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La France dans l'attente de l'ambassadeur de Chine, convoqué après des propos "inacceptables"

Après des menaces et des insultes répétées à l'encontre de parlementaires et d'un chercheur français, le ministère français des Affaires étrangères a convoqué l'ambassadeur de Chine qui, selon le quai d'Orsay, a décliné cette invitation, évoquant des "problèmes d'agenda".

Les tensions ne cessent de croître entre Pékin, Paris et Bruxelles. La France attend que soit honorée "le plus rapidement possible" la convocation de l'ambassadeur de Chine par le ministère des Affaires étrangères, a déclaré, mardi 23 mars, le secrétaire d'État aux Affaires européennes, Clément Beaune, en pleine crise diplomatique entre Pékin et l'Union européenne.

Le ministère français des Affaires étrangères avait dénoncé lundi les "propos inacceptables" de l'ambassade de Chine envers un chercheur et des parlementaires français, précisant que l'ambassadeur serait convoqué.

"Après la multiplication des propos inacceptables tenus publiquement par l’ambassade de Chine ces derniers jours, y compris sous la forme d’insultes et de menaces à l’encontre de parlementaires et d’un chercheur français, nous rappelons les règles élémentaires consacrées par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques qui s’attachent au fonctionnement d’une ambassade étrangère, notamment s’agissant de sa communication publique", avait ajouté lundi Agnès von der Mühll, porte-parole du Quai d'Orsay, lors d'un point quotidien avec la presse. "L’ambassade est invitée à s’y conformer strictement". 

Mardi, sur l'antenne de France Info, Clément Beaune a confirmé que l'ambassadeur avait bien été convoqué, mais qu'il avait décliné en évoquant un problème d'agenda. 

"Le problème d'agenda, je n'y crois pas trop et ça ne marche pas dans ce sens-là", a estimé le secrétaire d'État. "Ni la France, ni l'Europe ne sont des paillassons. Quand on est convoqué, quand on est ambassadeur, on se rend à une convocation au ministère des Affaires étrangères".

Une demande urgente de la part de la France 

"Nous attendons le plus rapidement possible que cette convocation soit honorée", a-t-il ajouté. 

"L'Ambassadeur Lu Shaye ne s'est pas rendu aujourd'hui au MAE français en raison d'agenda. Demain, il s'y rendra pour entreprendre des démarches auprès de la partie française sur les sanctions imposées par l'UE aux individus et aux entités chinois et les questions liées à Taïwan", avait tweeté lundi soir l'ambassade de Chine.

Lu Shaye avait déjà été convoqué par le Quai d'Orsay en avril 2020 à la suite de messages et de tweets de l'ambassade défendant la gestion par Pékin de la pandémie de Covid-19 et critiquant sa gestion par les pays occidentaux.

Outre la question des sanctions, la France souhaite s'expliquer avec l'ambassadeur sur deux points bilatéraux.

"Petite frappe", "hyène folle", "troll idéologique" : l'ambassade s'est déchaînée ces derniers jours contre Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) auquel elle reproche ses positions "antichinoises".

Petite frappe pic.twitter.com/bJ4AQWep00

— Ambassade de Chine en France (@AmbassadeChine) March 19, 2021
L'ambassadeur Lu Shaye s'est aussi déclaré "fermement opposé" à un projet de visite de parlementaires français à Taïwan. La République populaire de Chine considère Taïwan comme une de ses provinces, dénonce chaque visite de responsables occidentaux sur l'île et menace de recourir à la force en cas de proclamation formelle d'indépendance par Taipei.

Bras de fer diplomatique sur la question des Ouïghours

Paris a par ailleurs jugé "inacceptable" la décision de Pékin de sanctionner dix ressortissants européens, dont un eurodéputé français, et quatre organisations en représailles à des sanctions de l'UE pour la répression de Pékin contre la minorité musulmane des Ouïghours.

Les propos de l’ambassade de Chine en France et les actions contre des élus, chercheurs et diplomates européens sont inadmissibles. J’ai demandé que l’ambassadeur de Chine soit convoqué pour lui rappeler fermement ces messages.

— Jean-Yves Le Drian (@JY_LeDrian) March 22, 2021

Selon des études d'instituts américains et australien, au moins un million de Ouïghours ont été internés dans des "camps" de la région chinoise du Xinjiang (nord-ouest) et certains soumis à du "travail forcé" et des "stérilisations".

La Chine dément catégoriquement les deux dernières accusations et affirme que les "camps" sont des "centres de formation professionnelle" destinés à éloigner la population de l'extrémisme religieux et du séparatisme, après une série d'attentats attribués à des Ouïghours.

Pékin a annoncé mardi avoir convoqué "dans la nuit" l'ambassadeur de l'UE en Chine, Nicolas Chapuis, afin de "condamner dans les termes les plus vifs" des sanctions européennes "fondées sur des mensonges et de fausses informations". "L'UE n'est pas qualifiée pour se poser en donneuse de leçon à l'égard de la Chine sur les droits de l'Homme", lui a indiqué le vice-ministre des Affaires étrangères, Qin Gang.

"La Chine exhorte l'UE à reconnaître la gravité de son erreur, à la corriger et à mettre fin à la confrontation, afin de ne pas causer davantage de dommages aux relations sino-européennes", a-t-il ajouté.

Avec AFP et Reuters