Le recteur de la grande Mosquée de Paris (GMP) a annoncé se retirer du projet de Conseil national des imams (CNI), voulu par l'Elysée et confié au Conseil français du culte musulman (CFCM), en dénonçant l'influence de "la composante islamiste" au sein du CFCM.
Le recteur de la grande Mosquée, Chems-Eddine Hafiz, a déclaré, mardi 29 décembre, dans un communiqué qu'il ne souhait plus "participer aux réunions qui visent à mettre en œuvre le projet du Conseil national des imams et de geler tous les contacts avec l'ensemble de la composante islamiste du Conseil du culte musulman (CFCM)". Il s'agit d'une décision "irrévocable", a-t-il affirmé.
La Grande Mosquée de Paris se retire du projet de création du Conseil national des imams : pic.twitter.com/mm0JLGOHEN
— Grande Mosquée de Paris (@mosqueedeparis) December 28, 2020Le projet d'un Conseil national des imams (CNI) chargé de certifier leur formation en France a été poussée avec insistance par l'Elysée dans le cadre de son projet de loi contre l'islam radical et les "séparatismes". La création d'une telle instance, maintes fois évoquée mais jamais concrétisée, avait été formellement demandée par Emmanuel Macron lors de son discours aux Mureaux présentant sa stratégie de lutte contre les "séparatismes" début octobre. La pression pour mieux encadrer l'islam de France avait encore augmenté avec l'assassinat de Samuel Paty et l'attentat de Nice.
"Des membres de la mouvance islamiste"
Ce projet a été confié au CFCM, son principal interlocuteur sur les questions d'organisation du culte musulman en France. Le CNI doit délivrer un agrément aux imams en fonction de leurs connaissances et de leur engagement à respecter un code de déontologie. Les neuf fédérations de mosquées qui composent le CFCM, régulièrement critiqué pour son manque de représentativité, devaient d'abord se mettre d'accord début décembre sur une "charte des valeurs républicaines".
"Malheureusement, la composante islamiste au sein du CFCM, notamment celle liée à des régimes étrangers hostiles à la France, a insidieusement bloqué les négociations en remettant en cause presque systématiquement certains passages importants" de la charte, a critiqué le recteur de la grande Mosquée de Paris.
Des "membres de la mouvance islamiste" auraient fait croire "que cette charte avait pour ambition de toucher à la dignité des fidèles musulmans", a détaillé Chems-Eddine Hafiz. C'est "un mensonge éhonté", a-t-il dénoncé. "J'estime que la représentation des musulmans mérite autre chose (...) que des agissements douteux entourés d'actions qui cherchent à diviser la communauté nationale et à séparer les Français de confession musulmane de leur société", écrit-il.
"Une conclusion étonnante"
En réponse, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM) a regretté mardi la décision selon lui "unilatérale et inexpliquée" de la grande Mosquée de Paris (GMP). "Une conclusion étonnante et complètement détachée de la réalité", selon Mohammed Moussaoui, qui a assuré que "tout se déroulait normalement".
Le président du CFCM a affirmé dans un communiqué que "la dernière mouture de la charte a obtenu l'approbation de l'ensemble des fédérations, y compris celle de la grande Mosquée de Paris" le 15 décembre 2020 et que les différentes fédérations devaient "confirmer solennellement par écrit avant le 30 décembre 2020 leur adhésion au texte final". Selon lui, "aucune modification" n'a été apportée au texte depuis sa validation le 15 décembre.
Mohammed Moussaoui a appelé "à installer immédiatement le Conseil national des imams et à doter ce dernier des moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission" tout en assurant qu'il souhaitait que la grande Mosquée de Paris "puisse continuer à œuvrer avec ses partenaires du CFCM".
Avec AFP