
L'ancien ministre italien de l'Intérieur Matteo Salvini a comparu samedi à Palerme, en Sicile, pour avoir bloqué en mer un bateau avec 147 migrants à bord en 2019. L'ancien dirigeant d'extrême droite risque jusqu'à 15 ans de prison.
En août 2019, Matteo Salvini, alors ministre de l’Intérieur, avait fait bloquer au large un navire de l’ONG Open Arms abritant 147 migrants. Le leader d'extrême-droite a comparu, samedi 23 octobre, devant un tribunal de Palerme. Il est poursuivi pour séquestration après avoir bloqué ce navire et, précise le quotidien Il Fatto Quotidian, “risque jusqu’à quinze ans d’emprisonnement”.
L'audience, la deuxième depuis l'ouverture du procès le mois dernier, était consacrée à la recevabilité des témoins. Une passe d'armes s'est produite, entre accusation et défense, sur l'opportunité de convoquer l'acteur américain Richard Gere. Celui-ci était en Italie à l'époque de l'incident et avait aidé l'ONG espagnole Open Arms - qui affrétait le navire - à distribuer de la nourriture aux quelque 150 migrants à bord.
"Maintenant, dites-moi quel est le sérieux d'un procès où Richard Gere vient d'Hollywood pour dire à la barre comme je suis méchant", a déclaré Matteo Salvini devant la cour.

Le bateau de l’ONG, qui mouillait au large de l’île de Lampedusa avait demandé un port plus sûr pour le navire. Mais Matteo Salvini avait refusé pendant six jours d'accéder à cette demande. C’est l’aggravation de la situation sanitaire à bord du bateau qui avait finalement permis aux migrants de débarquer. La justice sicilienne avait en effet émis une ordonnance de débarquement après avoir constaté les conditions de vie à l'intérieur du bateau surpeuplé.
L'acteur Richard Gere autorisé à témoigner
Les représentants d'Open Arms ont fait valoir que Richard Gere serait en mesure de livrer un témoignage direct sur les conditions de vie à bord du bateau, bloqué pendant 19 jours au large de Lampedusa avant que la justice n'ordonne l'évacuation de ses passagers.
Le tribunal a validé la convocation de Richard Gere et celle de l'ancien président du Conseil Giuseppe Conte. Le tribunal a également accepté que Luciana Lamorgese et Luigi Di Maio, respectivement ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères, figurent parmi les témoins. Le procès de Matteo Salvini, qui risque jusqu'à 15 ans de prison, s'était ouvert le 15 septembre mais avait été renvoyé immédiatement. L'audience de samedi, largement procédurale, a duré moins de trois heures et le juge Murgia a fixé la prochaine audience au 17 décembre.
Vingt-trois parties civiles, dont neuf migrants qui se trouvaient à bord, sont représentées au procès. Le Sénat a voté l'an dernier la levée de l'immunité parlementaire de Matteo Salvini, ouvrant la voie à son procès.
Matteo Salvini, qui a bâti une grande partie de sa carrière politique en prenant pour cible l'immigration, s'est défendu en disant avoir simplement rempli ses obligations de ministre et il a dénoncé des accusations "surréalistes".
"Pas de motivation politique"
Connu pour ses déclarations controversées, notamment sur l'immigration, Matteo Salvini a été vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur dans le premier gouvernement de Giuseppe Conte, de juin 2018 à septembre 2019. À 48 ans, il est le chef de La Ligue, parti anti-migrants d'extrême droite qui appartient à la coalition actuellement au pouvoir dirigée par Mario Draghi.
"Voici le tribunal de la prison de Palerme", avait tweeté depuis la salle d'audience Matteo Salvini avec une photo de lui-même debout devant une cellule réservée à certains accusés. "Le procès voulu par la gauche et les fans de l'immigration illégale commence : combien cela va-t-il coûter aux citoyens italiens ?".
Qui Aula di Giustizia del carcere di Palermo. Il processo voluto dalla sinistra e dai tifosi dell’immigrazione clandestina comincia: quanto costerà ai cittadini italiani? pic.twitter.com/LKUUjLSOFD
— Matteo Salvini (@matteosalvinimi) October 23, 2021Il assure avoir agi pour le bien de l'Italie et pour dissuader les migrants de s'embarquer depuis les côtes africaines pour une dangereuse traversée de la Méditerranée, soulignant que la décision avait été validée par le gouvernement de l'époque et Giuseppe Conte.
Devant le tribunal, le fondateur et directeur d'Open Arms, Oscar Camps, a assuré aux journaliste que le procès n'avait pas de motivation politique. "Sauver des gens n'est pas un crime mais une obligation, non seulement pour les capitaines mais pour l'État tout entier", a déclaré Oscar Camps.
Répondre à un questionnaire, s'inscrire et trouver quelqu'un qui vous correspond pour... débattre sur des thématiques européennes. En partenariat avec 17 médias dont France 24 et ENTR, Europe Talks vous propose de participer à sa plateforme d'échanges entre Européens. Prêt pour une rencontre ?
Avec AFP et Reuters