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Malgré les menaces d'intervention de Pékin, des milliers de manifestants prodémocratie ont de nouveau défilé samedi à Hong Kong, où des milliers de partisans progouvernementaux se sont également rassemblés pour la première fois.

Le mouvement prodémocratie hongkongais aborde un week-end crucial au cours duquel il va à nouveau tenter de rassembler les foules après avoir été critiqué pour les violences survenues mardi à l'aéroport, sur fond de menace d'intervention chinoise. Il s'agit du plus grand défi posé à la souveraineté de Pékin sur sa région semi-autonome et le gouvernement central a musclé son discours, assimilant au "terrorisme" les actions les plus violentes du mouvement.

Les médias publics chinois ont diffusé des images de militaires et de blindés massés à Shenzhen, ville voisine de Hong Kong. Washington a mis en garde la Chine contre une intervention qui, aux yeux des experts, serait pour Pékin désastreuse en termes d'image ou de conséquences économiques.

Des milliers de manifestants prodémocratie ont ainsi de nouveau défilé samedi à Hong Kong avant de se disperser en début de soirée, réservant leur énergie pour un rassemblement prévu dimanche qu'ils espèrent massif et pacifique, convoqué par une organisation non violente.

Plusieurs milliers de partisans progouvernementaux s'étaient, eux aussi, rassemblés samedi après-midi dans un parc pour critiquer le mouvement prodémocratie et soutenir la police, une illustration frappante des divisions qui se creusent dans la ville.

Le quotidien nationaliste anglophone Global Times a assuré vendredi qu'une éventuelle intervention armée à Hong Kong ne serait pas une répétition du carnage commis en juin 1989 à Tiananmen par les militaires. "L'incident à Hong Kong ne sera pas une répétition de l'événement politique du 4 juin en 1989", indique le journal chinois dans une allusion inhabituelle à la répression de Tiananmen, sujet tabou dans le pays.

Selon notre envoyé spécial, Antoine Védeilhé, une première manifestation pacifique a rassemblé samedi le corps enseignant dans les rues de Hong Kong. De son côté, Pékin continue sa démonstration de force. Des milliers de militants prochinois se sont rassemblés sur l’île dans un autre quartier de la ville, pour défendre l'action du gouvernement.

À Hong Kong, un nouveau week-end de manifestations sous tension

Les deux camps – prodémocratie et progouvernemental – étaient également représentés dans des manifestations à Paris, avec une cinquantaine de pro et autant d'anti-Pékin. À Londres également, un millier de manifestants ont défilé.

L'Union européenne a lancé un appel à un "dialogue large et inclusif" afin de "désamorcer la situation" à Hong Kong, estimant essentiel de "faire preuve de retenue et de rejeter la violence".

Un grand rassemblement dimanche

Les manifestants prévoient pour dimanche un grand rassemblement qui se veut "rationnel, non violent", afin de montrer que la mobilisation demeure populaire malgré les violences qui ont émaillé la fin de l'action à l'aéroport.

Après des journées dans le hall des arrivées à sensibiliser pacifiquement les personnes atterrissant à Hong Kong, la mobilisation a pris un tour conflictuel mardi quand des manifestants ont empêché des voyageurs en partance d'embarquer, puis agressé deux hommes accusés d'être des espions de Pékin. L'appareil de propagande chinois a sauté sur l'occasion, les médias publics se déchaînant sur la violence des manifestants.

L'appel à manifester dimanche a été lancé par le Front civil des droits de l'Homme, organisation non violente à l'origine des manifestations géantes de juin et juillet. "La marche de dimanche devrait encore rassembler un million de personnes. Le peuple hongkongais ne peut pas être battu", a déclaré sur Facebook la députée prodémocratie Claudia Mo.

Risque d'échauffourées

Mais le risque de nouvelles échauffourées est réel. D'autres manifestants ont appelé à des rassemblements samedi à Hung Hom et To Kwa Wan, quartiers du front de mer prisés des touristes venant de Chine continentale. Ces deux manifestations n'ont pas été autorisées. Et si la police a donné son feu vert au rassemblement de dimanche dans un grand parc de l'île de Hong Kong, elle a interdit aux manifestants de défiler dans la rue.

Ce genre d'interdiction a presque systématiquement été ignoré par les manifestants ces dernières semaines et les marches ont donné lieu à des heurts avec les forces de l'ordre.

Réaction de Donald Trump

Après être resté silencieux pendant des semaines, ce qui lui a valu d'être accusé d'être bienveillant envers le régime chinois, le président américain Donald Trump a commencé cette semaine à se dire inquiet de la tournure des événements dans l'ex-colonie britannique, sur fond de guerre commerciale avec Pékin.

Interrogé sur les risques de répression violente, il a annoncé jeudi qu'il devait en parler "bientôt" avec son homologue chinois Xi Jinping, exhortant Pékin à "résoudre humainement le problème". Mais il a estimé que Xi Jinping pourrait aussi, s'il rencontrait des représentants des manifestants, "résoudre le problème rapidement", "en quinze minutes".

Les grandes fortunes appelées à soutenir Pékin

Pékin serre la vis à toute entreprise soupçonnée de sympathie pour le mouvement prodémocratie, à l'instar de la compagnie aérienne Cathay Pacific dont le directeur général, Rupert Hogg, a démissionné vendredi. Les grandes fortunes de Hong Kong ont également été invitées à s'aligner sur la position gouvernementale, et certains ont ainsi appelé la fin des manifestations.

L'homme le plus riche de Hong Kong, Li Ka-shing, a affiché dans la presse vendredi une opinion beaucoup plus subtile, s'appuyant sur des vers de poésie classique et un langage à plusieurs niveaux de lecture pour appeler à la paix.

Avec AFP