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Crise en Nouvelle-Calédonie : un nouveau Conseil de défense se tient à Paris
Alors que la Nouvelle-Calédonie est toujours en proie aux blocages, le président de la République Emmanuel Macron a convoqué pour lundi soir un nouveau Conseil de défense. "Il reste encore du chemin avant le retour à la normale", a reconnu le Premier ministre, Gabriel Attal.

La situation reste très tendue en Nouvelle-Calédonie, où la fermeture de l'aéroport a été prolongée alors que le territoire est toujours en proie aux blocages malgré les moyens massifs engagés par l'État pour rétablir l'ordre, avant un nouveau Conseil de défense prévu dans la soirée de lundi 20 mai.

Aucune issue à la grave crise que vit l'archipel du Pacifique Sud (270 000 habitants) ne se dessine en ce lundi de Pentecôte, jour férié, après six morts et une semaine d'émeutes en réaction à une réforme du corps électoral décriée par les indépendantistes.

Le Premier ministre Gabriel Attal a lui-même prévenu "qu'il reste encore du chemin avant le retour à la normale" en Nouvelle-Calédonie.

"Les forces de sécurité intérieure continuent d'arriver en nombre sur place grâce au pont aérien que nous avons mis en place. Nous progressons. Pas moins de 76 barrages ont été détruits sur la route reliant Nouméa à son aéroport", a-t-il précisé dans un message posté sur X, réaffirmant par ailleurs la détermination de son gouvernement à "rétablir l'ordre".

De la gauche à l'extrême droite en passant par la majorité, les voix se font chaque jour plus nombreuses pour réclamer un report du projet de loi constitutionnelle, qui doit être adopté en Congrès avant fin juin.

Quatre présidents d'exécutifs d'outre-mer (La Réunion, Guadeloupe, Martinique, Guyane) réclament même son "retrait immédiat", afin d'"éviter une guerre civile".

"Il ne faut pas que le président de la République convoque le Congrès à Versailles. Pas maintenant. Je pense que le président l'a compris", a affirmé au Monde Sonia Lagarde, la maire Renaissance de Nouméa, qui assure avoir eu des contacts avec Emmanuel Macron.

Stop ou encore ? Le cheminement du texte constitutionnel, accusé par les indépendantistes de "minoriser encore plus le peuple autochtone kanak" en dégelant le corps électoral des scrutins provinciaux, est entre les mains du chef de l'État, qui a convoqué un troisième Conseil de défense en six jours sur la Nouvelle-Calédonie.

Le premier, mercredi, avait précédé l'instauration de l'état d'urgence. Un deuxième, jeudi, avait préparé l'envoi de renforts de police et de gendarmerie dans le territoire océanien, où les forces de l'ordre dépassent les 2 700 effectifs désormais.

"La situation reste précaire"

Mais sur le terrain, les résultats de ce déploiement massif se font attendre, alors que les pénuries se multiplient.

Signe de difficultés à reprendre en main la situation, l'aéroport international de Nouméa restera fermé aux vols commerciaux jusqu'à jeudi 9 h (minuit à Paris), a annoncé le gestionnaire de la plateforme, la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie. Et ce malgré les demandes répétées de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande de pouvoir évacuer leurs ressortissants.

"La situation reste précaire, même si elle s'améliore", a estimé lundi sur BFMTV la porte-parole du ministère de l'Intérieur, Camille Chaize, après une nouvelle nuit de violences et dégradations.

"L'État est là", a soutenu sur la même chaîne celle de la gendarmerie, Marie-Laure Pezant, rappelant que des nouveaux renforts arrivaient "tous les jours". "La situation est évolutive, on met tous les moyens pour retrouver le calme", a-t-elle aussi déclaré.

Un ton plus mesuré que celui des autorités vantant auparavant les "succès" de l'opération de 600 gendarmes, lancée dimanche sur l'axe stratégique d'une cinquantaine de kilomètres reliant Nouméa à l'aéroport de La Tontouta, bloqué à de nombreux endroits par les militants indépendantistes.

La route n'est toujours pas accessible aux habitants. "L'objectif prioritaire, c'est de permettre l'acheminement de matériel et de vivres", a dit la porte-parole de la gendarmerie.

Peu après le passage du convoi de blindés et d'engins de chantiers dimanche, une grande partie des "76 barrages neutralisés" avaient été aussitôt réinstallés par les indépendantistes.

La plupart sont "filtrants" et laissent le passage à certains véhicules, y compris les pompiers ou ambulances à toute heure, soutient dans un communiqué diffusé lundi la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), collectif indépendantiste accusé par les autorités d'attiser les violences mais qui affirme rester "dans une démarche pacifique".

Couvre-feu nocturne et état d'urgence

Depuis le début, lundi dernier, d'une vague de violences inédite dans l'archipel en quarante ans, six personnes ont été tuées : un Caldoche (Calédonien d'origine européenne), trois Kanaks et deux gendarmes.

L'avion militaire ramenant les dépouilles de ces deux gendarmes mobiles a atterri lundi sur la base aérienne d'Istres (Bouches-du-Rhône), en présence du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, et de la ministre déléguée aux Outre-mer, Marie Guévenoux.

"Ils s'appelaient Nicolas Molinari et Xavier Salou. La Nation tout entière s'incline devant leurs cercueils. Hommage et condoléances à leurs proches", a écrit sur X le Premier ministre, Gabriel Attal.

Dans la nuit de dimanche à lundi, des détonations importantes ont été entendues dans Nouméa, notamment de grenades de désencerclement, utilisées par les forces de l'ordre pour disperser les émeutiers.

Lundi matin, la zone industrielle où se trouve la Société Le Nickel (SLN) a vu l'incendie d'un entrepôt dont se dégageait une épaisse fumée noire.

Mais le travail des forces de l'ordre a permis de "commencer la sécurisation" de certains quartiers de la ville, a assuré sur X le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc.

De manière générale, les voies de communication restent bloquées là où les émeutiers – estimés entre 3 000 et 5 000 – ont installé leurs barrages, et l'archipel vit au rythme du couvre-feu nocturne et sous état d'urgence.

Le Grand Nouméa semble à l'arrêt, marqué par les stigmates des affrontements, strié de barrages et de check-points improvisés, ralenti par les carcasses de voiture brûlées, les amoncellements de ferraille et de bois et le bitume fondu, ont constaté les journalistes de l'AFP.

La chambre de commerce et d'industrie (CCI) a appelé lundi à "préserver le peu qu'il reste" de l'économie calédonienne, évoquant des "conséquences" économiques et sociales "déjà catastrophiques".

Selon la CCI, 150 entreprises ont été "pillées et incendiées", et la zone industrielle de Ducos, "véritable poumon économique de la Nouvelle-Calédonie, est abandonnée à son sort".

Avec AFP