Le mouvement de protestation en Thaïlande ne faiblit pas. Ils étaient encore des dizaines de milliers dimanche à défier le pouvoir en place. Les manifestants réclament plus de démocratie, mais aussi la libération des figures du mouvement arrêtées ces derniers jours.
Pour la quatrième journée consécutive, des dizaines de milliers de manifestants pro-démocratie ont bravé dimanche 18 octobre, l'interdiction de rassemblement à Bangkok pour réclamer la démission du Premier ministre et une réforme de la monarchie.
Le plus gros rassemblement, réuni près du Monument de la Démocratie au cœur de la capitale, a chanté l'hymne national, levant trois doigts, geste de résistance emprunté au film "Hunger Games".
Les tensions du vendredi 16 octobre, où la police a évacué les protestataires à l'aide de canons à eau, n'ont pas dissuadé la contestation constituée d'une majorité de jeunes.
Plusieurs manifestants brandissaient des portraits de leaders de la contestation arrêtés ces derniers jours, dont celui de l'activiste Anon Numpa détenu à Chiang Mai (nord).
"Parler librement du roi"
"Il n'y aura pas de démocratie dans ce pays sans réforme de la monarchie", commente un jeune homme de 24 ans, sous couvert d'anonymat.
"Je veux pouvoir parler librement du roi, c'est un droit légitime", a lancé une étudiante.
Le mouvement exhorte à l'abrogation de la loi de lèse-majesté qui punit de trois à quinze ans de prison toute diffamation ou insulte envers le monarque et sa famille. Il demande aussi davantage de transparence dans les finances de la richissime monarchie et la non-ingérence du souverain dans les affaires politiques.
![Nouvelle démonstration de force du mouvement pro-démocratie en Thaïlande Nouvelle démonstration de force du mouvement pro-démocratie en Thaïlande](/data/posts/2022/07/25/1658763837_Nouvelle-demonstration-de-force-du-mouvement-pro-democratie-en-Thailande_1.jpg)
Le roi Maha Vajiralongkorn n'a pas directement commenté les événements, mais déclaré que la Thaïlande avait "besoin d'un peuple qui aime son pays".
"Si les manifestants défient la loi, les forces de l'ordre feront tout ce qui est nécessaire pour la faire appliquer", a averti le porte-parole de la police nationale.
12 coups d'État depuis 1932
Les protestataires demandent aussi la démission du Premier ministre, le général Prayut Chan-o-cha, porté au pouvoir par un coup d'État en 2014 et légitimé par des élections controversées en 2019.
Certains dénoncent son "mauvais" bilan économique alors que le pays, verrouillé depuis la pandémie de coronavirus et très tributaire du tourisme, est en pleine récession, avec des millions de personnes sans emploi.
Interdiction des rassemblements de plus de quatre personnes, proscription des publications en ligne jugées "contraires à la sécurité nationale" : les autorités ont déjà promulgué jeudi des mesures d'urgence pour tenter de briser la contestation. Elles ont motivé leur décision en dénonçant des incidents à l'encontre d'un cortège royal : des dizaines de manifestants avaient levé mercredi trois doigts devant le véhicule de la reine Suthida en signe de défi.
Le décret d'urgence promulgué est "un feu vert […] pour violer les droits fondamentaux et opérer des arrestations arbitraires en toute impunité", a déploré samedi l'ONG Human Rights Watch, alors que plusieurs dizaines d'activistes ont été arrêtés ces derniers jours.
La Thaïlande est habituée aux violences politiques, avec 12 coups d'État depuis l'abolition de la monarchie absolue, en 1932. Certains observateurs relèvent qu'une nouvelle prise du pouvoir par les militaires pourrait être envisageable si la situation devait perdurer.
Avec AFP