Au lendemain du drame qui a couté la vie à 27 migrants au large de Calais, Paris a convié les ministres en charge de l'immigration belge, allemand, néerlandais et britannique, ainsi que la Commission européenne, à une rencontre dimanche à Calais.
La France invite "les ministres en charge de l'immigration belge, allemand, néerlandais et britannique, ainsi que la Commission européenne, à une rencontre" dimanche 28 novembre à Calais, a indiqué Matignon jeudi après une réunion interministérielle au lendemain du naufrage dans la Manche d'une embarcation de migrants qui a fait 27 morts.
"Cette réunion devra permettre de définir les voies et moyens de renforcer la coopération policière, judiciaire et humanitaire" pour "mieux lutter contre les réseaux de passeurs à l'œuvre dans les flux migratoires", ont expliqué les services du Premier ministre.
La France en quête d'une réponse européenne
L'entourage de Jean Castex a insisté sur la nécessité "d'une réponse faite à l'échelle européenne pour être efficace" et "trouver des solutions pérennes", notamment "en s'attaquant durablement aux passeurs". Quelques minutes plus tôt, lors d'un déplacement en Croatie, Emmanuel Macron avait appelé à "une coopération européenne plus forte en la matière".
"La France est un pays de transit, nous nous battons contre ces réseaux de passeurs qui utilisent la détresse, mais nous devons pour cela améliorer la coopération européenne", avait ajouté le chef de l'Etat, en faisant valoir que "quand ces femmes et ces hommes arrivent sur les rivages de la Manche, c'est déjà trop tard".
"Il nous faut responsabiliser nos partenaires et nous avons besoin de renforcer les coopérations avec la Belgique, les Pays-Bas, l'Allemagne, mais aussi les Britanniques et la Commission", avait-il insisté.
Emmanuel Macron avait également mentionné "une série de réunions qui seront tenues par le ministre de l'Intérieur dans les prochains jours pour mieux prévenir les arrivées sur le sol français et pour mieux intégrer aussi les Britanniques à la prévention de ces flux en démantelant les réseaux de passeurs".
Londres-Paris : une coopération compliquée
Le gouvernement britannique a indiqué, jeudi 25 novembre, proposer à la France des patrouilles de police communes sur la côte française longeant la Manche, dans la foulée du drame survenu au large de Calais.
Lors d'un entretien téléphonique mercredi soir, Boris Johnson et le président français Emmanuel Macron ont convenu d'"intensifier leurs efforts" et de "garder toutes les options sur la table" pour lutter contre les gangs de passeurs organisant les traversées illégales de la Manche, selon un porte-parole de Downing Street.
Le secrétaire d'État britannique à l'Immigration, Kevin Foster, a souligné que Londres était prêt à offrir des "moyens" supplémentaires à la France, au-delà de son aide financière, comme l'hélicoptère déployé mercredi dans le cadre de l'opération de secours.
"Nous sommes disposés à offrir un soutien sur le terrain, nous sommes disposés à offrir des ressources, nous sommes disposés à offrir, littéralement, des gens pour aller là-bas et assister les autorités françaises", a-t-il déclaré sur la BBC. "Il n'est dans l'intérêt de personne que cela se poursuive."
Kevin Foster a indiqué que la ministre de l'Intérieur, Priti Patel, s'entretiendrait dans la matinée avec son homologue français, Gérald Darmanin.
D'après Tom Pursglove, un autre secrétaire d'État chargé de l'immigration, Boris Johnson a réitéré lors de l'entretien téléphonique une proposition, auparavant rejetée par Paris pour une raison de souveraineté, d'organiser des patrouilles franco-britanniques sur les côtes françaises afin d'empêcher les migrants d'embarquer.
"J'espère vraiment que les Français vont reconsidérer cette proposition", a-t-il déclaré sur la BBC mercredi soir.
Cette question des traversées, qui attise régulièrement les tensions entre Londres et Paris, est délicate pour le gouvernement conservateur de Boris Johnson, qui a fait de la lutte contre l'immigration son cheval de bataille dans la foulée du Brexit.
À la suite d'une réunion de crise mercredi, Boris Johnson avait pointé du doigt les Français, estimant qu'ils n'en avaient pas fait "assez" pour empêcher les traversées, malgré une aide de plus de 60 millions d'euros pour renforcer la surveillance de leur littoral.
"Ce que nous proposons, c'est d'augmenter notre soutien mais aussi de travailler avec nos partenaires sur les plages concernées", avait-il déclaré.
I am shocked, appalled and deeply saddened by the loss of life at sea in the Channel.
My thoughts are with the victims and their families.
Now is the time for us all to step up, work together and do everything we can to stop these gangs who are getting away with murder. pic.twitter.com/D1LWeoIFIu
Au lendemain du drame, le plus meurtrier impliquant des migrants dans la Manche à ce jour, plusieurs journaux britanniques vont dans le même sens, le tabloïd The Sun publiant en une la photo d'une patrouille de police française laissant, sans rien faire selon lui, des migrants embarquer dans un bateau pneumatique.
Mais sur la BBC, le député du Pas-de-Calais Pierre-Henri Dumont (LR) a qualifié de "solution folle" le renforcement des patrouilles sur les plages, plaidant pour une collaboration entre les deux gouvernements pour trouver de "vraies solutions", comme permettre aux migrants d'introduire une demande d'asile même s'ils ne se trouvent pas au Royaume-Uni.
"Est-ce vraiment le moment de pointer du doigt ? (...) Est-ce le moment de ne pas se battre ensemble contre ces trafiquants ?", a réagi le député français Bruno Bonnell, du parti LREM du président Macron.
"Sur 30 000 personnes essayant de traverser la Manche, 60 % ont été arrêtées", a-t-il affirmé sur Sky News, en admettant que c'était insuffisant. Mais "cela se passe la nuit sur de petites plages. La police ne peut être partout, soyons réalistes", a-t-il ajouté.
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Avec AFP