Le déploiement de soldats ne parvient pas à endiguer la violence entre chrétiens et musulmans, dans la ville de Jos, au centre du pays. Plus de 400 personnes ont été tuées depuis dimanche, des dizaines de milliers d'habitants ont pris la fuite.
AFP - Des dizaines de milliers de Nigérians ont fui les tueries à coups de machettes et de fusils entre chrétiens et musulmans mercredi, pour la quatrième journée consécutive dans la région de Jos (centre).
Selon un dernier bilan datant de mardi soir et établi notamment par des sources religieuses, près de 300 personnes ont péri lors des combats dans cette ville d'un demi-million d'habitants et ses environs où l'eau, les vivres et les médicaments commençaient à manquer.
Des témoins joints par téléphone ont fait état d'une propagation des violences dans la nuit à de nouvelles zones entre bandes armées de machettes et fusils et excitées par des extrémistes religieux.
D'autres ont rapporté que l'envoi de renforts militaires mardi avait permis de rétablir partiellement l'ordre.
"Les attaques se poursuivent dans les quartiers sud de la ville à Kuru Karama, Bisiji, Sabongidan et Kanar", a déclaré à l'AFP Idris Sarki, qui a fui le centre-ville de la capitale de l'Etat du Plateau où les deux communautés se sont déjà violemment affrontées dans le passé.
"Le quartier d'où je viens a été saccagé. Tous les habitants qui ont eu la chance de pouvoir le faire sont partis, mais beaucoup, beaucoup ont été tués", a-t-il ajouté.
Selon des témoins, des groupes d'hommes sont allées de maison à maison tuer les habitants et mettre le feu, alors qu'aucun nouveau décompte des victimes n'était disponible.
Toutefois, un résident du quartier Anguwarogo (nord), a indiqué à l'AFP que davantage de soldats étaient déployés et que le calme était revenu.
"C'est calme depuis la nuit dernière, de mon balcon je peux voir davantage de soldats patrouiller que hier, il y a eu des renforts", a expliqué Bashiru Mohammed.
Mais la situation humanitaire s'est dégradée et la population continuait à fuir massivement.
"Il y a maintenant plus de 50.000 déplacés dans des casernes de l'armée, des camps de la police et jusque dans des mosquées et églises", a déclaré Shehu Sani, chef de l'ONG Civil Rights Congress.
"D'autres quittent la ville, certains par la brousse et certains autres encore vont jusqu'à Abuja", à 200 km de là, a-t-il dit.
"Notre plus grand défi est aujourd'hui d'offrir de la nourriture, de l'eau et des médicaments aux déplacés", a dit Mark Lipdo, coordonnateur de l'ONG locale Stefanus Foundation qui a mentionné 20.000 déplacés.
La situation a été aggravée avec l'imposition depuis mardi d'un couvre-feu permanent.
"Le manque d'eau est tel depuis deux jours que des gens prennent le risque de sortir de chez eux pour chercher de l'eau malgré le couvre-feu", a dit un habitant, Maikudi Ladan.
"Je me trouve maintenant dans une autre maison de mon quartier d'où je tire de l'eau d'un puits car les robinets sont à sec", a-t-il ajouté, précisant: "les forces de sécurité nous permettent de sortir si nous transportons des seaux".
Selon un autre habitant, Bashir Mohammed, "les gens se précipitent dans les rares endroits où il y a des puits ou des trous d'eau".
Les autorités d'Abuja se sont dites déterminées à en finir avec ces violences intercommunautaires.
"C'est une crise de trop et le gouvernement fédéral estime qu'elle est totalement inacceptable, réactionnaire et susceptible de menacer davantage l'unité de notre pays", a déclaré mardi soir le vice-président, Goodluck Jonathan qui remplace le président Umaru Yar'adua soigné en Arabie saoudite depuis fin novembre.
Le chef de la police nationale Ogbonnaya Onovo s'est rendu sur place mercredi et a dit que "la crise avait provoqué des dégats considérables aux ressources humaines et matérielles".
En novembre 2008, des centaines de personnes ont péri en deux jours dans des affrontements similaires à Jos.