La mort de Marie-Christine Hodeau, tuée par un violeur récidiviste, relance le débat sur la castration chimique. Le Premier ministre veut rendre plus "contraignante" la possibilité pour la justice de recourir à ce traitement hormonal.
Le meurtre de Marie-Christine Hodeau, assassinée lundi 28 septembre 2009 dans la forêt de Fontainebleau, "aurait pu être évité", a assuré le Premier ministre François Fillon lors de la présentation de son plan de prévention de la délinquance dans les Hauts-de-Seine, vendredi 02 octobre.
Si le Premier ministre est si formel, c'est qu'il n’exclut "aucune réflexion sur aucun sujet". Et d’entrer dans le vif du sujet : il souhaite rendre plus "contraignante" la possibilité pour la justice de recourir à la castration chimique. Le débat est ouvert.
La castration chimique, qui joue un rôle de "frein" sur la libido, est l’un des thèmes qui ressort de manière récurrente dans le discours gouvernemental depuis 2002, sans manquer de soulever la polémique au sein de la classe politique.
Dissensions au sein de la majorité
Expérimentée au début des années 2000, la castration chimique est proposée aux détenus depuis une loi de décembre 2005. Amendé en 2007, le texte stipule qu'en cas d'abandon de ce traitement hormonal, à renouveler tous les trois mois, ils ne peuvent prétendre à la liberté conditionnelle.
Les aveux du meurtrier présumé de Marie-Christine Hodeau, Manuel de Cruz, déjà condamné à 11 ans de réclusion pour viol sur mineure en 2000 et libéré en conditionnelle en 2007 - avant le terme théorique de sa peine, ravive la volonté de certains d’aller plus loin.
La ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie, appuyée par le Premier ministre, a proposé jeudi 1er octobre une loi imminente pour étendre "après l'incarcération" la prise régulière de médicaments afin d'inhiber les pulsions sexuelles.
Le député UMP Yves Nicolin compte, quant à lui, déposer une proposition de loi visant à imposer une castration chimique aux violeurs de mineurs de 13 ans, une initiative qui est loin de faire l'unanimité dans la majorité, où plusieurs élus s'interrogent sur l'opportunité de légiférer sous le coup de l'émotion.
La gauche divisée
A gauche aussi, le sujet divise profondément. Aucunement "une solution miracle" pour le PCF, "déplorable" et "indécent" selon le porte-parole du PS, Benoît Hamon, le projet semble en revanche acceptable pour Ségolène Royal. "Cela existe dans certains pays. Tout ce qui va dans le sens d'empêcher les prédateurs sexuels de récidiver doit être proposé", a avancé Ségolène Royal, se démarquant de son parti.
Député PS de Paris et président du conseil d'administration de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Jean-Marie Le Guen estime aussi que la castration chimique pouvait être "tout à fait envisagée", mais seulement dans "le cadre du volontariat".
Le volontariat prévaut
Volontaire ou obligatoire ? La question se pose encore pour certains hommes politiques tel que Frédéric Lefèbvre, porte-parole de l’UMP : "Que l'on débatte de savoir si c'est obligatoire ou volontaire, pourquoi pas ? Mais que l'on rejette cette idée par principe, c'est cela qui est indécent et irresponsable", commente-t-il dans un communiqué.
Pour Jean-Marie Le Guen, le débat n'a pas lieu. Le médecin va dans le sens d’un certain nombre de spécialistes qui estiment que le dispositif, qui repose sur des traitements médicamenteux antihormonaux réversibles, doit être volontaire pour être efficace, et s'accompagner d'une psychothérapie.
"75 à 80 % des délinquants sexuels ne récidivent pas", rappelle l'expert criminologue Roland Coutanceau, qui suggère de se concentrer sur les récidivistes et souhaite la création d'un centre de recherche et de soins consacré aux délinquants sexuels.
"L’effet obtenu est extrêmement encourageant. (..) L'administration de ces traitements ne peut se faire en dehors du consentement du patient", rappelle ce chercheur.