Le Premier ministre britannique a assuré mercredi devant la Chambre des communes qu'il ne démissionnerait pas, malgré le départ de plusieurs de ses ministres lors des 24 dernières heures.
Touché mais pas coulé. Le Premier ministre britannique Boris Johnson a affirmé, mercredi 6 juillet, sa détermination à "continuer" le mandat qui lui a été confié, malgré les démissions en cascade au gouvernement qui l'affaiblissent sur fond de scandales à répétition.
"Nous allons continuer à remplir le mandat qui m'a été confié", a déclaré le chef du gouvernement lors d'une séance hebdomadaire de questions au Parlement particulièrement électrique. "Le travail d'un Premier ministre dans des circonstances difficiles, quand un mandat colossal lui a été confié, est de continuer, et c'est ce que je vais faire", a-t-il ajouté, évoquant le contexte d'une économie britannique fragilisée et du retour de la guerre en Europe avec l'agression russe en Ukraine.
Déterminé à rester au 10, Downing Street, Boris Johnson a défendu l'action de son gouvernement, vantant notamment des baisses d'impôt. Mais des rires ont fusé lorsqu'il a dit s'être entretenu mercredi matin avec des membres du gouvernement, alors que les démissions se succèdent depuis mardi soir.
Cinq autres membres du gouvernement britannique ont en effet présenté leur démission mercredi matin, au lendemain du départ soudain de deux ministres de premier plan, celui des Finances, Rishi Sunak et celui de la Santé, Sajid Javid, une hémorragie qui fragilise encore davantage la position du Premier ministre.
Les titulaires des portefeuilles de l'Enfance et des Familles, Will Quince, des Écoles, Robin Walker, des Services financiers, John Glen, de l'Accueil des réfugiés afghans, Victoria Atkins, et de l'Agro-Innovation et de l'Adaptation climatique, Jo Churchill, ont successivement annoncé leur démission mercredi matin, en mettant en cause explicitement la politique menée par Boris Johnson, dans des lettres de démission publiées sur les réseaux sociaux.
Boris Johnson doit désormais face aux présidents des principales commissions de la Chambre des communes, parmi lesquels certains de ses critiques les plus virulents au sein de son parti conservateur.
Des excuses après un énième scandale
Les deux démissions choc de mardi soir ont été annoncées alors que le Premier ministre venait de présenter des excuses après un énième scandale, reconnaissant avoir fait une "erreur" en nommant en février dans son gouvernement Chris Pincher, "whip" en chef adjoint chargé de la discipline parlementaire des députés conservateurs. Ce dernier a démissionné la semaine dernière après avoir été accusé d'attouchements sur deux hommes.
Mardi, après avoir affirmé l'inverse, Downing Street a reconnu que le Premier ministre avait été informé dès 2019 d'anciennes accusations à l'encontre de Chris Pincher mais qu'il les avait "oubliées" en le nommant.
La démission de Rishi Sunak, 42 ans, intervient dans un contexte économique particulièrement difficile, en pleine crise du coût de la vie au Royaume-Uni. Les Britanniques attendent du gouvernement qu'il se conduise de manière "compétente" et "sérieuse" et "c'est pourquoi je démissionne", a-t-il écrit dans sa lettre à Boris Johnson.
De son côté, Sajid Javid, 52 ans, a jugé que les Britanniques étaient en droit d'attendre "de l'intégrité de la part de leur gouvernement".
Boris Johnson a rapidement remplacé les deux démissionnaires en nommant son ministre de l'Éducation Nadhim Zahawi aux Finances et Steve Barclay, jusque-là chargé de la coordination gouvernementale, à la Santé.
Des ministres loyaux lui ont réaffirmé leur soutien, comme Nadine Dorries, en charge de la Culture. Il est parfois "facile de s'en aller", mais "beaucoup plus difficile" de mettre en œuvre des réformes pour le pays, a affirmé Nadhim Zahawi mercredi sur SkyNews.
Pour 69 % des Britanniques, Boris Johnson devrait démissionner
Déjà considérablement affaibli par le scandale des fêtes organisées à Downing Street pendant la pandémie, Boris Johnson avait déjà survécu il y a quelques semaines à un vote de défiance de son propre camp.
Se sont ajoutées plusieurs affaires à caractère sexuel au Parlement : un député soupçonné de viol a été arrêté puis libéré sous caution mi-mai, un autre a démissionné en avril pour avoir regardé de la pornographie à la Chambre sur son téléphone portable en avril et un ancien député a été condamné en mai à 18 mois de prison pour l'agression sexuelle d'un adolescent de 15 ans.
Le départ de ces deux derniers députés a provoqué des élections législatives partielles et de lourdes défaites pour les conservateurs. Et ce alors que le parti avait déjà essuyé un très mauvais résultat aux élections locales de mai.
Le contexte économique est en outre particulièrement délicat, avec une inflation au plus haut depuis quarante ans, à 9,1 % en mai sur douze mois, et une grogne sociale.
Après une grève historique des cheminots fin juin, les syndicats ont déjà appelé à un "été du mécontentement" et plusieurs professions – avocats, personnels de santé, enseignants – ont appelé à des mouvements sociaux.
Selon un sondage de l'institut YouGov mardi soir, 69 % des électeurs britanniques estiment que Boris Johnson devrait démissionner. Plus de la moitié (54 %) des électeurs conservateurs de 2019 pensent que le Premier ministre doit quitter son poste.
Avec AFP