Bandage à l’oreille droite, poing levé : Donald Trump a fait renoué avec les bains de foule, lundi 15 juillet, lors de la première soirée de la convention républicaine à Milwaukee, dans le Wisconsin. C'est la première fois que l'ancien président apparaissait longuement en public depuis qu'il a échappé à une tentative d'assassinat samedi. En fond sonore, le chanteur Lee Greenwood interprétait "God Bless the USA", le titre devenu l'hymne de ses meetings.
Souriant mais grave, légèrement ému mais plein de retenue, le milliardaire candidat à la présidentielle 2024 a été ovationné par la foule du centre de convention avant d'aller d'asseoir aux côtés de J.D. Vance, son colistier fraîchement nommé quelques heures plus tôt, à la surprise générale.
Il faut dire Donald Trump était pressé : à peine la convention entamée, il a annoncé son choix en milieu de journée sur son réseau Truth Social : "J'ai décidé que la personne la plus apte à assumer la fonction de vice-président des États-Unis était le sénateur J.D. Vance, du grand État de l'Ohio". Ce dernier continuera selon lui à "se battre pour notre Constitution, se tenir au côté de nos soldats et faire tout son possible pour m'aider à rendre à l'Amérique sa grandeur".
"J.D !", "J.D !", "J.D. !", se sont aussitôt mis à clamer les délégués de la salle de convention de Milwaukee, la ville du Wisconsin qui accueille pendant quatre jours et sous haute sécurité ce grand raout républicain. L'heureux élu a fait une apparition tout sourire, la larme à l'œil, et a serré quelques mains avant de s'éclipser.
L'annonce aurait dû se faire mercredi, avant-dernier jour de la convention, comme le veut la tradition. Mais la tentative d'assassinat contre le milliardaire a tout chamboulé. Donald Trump est arrivé à Milwaukee dès dimanche avant de dîner avec des donateurs républicains. En milieu de journée, lundi, les délégués rassemblés au centre de convention l'ont officiellement désigné candidat à la présidentielle du 5 novembre. Il acceptera officiellement cette nomination jeudi soir, lors d'un discours qu'il a retravaillé pour lui donner une dimension plus rassembleuse.
Choix contradictoire
Depuis samedi soir en effet, Donald Trump adopte la posture du leader unificateur, et s'efforce dans ses communiqués de gommer l'agressivité et l'outrance qu'on lui connaissait. Avoir échappé à la mort l'aurait changé, affirment ses proches. Donald Trump fait du Joe Biden, en somme.
En cela, son choix de J.D. Vance, s'il était attendu ces dernières semaines, est assez contradictoire. Le sénateur de 39 ans est plutôt à classer du côté des politiciens féroces. Samedi, juste après la tentative d'assassinat et alors que tout le monde appelait à l'apaisement, il a choqué en accusant la "rhétorique" de Joe Biden d'avoir "directement mené à la tentative d’assassinat du président Trump". Donald Trump l'assagi cherche-t-il un "bad cop" (flic méchant) dévoué ? C'est son fils Donald Trump Jr. qui aurait milité pour ce choix lors de la dernière ligne droite.
Les liens de J.D. Vance avec les riches donateurs de la Silicon Valley, noués du temps où il travaillait en tant qu'investisseur en capital-risque, ont pu jouer dans sa sélection. Sa campagne pour le poste de sénateur de l'Ohio a d'ailleurs reposé à 76 % sur la même base de donateurs républicains que celle de Donald Trump, a calculé Politico.
Certains commentateurs ont cependant du mal à comprendre ses atouts. Son style énergique est similaire à celui de Donald Trump (en tout cas l'ancien Trump, dont le naturel risque fort de revenir au galop). Son idéologie, elle aussi, est alignée sur le trumpisme. Un profil pareil a peu de chances d'attirer les électeurs modérés.
Géographiquement, le sénateur de l'Ohio, un État déjà acquis aux républicains, n'apporte pas de délégués supplémentaires, bien qu'il permette de cimenter un électorat blanc similaire en Pennsylvanie et dans le Winconsin, deux États-clés. Par ailleurs, il passe devant Marco Rubio et Tim Scott, qui auraient permis à Donald Trump de rassurer une partie de l'électorat latino et noir.
La relève
"Vance est un zéro politique, mais son choix est le signe que Trump est acquis au Project 2025 et à l'agenda MAGA", estime sur X Dan Pfeiffer, ancien conseiller de Barack Obama et co-auteur du podast "Pod Save America". Peut-être J.D. Vance, le premier de la générations des millenials à être nommé colistier, est-il ainsi celui qui pourrait le mieux incarner la relève post-2028 aux yeux de Donald Trump.
La campagne de Joe Biden s'est précipitée pour critiquer ce choix : "Vance fera ce que Mike Pence a refusé le 6-Janvier : se plier en quatre pour Trump et son extrême agenda MAGA, même si cela signifie enfreindre la loi et peu importe le mal fait au peuple américain."
Et le président démocrate lui aussi a embrayé, accusant J.D. Vance, de "vouloir augmenter les impôts pour les ménages de la classe moyenne tout en favorisant des réductions d'impôt pour les riches". C'est "un clone de Trump", a-t-il résumé. Sa vice-présidente Kamala Harris a d'ores et déjà accepté une invitation de la chaîne CBS a débattre contre J.D. Vance.