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"Si tu ne veux pas d’enfant, tu n’existes pas" : quel avenir pour les jeunes dans la Hongrie d'Orbán ?
Ils ont l’impression d’avoir vécu dans deux pays différents. Ákos et Adam se sont tous les deux installés à Budapest après avoir grandi dans le milieu rural et conservateur de la Hongrie. Ville attractive et libérale, la capitale hongroise tranche avec la politique nationaliste menée par le gouvernement du pays. Ces deux jeunes Hongrois nous racontent ce que signifie avoir 20 ans sous ce pouvoir autoritaire.

"Mon arrivée à Budapest m’a fait l’effet d’un choc culturel." Lorsqu’il s’installe dans la capitale hongroise il y a dix ans, Ákos commence une nouvelle vie. Originaire d’un petit village du sud-est de la Hongrie, ce militant LGBT+ de 29 ans a grandi au sein d’une famille conservatrice. "Mon grand-père s’est présenté aux élections locales sous les couleurs du Fidesz, le parti de Viktor Orbán. Il fait partie de ses grands admirateurs."

Premier ministre depuis 2010, le leader nationaliste et conservateur Viktor Orbán avait déjà exercé cette fonction entre 1998 et 2002. En avril 2022, il décroche un quatrième mandat consécutif. Ce qui signifie que, du haut de leurs 20 ans, les jeunes Hongrois l’ont connu au pouvoir… pendant la moitié de leur vie.

Une communauté LGBT+ invisibilisée

Dans l’environnement familial et scolaire d’Ákos, l’homosexualité est un sujet tabou et peu accepté. "Je connais certains enseignants qui ont été épinglés en première page de médias progouvernementaux juste parce qu’ils avaient évoqué des sujets LGBT+ en classe", relate le jeune homme. Il a donc attendu de quitter le nid et de s’envoler pour la grande ville avant d’assumer son orientation sexuelle auprès de ses proches.

Aujourd’hui, il s’est fait une place dans le milieu militant très actif de la capitale en œuvrant aux côtés d’une association de défense des droits LGBT+. Et l’agenda est chargé : deux ans après l'entrée en vigueur de la loi interdisant la "promotion" de l'homosexualité auprès des mineurs, les militants LGBT+ comme Ákos continuent d’en subir les conséquences. Ce texte a participé à renforcer l’invisibilisation et la discrimination de la communauté LGBT+, dans un pays qui "n’est plus considéré comme une démocratie" par l’UE.

L’omniprésence du modèle conservateur et traditionaliste

Depuis son quartier résidentiel de la banlieue budapestoise, Adam évolue dans une tout autre réalité. Pourtant, il ne se sent pas non plus considéré par son gouvernement. Et pour cause : il ne veut pas d’enfant. "En Hongrie, tu es obligé de fonder une famille pour recevoir des aides du gouvernement. Si tu as plus de 25 ans mais que tu ne veux pas d’enfant, tu es complètement délaissé", explique ce jeune présentateur de télévision et influenceur.

Ce modèle conservateur traditionnel est promu en masse sur les réseaux sociaux par le gouvernement Orbán, en plein contexte de baisse de la natalité dans le pays et de fuite des cerveaux. Ces dix dernières années, plus d’un demi-million de Hongrois sont partis étudier ou travailler à l’étranger, selon la Deutsche Welle.

Mais ce n’est pas dans les plans d’Adam, ni ceux d’Ákos. "Je me sens vraiment utile ici", explique ce dernier, "je ne me serais pas lancé dans l’activisme si je ne voyais pas l’immense potentiel de mon pays".