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Les représentants de 57 pays musulmans ont convenu dimanche, lors d'un sommet extraordinaire au Pakistan, de travailler avec l'ONU pour débloquer des centaines de millions de dollars d'avoirs afghans et créer un fonds de donations pour atténuer la crise humanitaire en Afghanistan.

Les pays musulmans, réunis dimanche 19 décembre à Islamabad au Pakistan dans le cadre de l'Organisation de coopération islamique (OCI), ont promis de travailler avec l'ONU pour débloquer des centaines de millions de dollars d'avoirs afghans et mettre en place un fonds de donations pour atténuer la crise humanitaire en Afghanistan.

Lors de ce sommet extraordinaire, l'organisation, qui compte 57 membres, a décidé de "lancer des discussions avec l'Organisation des Nations unies" pour "débloquer les canaux bancaires et redémarrer les flux de liquidités et d'aide humanitaire".

Cette réunion était la première grande conférence sur l'Afghanistan depuis la chute en août de l'ancien gouvernement soutenu par les États-Unis.

Depuis l'arrivée au pouvoir des Taliban, plusieurs milliards de dollars d'aides sont bloqués par les pays occidentaux. Les États-Unis ont notamment gelé 9,5 milliards de dollars d'avoirs de la Banque centrale afghane, alors que le pays se prépare à affronter un hiver très rude.

Les Nations unies ont prévenu à plusieurs reprises que l'Afghanistan était sur le point de connaître une des pires catastrophes humanitaires au monde et le Programme alimentaire mondial (Pam) redoute une "avalanche de famine".

Un fonds opérationnel début 2022

L'OCI, dans une résolution publiée après la réunion, demande également à la communauté internationale de "contribuer" à un "fonds humanitaire" géré par la Banque islamique de développement, qui sera opérationnel "d'ici le premier trimestre 2022". Aucun montant n'a toutefois été encore annoncé.

"Beaucoup (de pays) veulent donner, mais ne veulent pas le faire directement" au régime des Taliban, a expliqué le ministre pakistanais des Affaires étrangères, Shah Mahmood Qureshi.

Par ailleurs, la résolution "appelle les autorités afghanes à poursuivre le travail en faveur d'une plus grande inclusivité", notamment en développant "un plan pour renforcer la participation de tous les Afghans, dont les femmes et jeunes filles, dans tous les aspects de la société". L'OCI y "presse" l'Afghanistan de "respecter (...) les obligations issues des traités relatifs aux droits humains".

Car si les Taliban ont promis de suivre une ligne moins dure que celle ayant caractérisé leur premier passage au pouvoir, de 1996 à 2001, les femmes restent largement exclues des emplois publics et les écoles secondaires pour filles restent pour la plupart fermées.

Les Taliban "estiment clairement qu'ils avancent dans la bonne direction" sur ces questions, a expliqué Shah Mahmood Qureshi lors d'une conférence de presse.

"Danger d'un effondrement économique complet"

Dans son discours d'ouverture de la réunion, Shah Mahmood Qureshi avait mis en garde contre les "graves conséquences" que pourrait entraîner l'effondrement économique, évoquant une dure famine, de nouveaux flots de réfugiés et une montée de l'extrémisme.

"Nous ne pouvons ignorer le danger d'un effondrement économique complet", avait-il prévenu les représentants des pays membres de l'OCI, dont son homologue taliban Amir Khan Muttaqi, mais aussi des délégués des États-Unis, de la Chine, de la Russie, de l'Union européenne et des Nations unies assistant à la réunion comme observateurs.

Le Premier ministre pakistanais, Imran Khan, a, lui, exhorté à "dissocier le gouvernement afghan des 40 millions de citoyens", s'adressant "spécifiquement aux États-Unis". Il a également appelé à ne pas nécessairement lier la reconnaissance des autorités talibanes aux idéaux occidentaux en matière de droits humains, car "l'idée que se fait chaque société des droits de l'Homme est différente".

L'OCI a toutefois décidé de l'envoi d'une "délégation de théologiens islamiques internationaux" pour "engager un dialogue" avec l'Afghanistan sur, notamment, "la tolérance et la modération dans l'islam, l'accès égalitaire à l'éducation et les droits des femmes".

Aucun pays n'a encore formellement reconnu le gouvernement taliban et la réunion de l'OCI n'a pas satisfait ce désir des Taliban, le ministre des Affaires étrangères ayant été exclu de la photo officielle. Amir Khan Muttaqi a malgré tout encore réclamé le "droit" de son gouvernement "d'être reconnu officiellement".

Le Pakistan, l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis étaient les trois seuls pays à avoir reconnu le précédent régime taliban.

Avec AFP