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"Abdelaziz Bouteflika abdique"

À la une de la presse, mercredi 3 avril, les réactions des journaux algériens et étrangers à la démission, la veille, du président algérien Abdelaziz Bouteflika.

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À la une de la presse algérienne, la remise, mardi soir, de la démission du président Abdelaziz Bouteflika au Conseil constitutionnel.

Face aux pressions des militaires, le chef de l’État algérien a été contraint d’anticiper son retrait. "Le président Bouteflika notifie sa démission", titre El Moudjahid, en faisant état, également, de la déclaration du chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah – qui promet que les militaires "soutiendront le peuple jusqu’à ce que ses revendications soient entièrement et totalement satisfaites". "L’armée, qui s’est clairement rangée du côté du mouvement citoyen en l’accompagnant dans une rupture raisonnée, a certainement besoin de plus de soutien et d’appui", assure le journal officiel.

Reporters annonce que "Bouteflika précipite la fin de son mandat", et "s’en va après le forcing de l’armée pour l’application de l’article 102 de la Constitution" – qui prévoit que le chef de l’État soit déclaré "inapte" en cas de problèmes de santé majeurs. Le président Bouteflika parti, Gaïd Salah "hausse le ton contre le clan présidentiel". Le Temps rapporte que le chef d’état-major de l’armée a mis en garde l’entourage de l’ex-président contre la tentation de "perdre du temps", de tenter d’empêcher la transition.

Du côté de l’opposition, El Watan relève lui aussi que le départ d’Abdelaziz Bouteflika intervient "sur fond de tension avec l’armée". Un bras de fer relégué au second plan par El Khabar, qui préfère saluer "le tsunami des manifestations [qui] a permis de remettre le pouvoir au peuple", et d’obtenir la démission d’Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis vingt ans. "Bouteflika, la fin", titre sobrement Liberté-Algérie, avec une image crépusculaire du chef de l’État, symbolique de la fin de son mandat. "Abdelaziz Bouteflika, une fin sans gloire", d’après TSA – qui évoque "les conditions humiliantes" de sa démission. "Sommé de le faire par l’état-major de l’armée, Bouteflika part avec un bilan désastreux", accuse le site, qui voit dans le départ du président Bouteflika "un jour historique pour l’Algérie". "Pour la première fois depuis l’indépendance, les Algériens ont réussi à pousser leur président vers la sortie", salue le site, qui reconnaît que "l’implication de l’armée a contribué à accélérer les choses", mais estime que "la victoire reste avant tout celle des Algériens". "Sans leur mobilisation, l’armée aurait sans doute laissé faire un cinquième mandat".

Beaucoup plus critique envers l’armée, Algérie Part parle d’un "coup d’État militaire déguisé juridiquement", et s’étrangle de ce que Ahmed Gaïd Salah, "pour s’attirer le soutien populaire", dénonce maintenant "les fraudes, la corruption et la fuite des capitaux, qu’il attribue exclusivement à un clan qu’il a couvert pendant vingt ans". Le chef d’état-major de l’armée, s’étrangle le site, "pousse l’outrecuidance jusqu’à jurer défendre le peuple, alors qu’il n’a cessé durant ces années de protéger la caste des prédateurs qui ont ruiné le pays". "En offrant à la vindicte populaire les figures-symboles du régime corrompu de Bouteflika, [Gaïd Salah] espère ainsi échapper au jugement populaire et transformer les manifestations à venir en un plébiscite en sa faveur et en faveur de son clan".

Les dessinateurs de presse algériens sont partagés, eux, entre la joie – comme en témoigne un dessin de Dilem – qui dit tout simplement "bon débarras !", soulagé d’en finir avec les portraits brandis constamment depuis six ans, en l’absence d’Abdelaziz Bouteflika. De la joie, mais aussi de l’amertume, à voir avec un autre dessin de Dilem, où le dessinateur évoque le passage à l’heure d’été. "L’Europe a perdu une heure", dit une manifestante. "Et l’Algérie 20 ans" – lui répond un compatriote. Amertume aussi, du dessin de Hic, qui montre un échiquier sur lequel le roi Bouteflika vient d’être mis échec et mat. Mais cet échiquier reste encombré par beaucoup d’autres pions. La partie est loin d’être terminée.

En France, Le Figaro estime que la démission d’Abdelaziz Bouteflika, "ce n’est pas un président qui passe la main, c’est un fantôme qui s’efface, une ombre qui se dissout". "Depuis longtemps, écrit le quotidien français, Abdelaziz Bouteflika était invisible pour son peuple [et] c’est une des raisons de la colère, d’ailleurs. Les Algériens ne supportaient plus d’être représentés par cette image fossilisée. Elle ne disait plus rien de leur pays, de ses forces vives, de ses aspirations, de sa jeunesse", écrit le journal, en prévenant que "des années d’accaparement du pouvoir, de prédation des richesses, de népotisme et de clientélisme ne se tournent pas aisément. La fin d’un règne est acquise, note Le Figaro. L’aube de celui qui suivra est encore incertaine".

En Suisse, la statue déboulonnée du Commandeur Bouteflika fait la une du Temps – un dessin signé Chapatte. "Abdelaziz Bouteflika aura présidé aux destinées de l’Algérie durent vingt ans, mais sa carrière politique remonte à la fin des années 1950", rappelle le journal, qui retrace ce matin le long parcours de l’ex-président, "six décennies de tumultes". "Bouteflika démissionne, et après ?", s’interroge L’Orient Le Jour. Le quotidien libanais se demande qui va gérer la transition et si celle-ci "permettra d’aboutir à des élections libres". "Si les Algériens ont gagné la première manche, la crise algérienne semble loin d’être finie".

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