Après six mois de travail, la mission du Parlement qui planchait sur la question du voile islamique intégral doit remettre son rapport ce mardi. Elle devrait en préconiser l'interdiction dans une grande partie de l'espace public.
AFP- La mission parlementaire sur le voile intégral, qui achève mardi ses travaux sans consensus, ni à droite ni à gauche, propose, dans la version quasi définitive de son rapport, une loi d'interdiction limitée dans un premier temps aux services publics, dont les transports.
Mais les conclusions de cette mission de six mois, rédigées par le rapporteur UMP Eric Raoult, ne satisfont pleinement personne et l'on se demande dans quelles conditions elles pourront même être votées mardi.
Le PS va boycotter le scrutin. Plusieurs députés UMP membres de la mission -mais aussi son président, André Gerin (PCF) !- veulent une loi d'interdiction générale dans tout l'espace public, autrement dit dans la rue, prônée par le patron des députés UMP, Jean-François Copé. Et d'autres, comme M. Raoult, estiment que, dans ce contexte, la balle est désormais dans le camp du gouvernement.
Le rapport de la mission, remis jeudi à François Fillon avant même de l'être au président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, propose une résolution parlementaire (sans pouvoir contraignant) proclamant que "toute la France dit non au voile intégral" et demandant qu'il soit "prohibé sur le territoire de la République".
Il présente aussi une vingtaine de "préconisations" et prône des dispositions législatives pour interdire le voile intégral dans les services publics (administrations, hôpitaux, sorties des écoles, transports...), même si une simple circulaire suffira dans certains cas.
Le texte de loi "contraindrait les personnes non seulement à montrer leur visage à l'entrée du service public mais aussi à conserver le visage découvert tout au long de leur présence au sein du service public".
"La conséquence de cette violation ne serait pas de nature pénale mais consisterait en un refus de délivrance du service demandé", précise le rapport. Par exemple, une femme porteuse d'un voile intégral se rendant à la caisse d'allocations familiales et refusant d'obtempérer ne pourrait pas percevoir ses prestations.
Si à droite comme à gauche, on est d'accord pour dénoncer le port du niqab ou de la burqa, les bisbilles politiques -tant entre gauche et droite qu'à l'intérieur de chaque camp- ont eu raison du consensus espéré initialement.
Les députés PS protestent contre un débat "pollué par celui sur l'identité nationale et l'initiative de Jean-François Copé", en faveur d'une loi d'interdiction générale. La politique de la chaise vide -qualifiée de "Munich" par Lionnel Luca (UMP)- leur permet aussi de masquer leurs divisions internes. Et à l'UMP, M. Accoyer a mis l'échec du consensus sur le compte des "interférences" de M. Copé.
Le rapport de M. Raoult ne retient pas la voie d'une loi générale, jugeant que "le chemin est à coup sûr étroit et nul ne peut dire avec une totale certitude s'il est praticable" et constitutionnel.
Toutefois, "un certain nombre de membres de la mission" souhaitent une telle loi, peut-on lire dans le rapport. Du côté de M. Copé, on maintient d'ailleurs la nécessité de ce texte car une loi concernant les seuls services publics "ne règle rien du tout".
"Après la résolution et la loi dans les services publics, l'interdiction dans la rue est le troisième étage de la fusée. Il faut prendre le temps, assurer la sécurité juridique d'une telle interdiction et remporter l'adhésion du plus grand nombre", souligne un responsable de la mission parlementaire.
Et si finalement l'Assemblée s'engageait dans la voie d'une telle loi d'interdiction générale, la mission souligne qu'il faudrait alors "recueillir l'avis du Conseil d'Etat en amont".