Le Conseil d'État a validé l'interruption des soins de Vincent Lambert, dans un état végétatif et tétraplégique depuis 2008. Les parents dénoncent "une euthanasie déguisée" de leur fils, qu'ils considèrent comme lourdement handicapé.
Environ 200 personnes ont manifesté sous la pluie, dimanche 19 mai, devant l'hôpital Sébastopol de Reims pour demander "la vie pour Vincent". L'interruption des soins de Vincent Lambert, en état végétatif et tétraplégique depuis un accident de la route en 2008, est prévue cette semaine, a indiqué le médecin à sa famille. Selon une source proche du dossier, elle pourrait ne pas être mise en œuvre avant mardi.
L'arrêt des soins, validé par le Conseil d'État fin avril, prévoit l'arrêt des machines à hydrater et alimenter ainsi qu'une sédation "contrôlée, profonde et continue" de cet ancien infirmier âgé aujourd'hui de 42 ans. Une prise d'analgésiques est également prévue "par précaution".
Présents lors de la manifestation, ses parents ont dénoncé une "euthanaise déguisée". Viviane, 73 ans, et Pierre, 90 ans, qui considèrent leur fils comme lourdement handicapé, espèrent toujours suspendre la décision par de "nouveaux recours". À ce titre, ils réclament son transfert dans un établissement spécialisé.
Trois recours dès lundi
Les avocats des parents, Mes Paillot et Triomphe, ont promis "trois nouveaux recours dès lundi", refusant d'en dire plus. Ils mettent en avant notamment le dernier rapport d'experts mandatés par la justice, rendu fin 2018. Ces derniers avançaient que la condition médicale de Vincent Lambert "n'appelle aucune mesure d'urgence" et qu'"il existe en France des structures pouvant l'accueillir jusqu'à sa disparition si le maintien au CHU de Reims s'avérait impossible pour des raisons autres que relevant de la simple technique médicale".
Ces mêmes experts affirmaient toutefois que son "état végétatif chronique irréversible" ne lui laisse plus "d'accès possible à la conscience".
Les avocats réclament aussi la radiation et des poursuites à l'encontre du docteur Vincent Sanchez, qui dirige le service des soins palliatifs et l'unité "cérébrolésés" de l'hôpital Sébastopol. C'est lui qui leur a annoncé l'arrêt des traitements pour la semaine du 20 mai.
L'euthanise s'imisce dans la campagne européenne
Samedi, Me Jean Paillot et Me Jérôme Triomphe ont imploré Emmanuel Macron de maintenir les traitements, qualifiant la mort programmée du patient de "crime d'État commis au prix d'un coup de force contre l'État de droit". "Le président de la République ne veut pas aller à l'encontre de décisions de justice", a répondu Nathalie Loiseau, tête de liste de la majorité aux élections européennes.
"Pourquoi cette précipitation pour le conduire vers la mort ?", s'est étonnée la Conférence des évêques. François-Xavier Bellamy, tête de liste LR aux élections européennes, a également demandé qu'on "se laisse le temps".
Père de la loi de 2016 régissant la fin de vie, Jean Leonetti, également premier vice-président LR, estime au contraire que l'arrêt des soins de Vincent Lambert s'inscrit bien "dans le cadre de la loi", affirmant que "dans les hôpitaux, presque 60 % des patients lorsqu'ils meurent, ils meurent après une limitation ou un arrêt des traitements."
Une famille déchirée
Vincent Lambert est devenu, malgré lui, le symbole du débat sur la fin de vie qui déchire sa famille depuis six ans : d'un côté, les parents fervents catholiques, qui ont multiplié en vain les recours depuis que la plus haute juridiction a validé la procédure d'arrêt des soins, demandée par le CHU en avril 2018. La quatrième depuis 2013. Un de ses frères et une de ses sœurs s'opposent également à l'arrêt des soins.
De l'autre, son épouse Rachel, son neveu François et cinq frères et sœurs du patient veulent mettent fin à cet "acharnement thérapeutique". S'il n'a pas laissé de directives anticipées, son épouse et son neveu affirment qu'il avait pris position contre tout acharnement thérapeutique.
Seul le Comité des droits des personnes handicapées (CDPH) de l'ONU est allé dans le sens des parents, demandant à la France maintenir les soins, dans l'attente d'un examen du dossier sur le fond, qu'il mènerait. Mais la France répète que ces mesures conservatoires "sont dépourvues de caractère contraignant" et met en avant le "droit du patient à ne pas subir d'obstination déraisonnable".
Aucune information ne filtre sur le dispositif de sécurité concernant la mise en place de ce protocole au CHU de Reims, où est hospitalisé sous haute surveillance cet ancien infirmier en état végétatif et tétraplégique depuis un accident de la route en 2008.