Au lendemain du triomphe historique de l'opposition aux législatives japonaises, le yen s'est fortement apprécié, lundi, face au dollar et l'indice Nikkei a bondi pour atteindre son plus haut niveau en séance depuis le début de l'année.
AFP - Le yen s'appréciait rapidement lundi face au dollar après le triomphe de l'opposition aux législatives au Japon, qui clôt deux ans de blocage institutionnel dans la deuxième économie mondiale.
A 04H08 GMT, le billet vert valait 92,66 yens, contre 93,59 yens vendredi soir. Cette poussée de la devise japonaise, néfaste pour les exportateurs, a calmé les ardeurs de la Bourse de Tokyo après un démarrage en fanfare.
A 04H08 GMT, l'indice Nikkei des valeurs vedettes perdait 20,60 points (-0,20%) à 10.513,14 points. Dans la matinée, il avait bondi de 2,21% et atteint son plus haut niveau en séance depuis le début de 2009.
Le Parti Démocrate du Japon (PDJ), principale force de l'opposition centriste, a raflé dimanche la majorité absolue à la Chambre des députés, mettant fin à 54 ans d'hégémonie des conservateurs sur la vie politique nippone.
Selon les projections des médias, le PDJ a obtenu 308 sièges sur 480, contre 119 seulement pour le Parti libéral-démocrate (PLD), la formation de droite du Premier ministre sortant Taro Aso. Les résultats officiels du scrutin devaient être annoncés plus tard lundi.
Majoritaire aux deux chambres du Parlement, le PDJ va avoir carte blanche pour appliquer son vaste programme social (allocations familiales, aides aux plus démunis, baisse des impôts pour les petites entreprises, etc.) destiné à relancer la consommation et à enrayer le déclin démographique.
"Nous accordons bien sûr beaucoup d'importance à la croissance économique, mais nous devons avant tout augmenter le revenu des individus", a souligné le futur Premier ministre et chef du PDJ Yukio Hatoyama.
Cette alternance historique marque la fin de deux ans de quasi-paralysie de la vie institutionnelle du Japon. Ayant perdu le contrôle du Sénat en août 2007 au profit du PDJ et de ses alliés, le PLD éprouvait les pires difficultés pour gouverner, la plupart des lois se heurtant à l'obstruction de la chambre haute.
"Initialement, les marchés vont se sentir immensément soulagés que toutes ces incertitudes soient levées, et qu'au moins les deux chambres du parlement soient à nouveau dominées par un seul parti", a expliqué à l'AFP Noriko Hama, économiste à la Doshisha Business School de Kyoto.
La hausse du yen "reflète l'optimisme entourant le nouveau pouvoir", jugent les économistes de Barclays Capital. "Mais les résultats sont en ligne avec les sondages et devraient déjà se refléter largement dans les prix du marché. Nous pensons donc que l'impact positif pour le yen sera limité".
Selon Richard Jerram, économiste chez Macquarie Securities, le programme du PDJ fait naître "des perspectives d'accélération de la croissance, mais son crédo économique de base n'est pas particulièrement amical envers les marchés".
"Après la mauvaise gestion prolongée du PLD, la politique économique devrait prendre un tournant quasi-socialiste délibéré", prédit-il.
Le programme de relance par la consommation du PDJ se heurte au scepticisme de nombreux économistes, qui s'interrogent notamment sur son financement alors que la dette publique japonaise atteint déjà 170% du PIB. Les milieux d'affaires ne sont pas non plus réputés très favorables à M. Hatoyama.
"Nous espérons que le PDJ (...) répodra en parti responsable aux attentes de la population", a prudemment déclaré le président de la puissante organisation patronale Nippon Keidanren, soutien traditionnel du PLD, Fujio Mitarai.
"Je ne pense pas que les grandes entreprises peuvent se permettre de donner l'impression de traîner les pieds, ou de s'opposer aux volontés d'un parti qui a recueilli un tel soutien populaire. Je suis sûre qu'elles s'accomoderont de la nouvelle situation politique", a cependant prédit Mme Hama.