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Après trois mois de crise sanitaire due à la pandémie de coronavirus, médecins, aides-soignants et infirmiers ont battu le pavé une nouvelle fois un peu partout en France, mardi, pour rappeler le gouvernement à ses promesses sur l'hôpital, en plein "Ségur de la santé".

"Finis les applaudissements, place aux rassemblements." Des médecins, aides-soignants et infirmiers ont manifesté partout en France, mardi 16 juin, pour faire pression sur l'exécutif et lui rappeler les promesses faites pendant trois mois de crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19. Et ce, alors que le gouvernement se retrouve en plein "Ségur de la santé", destiné à refonder le système de santé français.

Les soignants, en majorité des infirmières, sont sortis en bloc : 18 000 à Paris, 7 500 à Toulouse, au moins 4 000 à Bordeaux et 3 500 à Marseille, entre 4 000 et 5 000 à Strasbourg, 2 600 à Montpellier, 2 400 à Tours, 1 980 à Rouen, 1 500 à Caen, 1 400 à Cherbourg, 1 300 à Rennes, mais aussi 800 à Gap, 1 200 à Chambéry, 1 300 à Ajaccio, 5 500 à Nantes, 3 800 à Grenoble et 6 000 à Lyon, selon la police.

« je n’ai pas eu le covid mais vous m’avez transmis la rage » parmi les slogans #soignants #manif16Juin #Paris pic.twitter.com/oaPZluS3OF

— Assiya Hamza (@Missiya) June 16, 2020

Des débordements à Paris

Paris, où le cortège parti du ministère de la Santé a rejoint en milieu d'après-midi l'esplanade des Invalides, des échauffourées ont éclaté en fin de parcours. Les forces de l'ordre répliquaient à des jets de projectiles par des tirs de gaz lacrymo contre 100 à 200 manifestants violents, parmi lesquels des "antifas" et des blackblocs, selon un journaliste de l'AFP. Des véhicules ont aussi été renversés, selon la préfecture de police, qui faisait état sur Twitter de "groupes violents tentant de faire dégénérer la manifestation pacifique des soignants".

De source policière, 250 à 300 casseurs, parmi lesquels des "ultra-jaunes", en pré-cortège, se sont mis en action dès l'arrivée aux Invalides. La police faisait état à 17 h de 24 interpellations. Des affrontements entre casseurs et policiers ont également eu lieu à Lille, en marge du cortège, auquel participait la maire sortante Martine Aubry (PS), mais aussi à Toulouse et à Nantes.

Une personne à terre, en pls sur la pelouse de l’esplanade des Invalides alors que des fumées noires s’élèvent #manif16Juin #BlousesBlanches #paris pic.twitter.com/17FKb7I1eB

— Assiya Hamza (@Missiya) June 16, 2020

"Les médailles en chocolat et les promesses ne suffiront pas"

L'objectif de ces rassemblements était de mettre à profit le soutien engrangé auprès de la population pendant la crise sanitaire afin d'obtenir des avancées pour les salariés des hôpitaux et des Ehpad. Ceux-ci ont été salués comme des "héros en blouse blanche" par le chef de l'État au début de l'épidémie.

"Les discours lénifiants du gouvernement, les médailles en chocolat et les promesses de primes aléatoires et hypothétiques ne suffiront pas. Désormais il faut de véritables moyens humains et budgétaires pour la santé publique", avait prévenu la CGT dans un communiqué.

Les soignants, en première ligne face au Covid-19, réclament un "plan de recrutement" et une "revalorisation générale des salaires", de l'ordre de 300 à 400 euros selon les syndicats. Ils souhaitent "l'arrêt de toutes les fermetures d'établissements, de services et de lits".

"Après 14 mois de mobilisation et une crise sanitaire, un retour à 'l'anormal' est inenvisageable. Pour les usagers, ce n'est plus le temps d'applaudir les soignants mais de soutenir nos revendications", insiste le Collectif Inter-Hôpitaux, fer de lance d'un mouvement engagé voilà un an.

"Finis les applaudissements" : les soignants de retour dans la rue après le Covid-19

"Réponses concrètes maintenant"

Cette journée de mobilisation, point d'orgue d'une série d'actions menées ces dernières semaines à l'hôpital, dans le cadre notamment des "mardis de la colère", intervient en plein milieu du "Ségur de la santé", lancé le 25 mai par le Premier ministre, Édouard Philippe.

Cette concertation, pilotée par Nicole Notat et destinée à refonder le système de santé français, doit aboutir d'ici début juillet à des propositions concrètes. Mais aucun chiffre n'a à ce stade été mis sur la table, notamment pour les hausses de salaires.

Une source d'exaspération pour les syndicats. "Les organisations syndicales ne peuvent pas travailler dans l'improvisation constante et en l'absence de moyens alloués", ont déploré une dizaine d'organisations médicales, dont la Fédération des médecins de France (FMF), dénonçant un "faux-semblant".

"La méthodologie du Ségur de la santé pose problème", a abondé le Collectif Inter-Hôpitaux, en regrettant "l'absence de transparence dans la conduite des travaux". "Des réponses concrètes doivent être apportées maintenant", a-t-il insisté.

Dans ce contexte, un syndicat, Sud Santé, a décidé de claquer la porte des discussions, dénonçant une "vaste opération de communication". Ce geste n'a pas fait d'émule pour l'instant mais d'autres organisations ont fait planer la menace d'un départ.

Majoration des heures supplémentaires à l'hôpital, payées avant septembre

Interrogé lundi sur LCI, le ministre de la Santé Olivier Véran s'est voulu rassurant. "On travaille, on avance", a-t-il déclaré, en indiquant que "plus de cent consultations au niveau national" avaient été effectuées depuis le début du Ségur.

Hasard du calendrier ? Le gouvernement a publié ce week-end des décrets entérinant le versement d'une prime exceptionnelle de 1 000 à 1 500 euros pour les salariés des Ehpad, et une majoration de 50 % des heures supplémentaires effectuées à l'hôpital, qui seront payées avant septembre.

Concernant les hausses de salaire promises dans le cadre du Ségur, "le rendez-vous est fixé" avec les soignants, a par ailleurs rappelé lundi Olivier Véran. "D'ici à début juillet, ils auront toutes les réponses aux questions qu'ils posent et aux revendications qu'ils portent légitimement."

Avec AFP