
Les juges d'instruction chargés de l'affaire Adama Traoré ont ordonné une nouvelle expertise médicale après l’audition de nouveaux témoins. Médiatisée par la famille, l’affaire de ce jeune homme noir mort en 2016, après son interpellation par la police, a été érigée en symbole des violences policières en France.
Quatre ans après la mort d’Adama Traoré, jeune homme noir décédé après une interpellation policière, la bataille d’experts continue. Les juges d'instruction chargés de l'affaire ont "demandé une nouvelle expertise médicale", ont annoncé, vendredi 10 juillet, les avocats des gendarmes.
"À la suite de l'audition" par les juges d'instruction le 2 juillet, "du témoin chez qui Adama Traoré s'était réfugié, (les magistrats enquêteurs) ont décidé, par ordonnance de procéder à une nouvelle mesure d'expertise médicale confiée à des médecins belges", ont rapporté Me Rodolphe Bosselut, Pascal Rouiller et Sandra Chirac Kollarik, avocats des gendarmes, dans ce communiqué.
Le 19 juillet 2016, Adama Traoré est mort dans la caserne des gendarmes de Persan, près de deux heures après son arrestation dans sa ville de Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise) et au terme d'une course-poursuite, après avoir échappé à une première interpellation. La mort du jeune homme noir a été érigée par la famille et ses proches en symbole des violences policières. Organisés en collectif, ces derniers demandent que la lumière soit faite sur les circonstances de sa mort.
Des témoignages qui relancent l’enquête
Des investigations complémentaires ont été décidées après l'audition de deux témoins la semaine passée par les juges d'instruction chargés de ce dossier. Il s'agit de l'homme chez qui Adama Traoré s'était réfugié juste avant son arrestation par trois gendarmes et d'une femme qui avait assisté à sa première interpellation.
Les avocats des gendarmes, qui n'ont pas été mis en examen, avaient annoncé la semaine passée qu'ils allaient demander la clôture de l'instruction, estimant qu'il était "temps de mettre un terme à ce dossier" où figurent "plus de 2 400 procès-verbaux".
Les deux auditions ont conduit "les magistrats instructeurs à ordonner spontanément des investigations. Ces nouveaux actes montrent que la demande de clôture de l'instruction des gendarmes est rejetée", s'est félicité Me Yassine Bouzrou, l'avocat de la famille Traoré.
"Ces investigations ne me paraissent pas essentielles. Elles concernent la première interpellation dont les circonstances ont déjà été établies", a souligné pour sa part Me Rodolphe Bosselut, l'un des avocats des gendarmes.
Une bataille d’experts
Près de quatre ans après les faits, l'enquête judiciaire est avant tout devenue une bataille d'expertises médicales. Closes en décembre 2018, les investigations avaient été rouvertes par les juges en mars 2019, après la remise d'un rapport médical réalisé à la demande de la famille qui contredisait les conclusions sur le décès.
Si sept experts missionnés par la justice ont jusqu'ici mis en avant des antécédents médicaux — notamment cardiaques et génétiques — pour expliquer ce décès, dédouanant ainsi les gendarmes, les rapports de quatre médecins choisis par la famille ont balayé leurs conclusions et pointé la technique d'interpellation des forces de l'ordre.
Après une ultime expertise judiciaire qui mettait hors de cause les militaires, la famille du jeune homme a réalisé depuis fin mai de nombreuses demandes d'actes, dont l'annulation de cette expertise.
Avec AFP