33 700 manifestants ont battu le pavé dans les grandes villes françaises, samedi, dont 4 000 à Paris pour la vingtième journée de mobilisation. Dans la capitale, le Préfet de police a de nouveau interdit toute manifestation sur les Champs-Élysées.
Les Gilets jaunes ont rempilé, samedi 30 mars, pour leur vingtième journée de mobilisation en dépit des interdictions de manifester face à la crainte de nouveaux heurts. Malgré la poursuite du débat national, le dialogue de sourds entre la rue et le président Emmanuel Macron se poursuit. Au total, l'acte XX aura mobilisé 33 700 manifestants en France, dont 4 000 à Paris, selon le ministère de l'Intérieur.
Dans la capitale, des centaines de personnes se sont rassemblées dans le quartier de la gare de l'Est ainsi que place du Châtelet, où un pique-nique géant a été organisé pour dénoncer le mal-logement. Elles ont ensuite commencé à défiler dans les rues voisines, le long de la Seine notamment.
Échaudée par les saccages sur les Champs-Élysées lors de l'acte XVIII, la préfecture de police de Paris (PP) a de nouveau interdit les manifestations sur la célèbre avenue, ainsi que dans un périmètre incluant l'Élysée et l'Assemblée nationale.
Deux manifestations et quatre rassemblements ont été déclarés, a indiqué la PP dans un communiqué, sans préciser les lieux. Elle craint néanmoins "des déambulations erratiques [ou des] cortèges sauvages" lors de leurs dispersions.
La nouvelle contravention de 135 euros, à laquelle s'exposent ceux qui braveront l'interdit, reste en vigueur après le rejet vendredi par le Conseil d'État du recours de la Ligue des droits de l'homme (LDH).
Face au lourd dispositif policier déployé à Paris, les autorités craignent une délocalisation des heurts dans les villes de province, comme samedi dernier à Nice, où une porte-parole d'Attac avait été blessée dans une charge des forces de l'ordre.
Le procureur a déclaré vendredi que la chute de Geneviève Legay, 73 ans, avait été provoquée par un policier. Ce dernier avait affirmé avoir poussé un homme avant de rectifier son témoignage.
Ville morte à Bordeaux
À Bordeaux, où le centre est interdit aux Gilets jaunes, le nouveau maire Nicolas Florian a décrété une journée "ville-morte" en se disant "très inquiet de ce qui pourrait se passer". La préfecture a évoqué la présence annoncée de "centaines de casseurs".
Plusieurs milliers de Gilets jaunes ont défilé dans la ville lors de cet acte XX dont la mobilisation a repris de la vigueur et paraissait même doubler celle de la semaine précédente (2 500 personnes dans les rues bordelaises, selon une source).
Quelques vedettes du mouvement participaient au cortège, comme Éric Drouet et Jérôme Rodrigues.
Accompagné de la surveillance discrète mais en nombre renforcé des forces de l'ordre, le cortège défilait le long des grands axes de la capitale girondine, improvisant son itinéraire en fonction du blocage de nombreuses rues du centre-ville interdites par arrêté préfectoral.
Interdiction bravée à Avignon
À Avignon, le préfet du Vaucluse, Bertrand Gaume, qui craignait la présence de "groupes activistes violents", tout rassemblement ou manifestation était interdit de 9h à minuit, "intra-muros" et sur plusieurs axes périphériques. Il avait souhaité en particulier protéger le Palais des Papes, "lieu symbolique qui demeure ainsi sensible". Des Gilets jaunes s’y sont cependant donné rendez-vous, arguant qu'"il n'est pas interdit de se promener".
"Toutes nos libertés sont bafouées, on n'en peut plus !", crie Pascale, cadre commerciale et Gilet jaune d'Aix-en-Provence. Comme elle, des centaines de manifestants ont bravé l'interdiction de défiler à Avignon.
Le cortège s'est ébranlé vers 14 h aux portes de la ville, entièrement barricadée par la police, précédé par une centaine de motards "gilets jaunes" qui faisaient le tour des remparts, par les boulevards périphériques.
Les manifestants ont essuyé des tirs de grenades lacrymogènes, dans le milieu de l’après-midi, et les policiers ont esquivé des pavés lancés par des manifestants. Au total, 21 personnes ont été placées en garde à vue pour des destructions, des violences ou des ports d'arme, a indiqué la préfecture samedi soir.
À Saint-Etienne, Toulouse, Épinal et Rouen, les préfectures ont également interdit les manifestations pour prévenir violences et pillages. Des défilés ont également été annoncés à Marseille, Rennes, Caen, Rouen, Montbéliard, Strasbourg ou encore Nice.
Emmanuel Macron continue son tour des régions
Pendant ce temps, Emmanuel Macron poursuit ses rencontres avec les maires dans le cadre du grand débat, censé pourtant être achevé depuis une semaine. Après la Bretagne mercredi, Emmanuel Macron doit clore jeudi en Corse son tour des régions.
Des députés Les Républicains des Hauts-de-France, qui ont boycotté vendredi son invitation à l'Élysée, ont dénoncé "une manœuvre dilatoire destinée à faire diversion alors que le mécontentement de la population n'a jamais été aussi criant".
Samedi dernier, pour l'acte XIX, 40 500 personnes ont manifesté en France, dont 5 000 à Paris, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur, contestés par les Gilets jaunes dont le propre comptage a recensé 127 212 manifestants dans tout le pays.
Avec AFP