
Venise a connu un nouveau pic de marée haute vendredi, trois jours après avoir été dévastée par des inondations qui ont conduit Rome à décréter l'état d'urgence dans la Cité des Doges. La place Saint-Marc est fermée au public. Le point en images.
À Venise, l’eau a englouti les trottoirs, envahi l’intérieur des échoppes, condamné les églises et les musées. Le sol de la Basilique Saint-Marc et du théâtre de la Fenice sont englués dans une eau boueuse et salée venue de la lagune. Vendredi 15 novembre, de fortes averses et du vent étaient de nouveau annoncés dans le nord-est de l'Italie. Même la célèbre place Saint-Marc est fermée sur ordre du maire, afin dit-il, d’"épargner aux citoyens de Venise tout risque sanitaire, un désastre".
Cette inondation de la ville était déjà d’une ampleur exceptionnelle mardi dernier – lorsque la marée appelée "acqua alta" avait atteint 1,87 mètres le soir, le deuxième record historique derrière celui du 4 novembre 1966 (1,94 m). Le gouvernement italien avait alors décrété l'état d'urgence pour catastrophe naturelle dans la Cité des Doges.
Vendredi, la cité a connu un nouveau pic de marée. Les premières photos envoyées par les agences donnent une idée de l’ampleur de cette montée des eaux.
Cornelia Litschauer, une Autrichienne de 28 ans interrogée par l’AFP, juge cette situation "étrange" : "les touristes prennent des photos mais la ville souffre". La plupart des visiteurs sont peu au fait du risque d'engloutissement que court la ville, bâtie sur 118 îles et îlots en majorité artificiels et sur pilotis. Elle s'est enfoncée de 30 cm dans la mer Adriatique en un siècle.
La question de la survie de la cité vénitienne concerne en premier lieu les habitants et les commerçants, qui dépendent quasi-exclusivement du tourisme : la cité lacustre la plus célèbre du monde est parcourue par 36 millions de touristes tous les ans, dont 90 % d'étrangers. Les hôtels déplorent les annulations. Les commerces et particuliers doivent évaluer les dégâts.
La politique locale est également visée par les critiques. Les écologistes montrent du doigt l'expansion du grand port industriel de Marghera, situé en face sur la terre ferme, et le défilé des bateaux de croisière géants.
L’affaire devient nationale aussi, et les responsables les plus en vue affluent au chevet de la Sérénissime : l'ancien Premier ministre Silvio Berlusconi s'y est rendu jeudi, l'ex-ministre de l'Intérieur, Matteo Salvini, y était attendu vendredi. Quant au Premier ministre, Giuseppe Conte, il a parcouru la cité et "approuvé l'état d'urgence à Venise", ajoutant que 20 millions d'euros allaient être débloqués "pour les interventions les plus urgentes".
Cette procédure, souvent utilisée dans une Italie régulièrement frappée par des désastres (séismes, éruptions volcaniques et glissements de terrain), dote le gouvernement de "pouvoirs et moyens exceptionnels".
De nombreux responsables dont le maire de Venise, Luigi Brugnaro, ont appelé à mettre en service "au plus vite" le projet de digues MOSE (Moïse en italien, acronyme de Module expérimental électromécanique). "Cet ouvrage d'ingénierie va finir par coûter six milliards d'euros, il faut le faire fonctionner", a estimé la ministre des Infrastructures, Paola de Micheli.
Lancé en 2003 et retardé par des malfaçons et des enquêtes pour corruption, Moïse s'appuie sur 78 digues flottantes qui se relèvent et barrent l'accès à la lagune en cas de montée des eaux de l'Adriatique jusqu'à trois mètres de hauteur. De récents tests ont permis d'identifier des vibrations et de la rouille mais, selon M. Conte, il est "prêt à 93 %" et sera "achevé au printemps 2021".
Avec AFP
