Pour la première fois en France, la Cour de cassation a annoncé mercredi la requalification en contrat de travail de la relation contractuelle entre la société Uber et un de ses anciens chauffeurs. Un verdict historique qui pourrait ouvrir la voie à d'autres requalifications.
C'est une première en France. La Cour de cassation a validé mercredi 4 mars la requalification en contrat de travail du lien entre Uber et un de ses anciens chauffeurs. Cette décision inédite pourrait faire bouger les lignes dans le débat sur le statut des travailleurs des plateformes.
Dans un communiqué, la Cour estime qu'il existe un lien de subordination entre le chauffeur et la plateforme de mise en relation entre clients et chauffeurs de VTC et que le statut de travailleur indépendant du chauffeur est "fictif".
Elle explique que les critères définissant un travail indépendant "tiennent notamment à la possibilité de se constituer sa propre clientèle, la liberté de fixer ses tarifs et la liberté de définir les conditions d'exécution de sa prestation de service".
Or, ajoute-t-elle, "le chauffeur qui a recours à l'application Uber ne se constitue pas sa propre clientèle, ne fixe pas librement ses tarifs et ne détermine pas les conditions d'exécution de sa prestation de transport".
La Cour de cassation avait été saisie par un homme ayant exercé une activité de chauffeur via Uber entre octobre 2016 et avril 2017, date à laquelle la plateforme a désactivé son compte. Il demandait la requalification de sa relation contractuelle avec Uber en contrat de travail.
Interrogé par l'AFP, Fabien Masson, l'avocat du chauffeur, s'est félicité de cette "jurisprudence" qui vise "le numéro un des plateformes VTC". "C'est une première et ça va concerner toutes les plateformes qui s'inspirent du modèle Uber", a-t-il estimé.

Une affaire historique
De son côté, une porte-parole d'Uber a affirmé que "c'est la seule et unique affaire en requalification que nous ayons jamais perdue en France". "Cette décision ne reflète pas les raisons pour lesquelles les chauffeurs choisissent d'utiliser l'application Uber", à savoir "l'indépendance et la flexibilité", a-t-elle expliqué.
"Au cours des deux dernières années, nous avons apporté de nombreux changements pour donner aux chauffeurs encore plus de contrôle sur la façon dont ils utilisent l'application, ainsi qu'une meilleure protection sociale", a-t-elle encore affirmé.
L'ancien chauffeur d'Uber va désormais pouvoir faire valoir ses demandes de rappels de salaire et d'indemnités de rupture de contrat devant les prud'hommes.
Les chauffeurs des plateformes "vont bénéficier de cette décision", assure son avocat, Fabien Masson. Il leur conseille d'ailleurs d'envoyer un courrier aux plateformes pour demander à "bénéficier de cette jurisprudence".
La Cour de cassation avait déjà établi en novembre 2018, pour la première fois, un lien de subordination entre une plateforme et un de ses travailleurs. Il s'agissait alors de Take Eat Easy, une société de livraison de repas par des coursiers à vélo qui avait été liquidée.
Avec AFP et Reuters