Le Liban s'est doté vendredi d'un nouveau gouvernement dirigé par Najib Mikati, au terme de treize mois de tractations politiques. Le président français Emmanuel Macron a salué "une étape indispensable" tout en rappelant les responsables politiques à leurs engagements.
Après un an d’attente, le Liban a désormais un nouveau gouvernement. Le Premier ministre Najib Mikati et le président Michel Aoun ont signé, vendredi 10 septembre, le décret de formation du nouveau gouvernement, en présence du président du Parlement, Nabih Berri.
La nouvelle équipe comporte des personnalités apolitiques, dont certaines jouissent d'une bonne réputation, à l'instar de Firas Abiad, directeur de l'hôpital gouvernemental Rafic-Hariri, fer de lance de la lutte contre le coronavirus. Le gouvernement de 24 ministres devrait tenir sa première réunion lundi à 11 h (8 h GMT), a indiqué le secrétaire général du Conseil des ministres, Mahmoud Makiyye.
Emmanuel Macron, qui suit de près le dossier libanais et avait accusé début août la classe dirigeante de faire "le pari du pourrissement", a salué dans un communiqué l'"étape indispensable" que constitue, selon lui, la formation d'un nouveau gouvernement au Liban pour "sortir le pays de la crise profonde dans laquelle il se trouve".
Le président français a aussi souligné "la nécessité que l'ensemble des responsables politiques se conforment aux engagements qu'ils ont pris de permettre la mise en œuvre des réformes nécessaires pour préparer l'avenir du Liban et permettre à la communauté internationale de lui apporter une aide décisive".
Le Liban était dépourvu de gouvernement depuis plus d'un an, le Premier ministre Hassan Diab ayant démissionné en août 2020, une semaine après la double explosion meurtrière dans le port de Beyrouth.
Depuis, la crise économique inédite que traverse le pays depuis l'été 2019 n'a eu de cesse de s'aggraver, la Banque mondiale la qualifiant d'une des pires au monde depuis 1850. Avec une inflation galopante et des licenciements massifs, 78 % de la population libanaise vit aujourd'hui sous le seuil de pauvreté, selon l'ONU.
Une condition pour l'aide internationale
Chute libre de la monnaie locale, restrictions bancaires inédites, levée progressive des subventions, pénuries de carburants et de médicaments... Le pays est aussi plongé dans le noir depuis plusieurs mois, les coupures de courant culminant jusqu'à plus de 22 heures quotidiennement. Les générateurs de quartier, qui prennent généralement le relais, rationnent aussi foyers, commerces et institutions, faute de fioul suffisant, devenu cher et monnaie rare dans un pays à court de devises étrangères et en pleine levée des subventions sur plusieurs produits de base.De nombreux défis attendent ainsi le prochain gouvernement, notamment la conclusion d'un accord avec le Fonds monétaire international, avec lequel les pourparlers sont interrompus depuis juillet 2020.
Il s'agit pour la communauté internationale d'une étape incontournable pour sortir le Liban de la crise et débloquer d'autres aides substantielles. Depuis plus d'un an, celle-ci conditionne en effet son aide à la formation d'un gouvernement capable de lutter contre la corruption et de mener des réformes indispensables. Elle s'est contentée depuis l'explosion de fournir une aide humanitaire d'urgence, sans passer par les institutions officielles.
Fin juillet, Michel Aoun avait chargé Najib Mikati, ancien Premier ministre et homme le plus riche du pays, de former un nouveau gouvernement après l'échec de ses deux prédécesseurs.
L'ancien Premier ministre Saad Hariri avait jeté l'éponge à la mi-juillet au terme de neuf mois de difficiles tractations. Après sa démission, il avait accusé l'Iran, principal soutien du Hezbollah, d'"entraver" l'accouchement d'un gouvernement réformateur. Avant lui, l'ambassadeur Moustafa Adib avait également rendu son tablier.
Malgré les menaces de sanctions de l'Union européenne, les avertissements et les accusations "d'obstruction organisée" ces derniers mois, les dirigeants politiques libanais ont poursuivi leurs habituels marchandages.
Avec AFP