
Au deuxième trimestre, le laboratoire suédo-britannique AstraZeneca ne pourra délivrer que 70 millions de doses sur les 180 initialement prévues. La Commission européenne a indiqué insister pour que l'entreprise "fasse tout son possible pour honorer ses engagements".
La vaccination anti-Covid était, samedi 13 mars, au centre des préoccupations dans l'Union européenne, avec l'annonce d'une nouvelle baisse des livraisons du laboratoire AstraZeneca et l'appel à des discussions "le plus vite possible" lancé par cinq pays membres inquiets de disparités dans la distribution des doses.
L'image d'AstraZeneca est déjà écornée par les suspensions de son vaccin décidées cette semaine par le Danemark, l'Islande, la Norvège et la Bulgarie après des cas graves de caillots sanguins, tandis que la Thaïlande a retardé sa campagne de vaccination.
La Norvège s'est en outre inquiétée samedi de cas d'hémorragies cutanées chez des personnes relativement jeunes ayant reçu une dose du vaccin AstraZeneca, même si aucun lien n'est encore établi avec le vaccin.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a affirmé vendredi qu'il n'y avait "pas de raison de ne pas utiliser" ce vaccin.
Un projet-pilote suspendu en Allemagne
"AstraZeneca est au regret d'annoncer une baisse des livraisons de vaccins contre le Covid-19 à l'Union européenne", a déclaré le groupe suédo-britannique, dont le vaccin a été autorisé fin janvier dans l'UE.
Invoquant des "restrictions d'exportation" pour les vaccins fabriqués hors UE, il annonce ne pouvoir livrer que 100 millions de doses durant les six mois achevés en juin, dont 70 millions seulement sur les 180 millions initialement prévus au deuxième trimestre.
En janvier, le groupe avait déjà réduit ses objectifs du premier trimestre, incriminant un problème de "rendement" dans son usine belge.
Samedi, la Commission européenne a indiqué poursuivre avec les États membres les discussions avec AstraZeneca, et insisté pour que l'entreprise "fasse tout son possible pour honorer ses engagements".
Conséquence de cette baisse des livraisons : en Allemagne, le Land de Thuringe – qui a le taux d'incidence le plus élevé du pays, à 152,1 samedi – doit suspendre temporairement un projet-pilote de vaccination avec ce produit par des médecins généralistes. Ce projet devait débuter avant fin mars et devait notamment concerner les personnes âgées vivant à domicile.
"Énormes disparités" dans la distribution
Parallèlement, cinq pays – Autriche, République tchèque, Slovénie, Bulgarie, Lettonie – ont appelé samedi à des discussions "le plus tôt possible" entre les dirigeants de l'UE sur d'"énormes disparités" de distribution des vaccins. Un sommet européen doit se tenir les 25 et 26 mars.
Le chancelier autrichien, Sebastian Kurz, avait accusé la veille certains États membres, sans les nommer, d'avoir négocié en coulisses "des contrats" avec des laboratoires.
L'UE reste à la traîne des États-Unis, d'Israël et du Royaume-Uni pour les vaccinations. La Commission, qui a négocié les contrats de vaccins au nom des 27 États membres, table sur une montée en puissance au deuxième trimestre et vise le chiffre de 70 % d'Européens vaccinés d'ici la fin de l'été.
Aux États-Unis, pays le plus touché par la pandémie de coronavirus avec 532 590 décès, quasiment 20 % de la population a reçu au moins une dose de vaccin et plus de 100 millions de doses ont déjà été administrées, soit environ 30 % du nombre total d'injections effectuées dans le monde.
Troisième vague en vue
Vendredi, l'OMS a homologué le vaccin à dose unique de Johnson & Johnson, qui pourra désormais être distribué par l'intermédiaire du système onusien Covax aux pays défavorisés. Outre le fait d'être injecté en dose unique, il présente aussi l'avantage de pouvoir être conservé dans un réfrigérateur classique. L'agence onusienne avait déjà autorisé le vaccin de Pfizer-BioNTech, ainsi que deux versions de celui d'AstraZeneca-Oxford.
Dans plusieurs pays, les autorités sanitaires s'inquiètent de l'arrivée d'une troisième vague, comme en Italie, pays qui va reconfiner une grande partie de sa population à partir de lundi et jusqu'au 6 avril.
Les régions classées en zone rouge (présentant plus de 250 nouveaux cas par semaine) devront fermer écoles, bars et restaurants, et les déplacements y seront limités. Et toute la péninsule sera classée en "rouge" pour le week-end de Pâques, les 3, 4 et 5 avril.
L'Italie, qui a passé cette semaine la barre des 100 000 morts du Covid-19, enregistre une forte hausse des contaminations et des décès, liés en grande partie au variant britannique.
Si le pays a lancé son plan de vaccination énergiquement fin décembre, les livraisons se sont depuis considérablement ralenties et 1,8 million de personnes seulement – sur une population de 60 millions – avaient reçu vendredi deux doses de vaccin.
En France, la région la plus peuplée, l'Île-de-France, inquiète les autorités : la situation des hôpitaux y est particulièrement tendue et de premières évacuations de malades vers d'autres régions ont commencé samedi.
"Nous sommes sur le fil du rasoir", a résumé le Premier ministre, Jean Castex. La France, qui a passé vendredi la barre des 90 000 morts du Covid-19, espère dépasser l'objectif des 10 millions de vaccinés mi-avril.
L'Afrique à la traîne
Sur le continent africain, la vaccination est à la traîne. L'Éthiopie, deuxième État le plus peuplé d'Afrique, a seulement débuté samedi sa campagne de vaccination avec l'administration de doses AstraZeneca produites en Inde, sur fond de progression "alarmante" de cas dans le pays. La République démocratique du Congo (numéro quatre par sa population en Afrique) a elle reporté le lancement des vaccinations, initialement prévu pour le 15 mars.
En Jordanie, sept malades du Covid-19, en réanimation dans un hôpital près d'Amman, sont décédés samedi à la suite d'une panne d'alimentation en oxygène, provoquant une vive émotion dans le pays.
La pandémie a fait au moins 2,64 millions de morts dans le monde depuis l'apparition de la maladie fin décembre 2019, selon un bilan établi par l'AFP.
Avec AFP