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Alors que plus de 3,4 milliards d'humains sont soumis à des mesures de confinement jamais vues, des chanteurs, compositeurs et instrumentistes du monde entier continuent de pratiquer leur art afin de porter la musique hors les murs. De Varsovie à Caracas, en passant par Paris et les réseaux sociaux, tour du monde des initiatives musicales qui tentent de "faire fi" du confinement.

Depuis le balcon de son appartement parisien, Camilo Peralta, violoncelliste à l'Orchestre national d'Île-de-France, interprète les suites de Bach pour ses voisins. Une manière, pour lui, de "créer du lien" en cette période trouble de confinement généralisé dû à la propagation rapide de l'épidémie du coronavirus. "C'est un moment particulier, c'est un moment de partage parce que je me suis rendu compte que les voisins aimaient beaucoup, affirme-t-il. Ils sortent quand je sors, ils commencent à m'applaudir et à la fin de chaque danse, ils applaudissent. Moi ça me fait plaisir, ça leur fait plaisir donc je continue, on voit à quel point c'est important et nécessaire, la musique."

C'est aussi depuis son balcon, à Varsovie, que le ténor polonais Michal Janicki, 29 ans, organise pour ses voisins des concerts d'opéra où il interprète, entre autres, Mozart, Donizetti et Bellini. "La réaction des gens a dépassé toutes mes attentes !, confie-t-il. Ces concerts étaient prévus pour un tout petit public, je m'attendais juste à quelques voisins sur leurs balcons ou à leurs fenêtres. Lors du premier concert, le 19 mars, il y a eu beaucoup de monde aux fenêtres ainsi que quelques dizaines de personnes au pied de l'immeuble."

De l'autre côté de l'Atlantique, à Caracas, le jeune Vénézuélien Zandu Montoya pousse lui aussi la chansonnette pour le voisinage. Depuis sa petite terrasse, il joue à la guitare des morceaux destinés à "divertir les gens", mais aussi leur "apporter un bon message par rapport à ce qui se passe maintenant dans le monde". Au début, pourtant, ses élans vocaux n'ont pas été du goût de tous. "La première fois que j'ai essayé de chanter depuis le balcon, les voisins m'ont dénoncé, raconte-t-il. La police est venue mais, heureusement, elle a compris et m'a laissé continuer, mais j'ai dû baisser un peu le volume."

Une symphonie par e-mail

Plus ambitieux, d'autres musiciens continuent de jouer ensemble malgré la distance. Alors qu'il devait effectuer une tournée dans toute l'Europe avec l'Orchestre symphonique d'Anvers, le compositeur et interprète britannique John Miles a mis en ligne, lundi 30 mars, un clip vidéo dans laquelle lui et une soixantaine d'instrumentistes jouent "Music", la chanson phare de leur spectacle. "J'ai enregistré ma partie dans dimanche dernier, explique-t-il. Les gens de l'orchestre – je ne sais pas combien ils étaient, peut-être plus de 70 personnes, plus une chorale, plus la section des cors – envoyaient leur partie par e-mail et tout était très bien organisé."

Pour le musicien, continuer à travailler est une manière de briser le silence provoqué par la mise sous cloche d'une grande partie de la planète. "En raison de la crise du coronavirus, le monde de la musique est suspendu et il restera silencieux pendant un certain temps, mais l'orchestre d'Anvers continue de jouer à distance", se félicite-t-il.

Même procédé du côté de l'Orchestre national de France (ONF). Lundi 30 mars, l'institution a elle aussi diffusé sur Internet une "interprétation confinée" du "Boléro" de Maurice Ravel. Une cinquantaine d'instrumentistes, confinés chez eux, ont filmé leur partition avant d'être "réunis" dans une seule et même vidéo reproduisant le célèbre morceau.

Dans la période délicate que nous traversons, les musiciens de l'Orchestre national de France ont souhaité, malgré la distance, "jouer ensemble pour offrir et partager avec chacun ce qu'ils savent le mieux faire : de la musique, a écrit l'ONF. En espérant que ces quelques notes de Ravel, universelles, vous apporteront un peu de chaleur et de réconfort."