses nouvelles et en ne quittant pas son sous-sol", écrivait-il.

Dans le camp républicain, les clips anti-Kamala du parti étaient déjà prêts. Ceux-ci mettent en scène le rire de la vice-présidente – s'esclaffant dans une interview –  (six fois dans un clip de deux minutes). Ils l’affublent aussi d’une liste de titres ponctuée de ses rires : records d’immigration illégal ; traitement spécial pour les migrants ; dangereusement libéral sur l’immigration illégale. Pour conclure d’un "Le camp Trump se dit confiant".

Samedi soir, lors d’un rassemblement de campagne à Grand Rapids (Michigan), le candidat Trump a attaqué à la fois Joe Biden et Kamala Harris, qualifiant à plusieurs reprises Biden de "stupide" et d’escroc ; et Kamala Harris de "folle", lançant à la foule : "Je l’appelle Kamala la rieuse (‘I call her laughing Kamala’). Un rire, ça en dit long. Elle est folle. Elle est zinzin (‘nuts’)." Les républicains impliqués dans la campagne de Trump se disent confiants dans leurs chances contre elle. Le conseiller principal de Donald Trump, Chris LaCivita, déclarait ainsi jeudi à Politico que le camp Trump "aimerait" beaucoup  que Kamala Harris devienne la candidate.

Une vice-présidente qui se voit reprocher de nombreux échecs 

Lors de la convention républicaine de la semaine dernière, le 14 juillet, de nombreux orateurs ont qualifié Kamala Harris de "Border czar" ("tsar des frontières"), depuis que Joe Biden lui a confié le dossier de la coordination avec l'Amérique centrale afin de dissuader l'immigration à la frontière sud. Ce surnom pourrait contribuer à la lier aux luttes globales de Biden pour endiguer la migration à la frontière.

Tous les républicains n’étaient pas aussi optimistes quant à la suite. Toujours selon le site Politico, le gouverneur du New Hampshire, Chris Sununu, a déclaré cette semaine : "Si et quand ils feront le changement, tout va changer. Cela va devenir très serré dans beaucoup de ces États plus stricts. Il va y avoir plus d’énergie."

Le site du Time fait un récapitulatif des réactions outre-Atlantique dans les deux principaux camps politiques et à l’international. En dehors des éloges diplomatiques ainsi que de ceux des démocrates à Biden, de Barack Obama à Nancy Pelosi en passant par le couple Clinton et Bernie Sanders, le camp républicain, lui, est quasi unanime sur les critiques à l’égard de Joe Biden et son incompétence à gouverner. En dehors du sénateur républicain Mitt Romney qui dit respecter la décision de Joe Biden.

J.D. Vance, sénateur de l’Ohio et nouveau colistier de Donald Trump aux élections de novembre, a répondu à Joe Biden sur X, le qualifiant de "pire président de [sa] vie". J.D. Vance critique le soutien de Kamala Harris à la politique du président, terminant sa déclaration en lançant un défi à celui qui recevra la candidature démocrate : "Allez-y !"

"Au cours des quatre dernières années, [Kamala Harris] a cosigné les politiques d'ouverture des frontières et d'escroquerie verte de Joe Biden qui ont fait grimper le coût du logement et de l'épicerie", a écrit J.D. Vance. "Elle est responsable de tous ces échecs, et elle a menti pendant près de quatre ans sur les capacités mentales de Biden, un président qui n'est pas en mesure de faire le job."

Le président de la Chambre, Mike Johnson, un allié de Donald Trump, a critiqué le Parti démocrate sur X, ainsi que la vice-présidente Kamala Harris. "Le Parti démocrate a exclu le candidat démocrate du scrutin, un peu plus de 100 jours avant l’élection", a-t-il écrit. "Les perspectives du parti ne sont pas meilleures maintenant avec la vice-présidente Harris, qui est coresponsable des échecs politiques désastreux de l'administration Biden", a-t-il ajouté. Il poursuit en affirmant que Joe Biden devrait démissionner avant le jour du scrutin, affirmant que le 5 novembre n'arriverait "pas assez tôt".

Le gouverneur républicain du Texas, Greg Abbott, a réagi en attaquant la vice-présidente, la qualifiant de "tsar des frontières" de Joe Biden, l’immigration faisant partie de son portefeuille politique du fait de son statut. "Je pense que je devrai tripler le mur frontalier, les barbelés et la garde nationale à la frontière", a-t-il écrit sur X.

Les démocrates "ne respectent pas leurs électeurs"

Steve Scalise, chef de la majorité républicaine à la Chambre des représentants, a critiqué la décision de Joe Biden de se retirer de la course à la présidentielle, affirmant sur X que "les chefs du parti démocrate [venaient] de prouver qu'ils n'[avaient] absolument aucun respect pour leurs propres électeurs. Après avoir fait la leçon à d’autres sur la démocratie, ils ont simplement forcé Joe Biden à se retirer du ticket, détruisant ainsi le choix principal de 14 millions de leurs propres électeurs."

Pour cet élu, les démocrates ont passé leur temps à "calomnier" ceux qui remettaient en cause l’aptitude de Joe Biden à se présenter aux élections. Et il demande à ce que "chacune de ces personnes – en particulier la vice-présidente Harris – qui ont participé à cette dissimulation réponde de son implication".

"Ce n'est pas seulement [le ticket] Biden-Harris qui a obtenu des résultats si médiocres, c'est le programme extrême et raté de toute leur administration qui écrase les familles travaillant dur, en provoquant une inflation record, la pire crise frontalière de notre vie et le chaos dans le monde", a-t-il déclaré. 

Il y a quelques mois, en janvier 2024, Nikky Haley, un temps candidate à la primaire républicaine (et qui fut aussi ambassadrice des États-Unis auprès des Nations unies sous l’ère Trump), alors en campagne dans le New Hampshire, déclarait, ironie du sort, que le premier parti à retirer son "candidat de 80 ans" serait le parti vainqueur de la présidentielle.

Prémonitoire ou non, il n’en reste pas moins que ce message a de quoi interpeller dans le camp de Donald Trump qui, après s'être fait passé pour le junior de la course, se retrouverait presque sur la sellette à cause de son âge.

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