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Les négociations entre Britanniques et Européens ont fait quelques progrès mais des blocages persistent, ont indiqué lundi des diplomates européens à deux semaines de la date butoir du 31 décembre. "Il y a du mouvement, c'est bien", a salué de son côté Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. 

Les négociations entre Britanniques et Européens pour tenter d'arriver à conclure à un accord post-Brexit ont fait quelques progrès mais des blocages persistent en particulier sur le sujet hypersensible de la pêche, ont indiqué lundi 14 décembre des diplomates européens.

Le négociateur Michel Barnier a rendu compte de l'état des discussions que Londres et l'UE ont décidé, dimanche, de poursuivre, sans se fixer cette fois de date limite alors que le divorce entre l'ancien État membre et les Européens sera définitif le 1er janvier 2021.

Michel Barnier a estimé lundi sur Twitter qu'il était de la "responsabilité" de l'UE de donner aux pourparlers en vue d'un accord post-Brexit avec Londres "toutes les chances de succès".

It is our responsibility to give the talks every chance of success.

Never before has such a comprehensive agreement (trade, energy, fisheries,transport, police & judicial cooperation, etc) been negotiated so transparently and in such little time. [1/2]

— Michel Barnier (@MichelBarnier) December 14, 2020

"Les prochains jours sont importants" si l'on veut qu'un accord commercial entre les Britanniques et l'UE, soit en place au 1er janvier 2021, a-t-il indiqué.

Lors de son compte-rendu aux ambassadeurs, Michel Barnier a signalé "quelques progrès", notamment sur les conditions de concurrence équitable, mais fait état de divergences toujours importantes notamment sur le sujet de la pêche, une question cruciale pour certains États membres, selon des sources diplomatiques.

"Très loin" d'un compromis sur la pêche

Sur la pêche, "des difficultés sérieuses persistent" et "on est encore très loin" d'un compromis, selon des diplomates.

Les discussions butent depuis le départ sur trois sujets : l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques, la manière de régler les différends dans le futur accord et les conditions que les Européens exigent des Britanniques pour éviter toute concurrence déloyale.

Le ministre français de l'Économie, Bruno Le Maire, a estimé lundi que les Britanniques seraient "les grands perdants" du Brexit, qui n'amputera la richesse nationale de la France que de 0,1 point de pourcentage en 2021.

Les discussions devaient se poursuivre à Bruxelles, moins de trois semaines avant la date couperet du 31 décembre. "Beaucoup d'entre nous anticipent totalement qu'il est tout à fait possible que nous soyons obligés de retourner devant le Parlement entre Noël et le Nouvel An pour examiner tout ça et voter s'il y a un accord", a déclaré le député conservateur Mark harper, cité par l'agence britannique Press Association.

Ursula von der Leyen et Boris Johnson s'étaient promis mercredi, lors d'un dîner dans la capitale belge, de prendre une "décision ferme" sur la poursuite ou non des discussions, embourbées depuis des mois. Le Premier ministre britannique a une nouvelle fois répété que le scénario d'un "no deal", malgré ses lourdes conséquences sur les économies européenne et britannique, restait pour lui le "plus probable".

"Nous allons continuer d'essayer et nous allons essayer de tout notre cœur et nous serons aussi créatifs que possible", a-t-il cependant promis.

"Quelques jours au maximum" ?

Les équipes du négociateur européen Michel Barnier et de son homologue britannique David Frost, qui ont repris leurs échanges dimanche matin après les avoir achevées tard dans la nuit, vont donc continuer leurs tractations, pour l'instant à Bruxelles.

Une prolongation ne pourra être que "de quelques jours au maximum", avait cependant averti le secrétaire d'État français aux Affaires européennes, Clément Beaune, dans le Journal du dimanche.

Entre coups de bluff et dates butoirs non tenues, les négociations ont déjà été riches en rebondissements depuis leur lancement en mars. Et dans ce bras de fer interminable, personne n'entend jeter l'éponge en premier, pour ne pas porter la lourde responsabilité d'un échec.

La chancelière allemande, Angela Merkel, dont le pays occupe la présidence tournante de l'UE, a d'ailleurs insisté dimanche sur la nécessité de faire "tout ce qui est possible pour parvenir à un résultat".

La poursuite des discussions "est un bon signal", a estimé le ministre irlandais des Affaires étrangères, Simon Coveney, dont le pays est en première ligne en cas de "no deal".

L'eurodéputé allemand Bernd Lange, chef de la commission Commerce du Parlement européen, s'est inquiété de cette énième prolongation : "Comment les citoyens et les entreprises, 18 jours avant la fin de la période de transition, peuvent-ils être soumis à cette incertitude ?"

En dépit d'échanges toujours plus intensifs, les positions affichées sont aux antipodes, entre des Britanniques qui veulent retrouver une liberté commerciale totale et des Européens soucieux de protéger leur immense marché unique.

La Royal Navy en alerte

Signe d'un regain de tension, le ministère britannique de la Défense a annoncé que des navires de la Royal Navy se tenaient prêts à protéger les zones de pêche nationales où pourraient survenir des accrochages en cas d'absence d'accord.

Le Royaume-Uni, qui a officiellement quitté l'UE le 31 janvier, abandonnera définitivement le marché unique et l'union douanière le 31 décembre. Sans accord commercial, ses échanges avec l'UE se feront selon les seules règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), synonymes de droits de douane ou de quotas, au risque d'un nouveau choc pour des économies déjà fragilisées par le coronavirus.

L'UE est prête à offrir à Londres un accès sans droits de douane ni quotas à son immense marché. Mais elle entend dans ce cas disposer de leviers contre tout risque de dumping britannique en matière environnementale, sociale, fiscale ou sur les aides d'État. Elle veut pouvoir prendre des contre-mesures rapides, comme des droits de douane, sans attendre que le différend soit tranché par une procédure d'arbitrage classique, afin de protéger ses entreprises. Londres s'y oppose fermement.

Pragmatique, la Commission a publié jeudi des mesures d'urgence pour maintenir, en cas de "no deal", la pêche, le trafic aérien et le transport routier entre le Royaume-Uni et l'UE.

Avec AFP