Le gouvernement suédois avait refusé de confiner sa population et de fermer les commerces au printemps. Mais l'immunité collective espérée n'est pas arrivée. Face à l’augmentation des contaminations et des cas graves, les autorités ont finalement dû prendre des mesures restrictives.
Répondez à quelques questions pour participer à Europe Talks et dialoguer avec un autre Européen
"N’allez pas à la gym, n’organisez pas de dîner. Annulez !" Lundi 16 novembre, le Premier ministre suédois Stefan Löfven a annoncé des restrictions de rassemblement dans ce royaume d’Europe du Nord de 10,3 millions d'habitants. Les rassemblements publics de plus de huit personnes seront interdits à partir du 24 novembre, et pour quatre semaines au moins, a-t-il précisé.
Le gouvernement a été contraint de prendre cette mesure "très intrusive" et "sans précédent", mais "nécessaire" pour faire baisser la courbe du nombre d'infections, a justifié le Premier ministre social-démocrate, soulignant que l'épidémie allait "continuer à s'aggraver".
Depuis septembre, l’essentiel du pays est confronté à une hausse continue des cas et au retour, plus récent, des cas graves. Vendredi, date de la dernière publication du bilan de l’épidémie, près de 6 000 cas — un nouveau record quotidien – avaient été recensés, portant le total à plus de 177 000 cas. Ce jour-là, 42 décès supplémentaires avaient été annoncés, portant le bilan des décès à 6 164.
Une immunité de 7,3 % à Stockholm
Depuis le printemps, la stratégie suédoise face au coronavirus reposait sur l’affirmation de l’épidémiologiste en chef Anders Tegnell qu’en ne confinant pas sa population, la Suède parviendrait à une immunité collective. Celle-ci devait protéger le pays d’une seconde vague.
"À l’automne, il y aura une seconde vague mais la Suède aura un haut niveau d’immunité [collective] et le nombre de cas sera probablement assez bas", avait déclaré en mai le médecin au Financial Times.
Selon lui, 40 % des habitants de Stockholm – le plus gros foyer de contamination — devaient être immunisés au Covid-19 à la fin du mois de mai. Mais un rapport de l’agence suédoise de santé publique, publié le 20 mai, est venu contredire les prévisions d’Anders Tegnell. Selon les tests réalisés par les médecins de l’agence, seuls 7,3 % des habitants de Stockholm testés avaient développé des anticorps au virus fin avril.
Le gouvernement estime, lui, que la hausse du nombre de cas est liée à un moins bon respect des recommandations sanitaires qu’au printemps. "Nous ne croyons pas à un confinement total", a affirmé Stefan Löfven lundi. "Nous pensons que les mesures que nous avons prises sont appropriées", a-t-il ajouté.
"Un échec dramatique"
L’augmentation importante du nombre de malades et de cas graves depuis la fin de l’été s’est accompagnée de critiques de la part du corps médical suédois. "Jusqu’à présent, la stratégie suédoise a prouvé qu’elle constituait un échec dramatique", a déploré Lena Einhorn, une virologue suédoise citée le 12 novembre par le Financial times. "Il y a quatre jours, nous avions huit fois plus de cas par habitant que la Finlande et trois fois et demie de plus que la Norvège. Ils étaient censés avoir une situation pire que la nôtre à l'automne parce que nous étions censés avoir l'immunité [collective]".
Des professionnels du monde médical encouragent désormais le gouvernement à imposer un confinement – au moins partiel – à la population.
Dans une interview donnée à la chaîne publique SVT, Fredrik Sund, chef de la clinique des maladies infectieuses de l'hôpital universitaire d'Uppsala, la première région suédoise à recevoir des recommandations sanitaires locales il y a trois semaines, a déclaré que la Suède devrait envisager un confinement afin de gérer la deuxième vague de coronavirus.
"Nous avons vu ces dernières semaines que les restrictions ne sont pas respectées. Avec une telle augmentation des infections comme c'est le cas actuellement, c'est comme si nous étions en chute libre en Suède", a-t-il ajouté.
"C'est une période de test", a déclaré lundi le Premier ministre lors de son allocution. "Il s'agit de vos choix et des miens, chaque jour, chaque heure, chaque moment, qui détermineront la manière dont nous allons gérer cela. Faites donc le bon choix pour vous-même, pour la société et pour la Suède."