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En pleine crise au Sri Lanka, le président tend la main à l'opposition

Alors que les manifestations se multiplient pour réclamer sa démission, le président sri-lankais, Gotayaba Rajapaksa, a invité, lundi, l'opposition à se joindre à un gouvernement d'union. L'exécutif, qui a reconnu qu'il s'agissait de la pire crise économique depuis l'indépendance, a demandé l'aide du FMI.

Le président sri-lankais en difficulté Gotabaya Rajapaksa a invité, lundi 4 avril, l'opposition à se joindre à un gouvernement d'union et à s'attaquer à la crise économique qui s'aggrave, tandis que des manifestations exigeant sa démission s'étendent sur l'île.

Vingt-six ministres, à l'exception du président et de son frère aîné le Premier ministre Mahinda Rajapaksa, avaient présenté leur lettre de démission lors d'une réunion qui s'est tenue tard dans la nuit de dimanche à lundi. 

"Le président invite tous les partis politiques au Parlement à accepter des postes ministériels et à se joindre à l'effort de recherche de solutions à la crise nationale", a déclaré le bureau de Gotabaya Rajapaksa dans un communiqué.

Peu auparavant, la Bourse de Colombo avait interrompu ses échanges, l'indice des valeurs vedettes ayant plongé de 5,92 % juste après l'ouverture, réagissant à la démission en bloc du gouvernement. 

Le pays de 22 millions d'habitants souffre de pénuries de biens essentiels, produits alimentaires, carburant, médicaments, de coupures d'électricité et d'une inflation record, sans que rien ne laisse présager la fin des difficultés économiques.

Le gouvernement, qui a reconnu qu'il s'agissait de la pire crise économique depuis l'indépendance vis-à-vis de la Grande-Bretagne en 1948, a demandé l'aide du Fonds monétaire international (FMI), mais les négociations pourraient durer jusqu'à la fin de l'année. 

Lundi, le gouverneur de la banque centrale du Sri Lanka, Ajith Cabraal, qui avait résisté à un afflux d'appels en faveur d'un renflouement par le FMI, a annoncé sa démission.

L'armée et la police ont été placées en état d'alerte élevée, alors qu'un couvre-feu de 36 heures a pris fin à l'aube lundi, et ce malgré les rapports des services de renseignement mettant en garde contre de nouveaux troubles, a déclaré à l'AFP un haut responsable de la sécurité.

"S'attaquer aux problèmes de gouvernance"

Le président a déjà reconduit quatre des ministres sortants, dont trois à leur ancien poste, tandis qu'il a remplacé aux Finances son frère Basil par l'ancien chef de la Justice.

Les autres postes vacants au sein du gouvernement seront pourvus après des discussions avec l'opposition, a-t-il déclaré, mais celle-ci n'a pas immédiatement réagi.

Toutefois, le principal chef de l'opposition, Sajith Premadasa, avait déclaré, dimanche, qu'il ne rejoindrait pas un gouvernement dirigé par le clan Rajapaksa.

Pour les analystes politiques, l'offre d'un gouvernement d'union n'est pas suffisante pour résoudre la crise économique ni restaurer la confiance dans l'administration Rajapaksa.

"C'est comme réarranger les chaises longues du Titanic", a estimé auprès de l'AFP Bhavani Fonseka, analyste politique et avocat, spécialiste des droits de l'Homme, "c'est une blague".

Pour Victor Ivan, commentateur politique interrogé par l'AFP, un remaniement ministériel, même d'union, n'est pas acceptable quand le peuple exige la démission des Rajapaksa. 

"Ce qu'il faut, c'est un programme de réforme sérieux, pas seulement pour relancer l'économie mais pour s'attaquer aux problèmes de gouvernance", souligne-t-il. 

Nouvelles manifestations

"Selon nos indications, nous pouvons nous attendre à de nouvelles manifestations", a-t-il dit, réaffirmant que l'armée avait été habilitée à détenir des suspects dans le cadre de l'état d'urgence déclaré vendredi. 

Le président Rajapaksa avait imposé l'état d'urgence, au lendemain d'une tentative d'assaut de sa résidence à Colombo par une foule en colère.

Tout au long de la soirée de dimanche, des centaines de personnes ont manifesté, tout en restant pacifiques, dans plusieurs villes de l'île pour dénoncer la gestion de la crise par le président Rajapaksa.

Le couvre-feu de dimanche, qui a duré toute la journée, a empêché l'organisation de manifestations plus importantes grâce au blocage des réseaux sociaux Twitter, Facebook, WhatsApp, YouTube et Instagram, dénoncé par la principale alliance de l'opposition, le Samagi Jana Balawegaya (SJB).

La censure des réseaux sociaux a été levée plus tard dans la journée, la Commission des droits de l'Homme ayant jugé qu'elle était illégale.

Des militants ont prévenu que des manifestations de plus grande ampleur se dérouleraient, lundi, dans plusieurs villes clés pour appeler à la démission du président Rajapaksa et son clan. 

De mauvaises décisions politiques ont aggravé les problèmes, selon les économistes. Des réductions d'impôts malavisées juste avant la pandémie ont privé l'État de recettes et creusé la dette.

Avec AFP