Dans la presse, lundi 4 mars, les réactions, en Algérie et en France, au dépôt de la candidature d’Abdelaziz Bouteflika devant la Cour constitutionnelle. À 82 ans, malade, président algérien confirme être candidat à un cinquième mandat, malgré les manifestations de ses opposants.
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À la une de la presse algérienne, le dépôt, dimanche soir, de la candidature d’Abdelaziz Bouteflika au Conseil constitutionnel. Le président algérien confirme être candidat à un 5e mandat.
Face à la mobilisation des Algériens, qui ne veulent pas de cette candidature, le chef de l’État, 82 ans, toujours hospitalisé en Suisse, propose aussi une série d’engagements, d’après El Moujahid. Abdelaziz Bouteflika promet, s’il est réélu le 18 avril prochain, de réformer la Constitution, de ne pas terminer son mandat et d’organiser une présidentielle anticipée à laquelle il ne se représentera pas. Des promesses présentées comme des "engagements fermes" par le quotidien officiel, qui affirme que " le chef de l’État exprime son devoir ultime au service de l’Algérie et de son peuple". S elon El Moujahid, Abdelaziz Bouteflika n’aurait "pas d’autre ambition que d’assurer une succession réussie et paisible, et de voir l’Algérie avancer vers davantage de démocratie et de progrès pour surmonter toutes les épreuves et relever tous les défis". Un plaidoyer semblable à celui de Reporters. "Engagements et sortie de crise", titre le journal, en assurant que les promesses d’Abdelaziz Bouteflika "visent à asseoir un climat de confiance dans le pays et à apaiser les esprits", qu’elles constituent "une occasion à saisir pour revoir les carences tant décriées et donner un nouveau souffle aux citoyens qui ne demandent, finalement, que plus de liberté, de démocratie et de justice".
Les opposants du président algérien ne sont pas convaincus. D’après El Watan, le dépôt de sa candidature a donné lieu à de nouvelles manifestations, cette nuit, dans plusieurs villes, notamment à Guelma, Jijel, Oran, Constantine, Skikda et Sétif . "Bouteflika défie les Algériens", accuse le journal, qui a choisi pour sa une un dessin d’Abdelaziz Bouteflika retranché derrière la police, reprenant la réplique de son homologue français, Emmanuel Macron, à propos des accusations portées contre lui au sujet de l’affaire Alexandre Benalla: "Qu’ils viennent me chercher", avait lancé Emmanuel Macron à l’intention de ses détracteurs. "Qu’ils viennent me chercher", répète à son tour le président algérien, à ceux qui manifestent contre lui. "Envers et contre le peuple", dénonce Liberté-Algérie, qui rapporte que l’ancien Premier ministre Ali Benflis et le président du Mouvement de la société pour la paix, Abderrazak Makri, ont annoncé leur intention de jeter l’éponge, de ne plus être candidats, l’un et l’autre jugeant que "le scrutin n’a ni sens ni raison d’être", et que "les jeux sont faits". Le site d’information TSA dénonce, lui, "l’obstination à hauts risques du pouvoir" en se demandant si celui-ci " sous-estime la profondeur" des demandes exprimées par les manifestants ou s’il "la perçoit à sa juste mesure et la récuse quand même", "s’il s’agit d’une erreur de calcul ou d’un choix pour l’aventure".
Ces critiques sont partagées par les dessinateurs de presse. Dans le dessin de Dilem pour Liberté-Algérie, le président est "en route vers le cinquième mandat", un chemin qu’il emprunte couché dans son lit d’hôpital, sous la bonne escorte de deux policiers. Tandis que Hic, pour El Watan, montre un membre du Conseil constitutionnel, qui a maintenant dix jours pour valider le dépôt de candidature d’Abdelaziz Bouteflika, tentant de la faire passer tant bien que mal, dans les toilettes.
Mobilisation également en France, où vivent de nombreux Algériens et Français d’origine algérienne : 6 000 manifestants hier à Paris, 1 500 à Marseille, qui compte une importante diaspora algérienne. "De Marseille à Alger, ils disent stop à Bouteflika", annonce La Marseillaise. D’après le quotidien local, "la promesse du président de se retirer s’il est élu n’a pas fait baisser la pression de la rue". "La France vigilante face à l’incertitude en Algérie", titre Le Figaro, qui rapporte que "l’Elysée observe de près la situation du pays, tout en veillant à ne pas être accusé d’ingérence". "Que dire sur l’Algérie ? Que dire aux Algériens ?", s’interroge le quotidien conservateur, qui rappelle la nature "épineuse" de la "question algérienne" pour le gouvernement français, qui aurait en tête "le précédent libyen", "même si la situation est très différente". "Ailleurs, les printemps arabes ont montré que le romantisme de la libération le cédait rapidement à la pire des menaces : l’hydre islamiste", met en garde Le Figaro.
Plusieurs quotidiens français expriment malgré tout leur soutien à l’opposition algérienne. Evoquant lui aussi les printemps arabe, et les craintes des grandes puissances d’une déstabilisation de l’Algérie, L’Humanité s’inquiète de voir le pouvoir algérien, maintenir un "grotesque le statu quo", et "jouer avec le feu (alors que) les manifestants affichent leur pacifisme, revendiquent un nouvel élan, ne tolèrent plus la corruption et la stérilisation des richesses nationales". "Longtemps, l’opinion a craint que se lever ferait courir le risque d’un scénario à la syrienne. La jeunesse se sent assez forte pour l’éviter; le sera-t-elle assez pour éviter le retour d’un réflexe de peur? , s’inquiète L’Huma. La jeunesse algérienne, dont La Croix salue le choix de "prendre ses responsabilités avec dignité". "La société algérienne est une société qui n’a plus peur, alors que le pouvoir en place jouait de cette crainte pour se maintenir, contre vents et marées", prévient le journal. "Quel peuple, dont l’âge moyen est inférieur à 30 ans, accepterait d’être ainsi dirigé par un vieillard diminué, que l’on ne peut plus voir qu’en photo?", interpelle La Croix, pour qui "ces femmes et hommes (qui manifestent) disent le calme, la maturité, la tranquille assurance de la société civile qui émerge. Sa soif de démocratie, son envie de vivre, tout simplement".
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