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Au 90e jour de contestation, les Libanais sont de nouveau descendus dans les rues de la capitale Beyrouth pour protester contre la crise économique et le retard pris dans la formation d'un nouveau gouvernement. Des heurts ont éclaté en soirée devant la Banque centrale entre police et manifestants.

Barricades en feu, routes bloquées, rassemblements… Au 90e jour d'un mouvement de contestation sans précédent, les Libanais sont de nouveau dans la rue. Ils continuent de protester contre la crise économique et financière, qui s’est dégradée ces dernières semaines. Ils dénoncent notamment une pénurie de dollars, qui a conduit les banques à réduire drastiquement les retraits et les transferts à l’étranger. En outre, des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur emploi ou vu leur salaire divisé par deux. 

"Nous avons recommencé à fermer des routes parce que nous n'en pouvons plus", a expliqué auprès de l'AFP Laila Youssef, une manifestante de 47 ans dans le quartier de Furn el-Chebbak, à Beyrouth. 

"Juger ces 128 voyous"

"Les Libanais meurent de faim parce que le taux de change pour le dollar a doublé pour tout le monde, tout comme le prix du paquet de pain qui coûte maintenant 2 000 livres libanaises, fustige de son côté Elie Zghaib, un manifestant. Le prix du paquet de cigarettes locales a également doublé à 2 000 livres libanaises. Je voudrais savoir pourquoi les dirigeants sont toujours à leur place. Nous les jugerons, ces 128 voyous [en référence aux 128 députés, NDLR]."

#Liban: Les contestataires sont de nouveau descendus dans la rue pour protester????contre le retard pris pour former un nouveau gouvernement et surtout s'insurger contre l'effondrement économique qui mine le pays????.

Pour beaucoup, le changement tarde!✌️https://t.co/mLrxjfmGvm ???????? pic.twitter.com/J30STmCMYN

— Ghassan Basile (@gnbasile) January 14, 2020

Des heurts ont éclaté en soirée devant la Banque centrale entre police et manifestants. Les policiers anti-émeutes munis de matraques et de boucliers ont tiré des gaz lacrymogènes et chargé les centaines de manifestants rassemblés devant l'institution située à Beyrouth, les contraignant à reculer après que certains ont tenté d'entrer sur l'esplanade bouclée devant le bâtiment, a rapporté une correspondante de l'AFP.

Certains contestataires ont cassé des pavés pour les lancer sur les forces de l'ordre, certains manifestants distribuant des oignons pour se protéger des gaz, selon la même source. Ils ont également brisé et vandalisé les façades en verre de plusieurs banques, qui cristallisent une grande partie de la colère publique notamment en raison des restrictions sur les retraits en dollars, sur fond de crise économique.

Les forces de sécurité intérieure sur Twitter ont dénoncé des "attaques" menées par des "émeutiers" qui ont jeté des pierres et tiré des pétards contre la police.

Un nouveau gouvernement peine à voir le jour

Depuis le 17 octobre, les manifestants réclament le départ de la classe dirigeante, accusée de corruption, et la formation d’un nouveau gouvernement. "Aujourd'hui, cette colère contre la classe politique s’est propagée dans toutes les villes, pas seulement [à Beyrouth], parce que les dirigeants retardent la formation d'un nouveau gouvernement et ne prennent pas en compte les demandes du peuple", explique Khodor Anwar, un protestataire.

Le Liban est sans gouvernement depuis la démission fin octobre du Premier ministre Saad Hariri. Et malgré la nomination le 19 décembre de son remplaçant, Hassan Diab, un nouveau cabinet peine à voir le jour. La rue réclame que ce dernier ne soit composé que de technocrates indépendants. 

Dans ce contexte de crise, le chef de l'État Michel Aoun a promis, mardi 14 janvier, "de poursuivre tous les efforts possibles pour former un gouvernement [...] doté d'un plan défini et rapide pour gérer la crise économique et financière pressante". Il a également indiqué que le gouvernement aurait dû voir le jour la semaine dernière, mais que "certains obstacles" avaient entravé son accouchement.